Alors que le générique de fin apparaît pour la quatre-vingt quatorzième fois à l'écran (le mot le plus cité du jeu est CAPCOM), j'avale fébilement mon vingtiemme Doliprane, mon corps n'acceptant plus toute cette décharge de débilité profonde que j'ai du subir de longues heures durant. Cher journal, pire qu'un Uwe Boll à trois têtes sous acide à qui on aurait filé cent milliards de dollars pour faire le film qu'il veut, pire qu'un double-combo Michael Bay / Rolland Emmerich qui feraient un film sur des robots géants durant la fin du monde, pire que cent fans de Chrono Trigger à qui t'aurais dit "j'ai pas trop trop adoré le début du jeu", aujourd'hui j'ai joué à Asura's Wrath. Et comme vous vous en doutez désormais, c'était de la merde.
Dans le premier article de cette section, j'avais parlé de Battlefield 3. Bon, depuis le temps, tout le monde le sait, je ne suis pas super pote avec les jeux japonais. Présenter un jeu occidental pour le premier article des jeux de merde auxquels j'ai pu jouer, c'était plus ou moins pour mettre un peu d'eau dans le vin avant l'heure. Un peu comme quand on présente notre ami Noir pour faire genre on n'est pas raciste. Donc, en effet, il y a un grand nombre de jeux japonais que je n'apprécie pas, que ce soit sur cette génération ou non : El Shaddai, Bayonetta, Chrono Trigger (AIE, c'est bon ça va le lancer de cailloux !)...
Ok, je l'avoue, je retarde l'inévitable avec mes blagues trop subversives et pleines de bon sens. En fait, je ne sais tout simplement pas comment introduire Asura's Wrath. Je suis face à une feuille sur laquelle j'ai écris des idées à propos du jeu au fur et à mesure que j'avançais. En vrac, je peux y lire "PUTAIN", "QUOI????", ou encore "débile mental". Reste à organiser tout ça pour pas qu'on me ressorte "t'es passé à côté du jeu". Mais franchement, on sait tous très bien que c'est ce que vous penserez, HEIN ?
Cher journal, je vais essayer de te résumer l'histoire. Ce qui n'est en fait pas bien difficile, puisqu'on a beau être en face d'un jeu parlant du cosmos, de dieux divins de la divinité, le tout étalé sur plusieurs milliers d'années, l'univers est en fait tout rikiki. Asura est un demi dieu qui fait partie d'un gang de demi dieux qui tabassent des impuretés (et sachant que le méchant Vlitra, a un nom d'eau de Javel, on se croirait dans une pub pour un lave-vaisselle). Un jour il est accusé de trahison pour rien (en fait c'est probablement à cause de quelque chose, mais comme les scénaristes avaient la flemme de trouver pourquoi, ils ont juste décidé d'appeller ça "La Cause", je vous jure que je l'invente pas), les autres tuent sa femme et capturent sa fille parce qu'elle permet d'avoir plus de pouvoir. Donc du coup Asura dort pendant je sais pas combien de milliers d'années, et pendant ce temps les demi dieux sont devenus des dieux. Du coup il part botter le cul de ces derniers. Donc voilà, ça c'est la première heure, ensuite pendant environs 8 heures il n'y a pas de scénario, il les tabasse un à un, et à la fin y'a un des dieux qui se dit "ah ouais merde, on l'a accusé de trahison pour rien en fait" et qui aide Asura, et les deux défoncent la gueule des autres dieux et des impuretés qui restent. Et ils sauvent la fille. Voilà.
Tu sais, mon bon journal (oui je reparle du journal pour jouer un peu le jeu, mais soyons francs, je veux pas juste me moquer gentiment du jeu, je veux lui mettre la misère), si la mise en scène se prenait pas autant au sérieux, on pourrait presque penser que c'est une parodie. L'argument que je retrouve souvent en faveur de ce jeu, c'est "moi qui ait grandi avec Dragon Ball et Les Chevaliers du Zodiaque, j'adore ce jeu !". Je ne connais rien à ces deux dessins animés, mais si ils sont du niveau de Asura's Wrath, et ben je suis désolé de te le dire mec, mais bonjour l'enfance de merde.
