J'ai regardé et écouté avec attention et plaisir la conférence concernant les métiers du jeu vidéo (ou plutôt le métier de journaliste), grâce à l'enregistrement de Samy_Fit. Et j'ai bondi au moment que je vous demande de visionner.


Mais si Carole, la question est intéressante

Allez à 57 minutes 47 secondes.

 

J'accuse !

Julien affirme que le joueur ne fait que l'acquisition d'une licence d'utilisation d'un jeu lorsqu'il se le procure dans un magasin. C'est faux.

J'ai expliqué cela dans un billet déjà ancien concernant précisément la revente de jeux vidéo et le bénéfice que les éditeurs en tiraient (même s'il n'est pas aussi élevé qu'ils le voudraient).

Tous les biens matériels deviennent la propriété de ceux qui en font l'acquisition. Il s'agit du droit d'épuisement. Entendons nous bien : On parle ici du support physique et non de ce qui se trouve sur la galette. Il ne vous est effectivement aucunement autorisé de louer, de prêter ou d'en faire représentation publique. Vous n'avez aucun droit sur l'oeuvre qui se trouve sur le support. Mais le support en lui même peut parfaitement être revendu.

Comme le souligne la personne qui pose la question ; lier un objet physique à l'utilisation d'une seule et même machine entre en collision directe avec le principe du droit d'épuisement.

Julien fait l'amalgame avec les services en ligne qui eux, échappent effectivement au droit d'épuisement du fait même qu'ils ne sont pas matériels (et encore, cela peut dépendre du type de licence). C'est d'ailleurs également pour cela que les éditeurs souhaitent développer les services en ligne et la dématérialisation. La législation d'une façon générale leur est encore plus favorable.

Pourquoi cet amalgame ?

Parce qu'effectivement, si on regarde un peu sur certaines jaquettes, des clauses abusives figurent dans les conditions de Licence d'Utilisateur Final. Jetons un coup d'œil à celle de Ni No Kuni.


On constate effectivement que Sony voudrait qu'on lui demande une autorisation pour revendre le jeu. Le souci, c'est que ce que se trouve sur cette jaquette est un texte traduit sans être localisé. Il ne correspond pas à la législation en vigueur en France (et en majorité en Europe).

On retrouve exactement la même chose sur une jaquette anglophone, preuve qu'il n'y a pas de réelle localisation. Juste une bête traduction.

Or, on trouve des exemples de localisation bien mieux réalisés. Chez Nintendo par exemple, le livret qui accompagne les jeux précise quels sont les droits du client qui fait l'achat d'un de leurs logiciels. Et ce, en fonction du droit local qui s'applique. Ainsi ce livret cite-t-il le code de la consommation français. Nulle part il n'est fait mention d'une quelconque interdiction à la revente. Mieux, la garantie précise même (en gras) qu'elle ne s'applique pas si le jeu a déjà été acheté avant que l'utilsateur actuel n'en ait lui même fait l'acquisition.


 

Chez Microsoft on est plus subtil. On parle de transmission et pas de revente.

Il y a donc différentes façon de tenter d'approcher le joueur et son droit de revente en fonction des marques, des éditeurs. Mais quoi qu'il en soit, les CLUF ne peuvent pas outrepasser les droits nationaux. En l'espèce, on a encore jamais vu un éditeur attaquer des magasins en raison de la revente de jeux d'occasion dont se sont débarrassés des consommateurs. Ils préfèrent les tuer en changeant de modèle économique. En ajoutant des pass en ligne pour monter le prix de l'occasion et inciter à acheter du neuf. C'est probablement par ce biais que la balance penchera en leur faveur. Car l'argument concurrentiel est de taille. Si les acteurs du secteur ne se mettent pas d'accord (ce qui serait très possible...) il sera impossible de voir Sony laxiste vis à vis de l'occasion et Microsoft très fermé avec des liens indissociables entre un jeu et la console sur laquelle il est joué.

Quoi qu'il en soit, le droit de l'économie numérique sera appelé à bouger aussi bien pour ceux qui produisent des œuvres que pour ceux qui les consomment. Mais je persiste et signe Julien : On a parfaitement le droit de revendre son jeu vidéo. Même si on l'a acheté chez Carrefour:) .

 

NB : Pour ceux qui sauteraient au plafond, le titre accrocheur et le désacord sur ce sujet ne s'expriment pas sur un ton vindicatif, mais collaboratif à un éventuel débat. Si vous avez des éléments à charge et à décharge, n'hésitez pas à les poser ici !