Asura's Wrath n'a quasiment pas de scénario. En fait si on le regarde de plus près, il est plus ou moins l'équivalent de la scène de combat avec tous les agents Smith de Matrix Reloaded, mais étalé sur 10 heures. Avec autant de cinématiques (vous inquietez pas, je vais revenir là dessus), on pourrait imaginer pas mal de temps de dialogue. Sauf que non, il n'y a quasiment pas de dialogue, et quand il y en a c'est à 95% du "JE VAIS TE POURRIR LA TRONCHE", "NON C'EST MOI QUI VAIT TE POURRIR LA TRONCHE". J'exagère à peine.
L'un des soucis du "scénario", c'est qu'il ne se passe rien. Mais genre vraiment. Et apparemment le scénariste a du s'en rendre compte, puisqu'entre deux moments de vide, Asura a des flashback. Maintenant, petite question. Généralement, quand vous avez un souvenir qui vous revient, c'est quoi ? Votre mariage ? Votre premier enfant ? Le permis ? Votre première fois avec une demoiselle ? Et bah Asura, lui, quand il s'emmerde, il se souvient du bon vieux temps où il faisait des missions de routine où il tabasse des gorilles impurs. Donc en fait il se passe tellement rien dans le présent que même des souvenirs équivalents à quand vous vous êtes grattés les testicules ce matin, c'est plus divertissant.
Et là, moment flippant, j'ai toujours pas parlé des personnage. Oh bon Dieu les personnages. Dire qu'ils n'ont pas de personnalité, ça serait leur rendre honneur. Un peu à l'image de ces films ratés dans lesquels les personnages handicapés ne vivent que pour être des personnages handicapés, sans qu'ils n'aient d'attributs d'être humains, les personnages de Asura's Wrath se définissent par leur gueule. Asura, c'est le mec énervé. Voilà, c'est sa personnalité. Son meilleur pote qui se rend compte cinquante mille ans plus tard que tuer ses potes c'est pas gentil, il a un masque. Sa personnalité, c'est d'avoir un masque. Non mais je l'invente pas, dans la fiche des personnages, sa description c'est "Son masque ne sert à rien, si ce n'est de cacher ses émotions". Bah oui, plutôt que de lui faire avoir des émotions, faisons-lui avoir un masque. Les autres personnages ne servent à rien. Y'a le méchant qu'on voit venir dès sa première apparition, la fille qui sert de carotte à l'âne qu'est le personnage principal, et c'est à peu près tout. Les méchants sont tous cons, il arrive à peu près 10 à 15 fois dans le jeu qu'ils t'envoient une grosse boule de feu très puissante, s'auto congratulent, puis sont étonnés qu'au final Asura soit encore en vie. Et parfois ça arrive plusieurs fois à un seul méchant. DUUUUUUH.
Dans la consctruction même du jeu, y'a plein de choix complètement débiles. En fait le jeu est construit comme une série, il y a trois "saisons", divisées en plusieurs "épisodes". Comme dans une série, on a le nom des créateurs en début et fin d'épisode. Ca aurait pu aller, mais le fait est que chaque épisode dure 20 minutes maximum, donc du coup on a quasiment en permanence le nom des créateurs à l'écran, pour bien montrer que les développeurs font tout pour qu'on en ait rien à foutre de l'histoire. En plus, avant chaque épisode, t'as un petit résumé de l'épisode... QUI VIENT. Donc en fait le jeu se spoile délibérément. Je comprends que ça puisse exister dans une série, ça peut te donner envie d'acheter les épisodes suivants, ou mettre la même chaîne la semaine suivante à la télé pour savoir la suite. Mais là, on est dans un jeu vidéo BORDEL, les épisodes suivants, on les a DEJA. Tout ce que ça fait, c'est nous spoiler la gueule juste avant que les évènements arrivent... En plus, de temps en temps, en plein milieu d'une scène, il y a une apparition d'un screenshot du jeu avec un filtre instragram, qui te remet quelques secondes avant le moment où t'as été interrompu. Donc à deux reprises dans le jeu, voilà ce qu'il se passe :
- Gros spoil de l'épisode que tu vas voir, tu entrevois le méchant qui s'écrie "HA HA HA JE VAIS TE TUER"
- Début de l'épisode, tu vois le méchant qui s'écrie "HA HA HA JE VAIS TE TUER"
- Screenshot instagrammé du méchant qui s'écrie "HA HA HA JE VAIS TE TUER"
- Retour quelques secondes avant, de nouveau le méchant qui s'écrie "HA HA HA JE VAIS TE TUER"
Cher journal, désolé d'avoir appuyé ma mine aussi fort sur toi. Tu sais, c'est pas facile de parler d'un jeu aussi mauvais tout en gardant son sang froid. Bon, je te rassure, il est temps d'arriver au coeur de cet article plein d'amour et de fleurs et de gens pas contents qui crient fort. Parlons maintenant du gameplay...
...
Voilà c'est fait. Il n'y en a pas. Ah si pardon, il y a bien cet espèce de Beat'em All minable indigne d'une PS2, ou du mini jeu de Shoot qui ferait passer Fruit Ninja pour du hardcore gaming. Dans ces deux phases, le but est de replir une jauge de "rage", puis appuyer sur R2 pour enclencher la cinématique suivante. Donc ouais, ces phases de "jeu" sont plus ou moins des barres de chargement déguisées. Si toi aussi tu as toujours voulu incarner une barre de chargement, alors procure-toi Loading Screen Simulator 2012.
En plus de tout ça, Asura's Wrath est un gigantesque doigt d'honneur à tous les acheteurs du jeu. En gros, voilà comment j'ai vécu la première cinématique (dans une scène qui arrive AU MOINS 40 fois... Au moins). Asura se bat contre des monstres, à un moment il prend son élan pour mettre un coup de pied à un gros méchant, la touche triangle apparaît. Moi, évidemment, je m'y attendais pas, donc j'ai pas eu le temps d'appuyer. Je m'attendais à une mort ridicule, comme pour tous les QTE ratés, et là... La cinématique continue. Genre "ah tu suis pas ? Ok bah je continue sans toi alors, vas te faire voir !".
Ok, très bien. Pourquoi faire apparaître une touche alors ? Pourquoi tu me demandes mon avis si t'en as rien à foutre ? Les mecs, si vous vouliez pas faire de QTE, fallait l'assumer, faire votre histoire de merde en une série en images de synthèses qui sortirait en DVD au rayon "ça ressemble vite fait au manga que ton petit fils regarde, achète-moi !", mais pas un jeu vidéo bordel ! L'essence même du QTE est de permettre une narration tout en gardant le joueur sur le qui-vive. Ici, ce système ne convient à aucune utilisation du jeu. Si tu le considères comme un jeu vidéo, tu appuies sur le bouton tout en sachant que ça ne sert à rien, donc ton expérience est gâchée. Si tu le considères comme une expérience passive, t'as en permanence des boutons de manette qui s'affichent à l'écran, donc ton expérience est ratée.
Pour ma part, je considère qu'il y a deux types de personnages principaux de jeu vidéo. Le premier, c'est celui qui tente de faire entrer l'histoire de manière diégétique. On lui permet de mettre son propre nom, on s'adresse à lui souvent selon ses propres actes dans le jeu. C'est le cas de beaucoup de RPG, comme Knights of the Old Republic (KOTOR) ou Pokemon. De l'autre, on a des personnages principaux plus déconnectés du joueur. Ce dernier ne s'identifie pas forcément au protagoniste, comme ça peut être le cas avec Kratos ou Max Payne, qui ne reflète certainement que peu de joueurs dans leur personnalité. Ici, il est plus question d'aider le personnage dans sa quête, on suit son histoire de manière détachée, mais on l'accompagne dans les actes faisant avancer l'histoire.
Et là, y'a Asura's Wrath qui se ramène et qui se dit "Hey ! Et si tu servais à rien, joueur ?".
Au bout d'un moment, il y a tellement de scènes de destructions massives que ça m'a totalement perdu. Impossible de faire la moindre scène marquante au milieu de tout ce brouhaha, même en y mettant du Dvorak.
Cela peut sembler secondaire, voire anecdotique, mais le fait est que selon moi, cette chose qu'est Asura's Wrath est contre nature. Le jeu vidéo, par son existance même, ne peut pas laisser le joueur sur le carreau comme ça. Un film peut exister sans spectateur, tu le mets en route, et même s'il n'y a personne dans la salle, le film s'en fout et ne t'a de toutes façons pas demandé ton avis. Un jeu ne peut avancer s'il n'est pas joué. Asura's Wrath s'en fout. Mais il prend quand même le temps de te demander. Par contre, ta réponse, tu peux te la mettre où je pense. T'as cru avoir acheté un jeu ? Bim dans ta gueule, je fais exactement ce qu'un jeu ne doit pas faire.
Cher journal, aujourd'hui j'ai joué à Asura's Wrath. Et c'était bien de la merde.