(Ceci est une chronique inspirée de Resident Evil VII ; elle contient des spoilers
sur la première partie du jeu)

Yop tous !

Depuis quelques nuits maintenant, j'avance au coeur de l'obscurité. Je ne dois pas être le seul, mais diable, cette vieille demeure aux parquets vermoulus occupe mon esprit autant que mes soirées. Depuis que je suis captif en ces lieux décrépis, j'essaye de m'échapper. Ce n'est pas une mince affaire. Je dois me cacher, éviter ce père de famille qui semble décidé à me faire la peau. Mourir, et mourir encore, c'est peut-être cela le pire: depuis que je suis retenu ici, j'ai découvert que ma conception classique de la vie et de la mort n'avait guère cours dans l'esprit malade des occupants de la bâtisse. Eux n'y semblent d'ailleurs pas soumis: j'ai beau les tuer sans cesse, ils reviennent inlassablement me hanter, me pourchasser. Alors ma seule option, c'est la fuite. Je suis une bête traquée.

Sortir. C'est l'objectif que je me suis fixé, mais les portes restent désespérément fermées. Depuis quelques jours maintenant, j'ai réussi à accéder au vestibule de la demeure, qui m'a permis d'explorer cet endroit plus en profondeur. Ce que j'ai découvert dans les sous-sols de la maison me fait froid dans le dos. J'ignore quelles expériences contre-nature sont réalisées ici, mais les créatures qui m'ont assailli dans la pénombre glacée n'ont plus rien d'humain... si elles l'ont été un jour. Survivre a eu un prix exhorbitant: j'y ai laissé les quelques cartouches que j'avais glanées, et je n'ai plus guère de quoi me soigner lorsque je suis blessé. La pénurie est dramatique, elle réduit mes chances. Surtout que Jack, je connais à présent son nom, me cherche toujours avec autant d'insistance.

Nos rencontres, avec Jack, sont régulières. Lui joue à cache-cache, moi je cours pour ma vie. Dans le garage, il a bien fallu que je lui fasse face, j'étais coincé, sans la moindre chance de m'échapper. Heureusement, il a fini carbonisé dans le véhicule qu'il avait utilisé pour me tenter de me renverser. Vaincu, donc, mais toujours pas décédé.

Je l'entends qui m'appelle, je suis à l'affût de chacun de ses pas. Qui l'eût cru ? Le plancher grinçant est devenu un précieux allié. Je scrute, j'écoute, je me cache de mon adversaire en profitant de chaque trappe, de chaque recoin d'obscurité. Et je suis parvenu, finalement, à rallier ce coeur atroce et palpitant de la demeure, où les corps martyrisés sont entreposés comme des pièces de boucher. C'est ici que Jack me rattrape, encore et encore, me jette dans une fosse où je n'ai guère d'autre choix que de l'affronter. J'esquive, je projette ces sacs de chair accrochés au plafond pour tenter de le ralentir. Parfois, je parviens à le pousser dans ses derniers retranchements, nous combattons alors à armes presque égales, ayant réussi à me procurer une tronçonneuse pour lacérer ses chairs et l'empêcher de se régénérer. Le vaincre ? Je n'ose y croire. Cela fait des dizaines de fois que nous nous affrontons, et mon ennemi se révèle immuablement redoutable, plus encore lorsqu'il sent sa mort proche. Des nuits et des nuits que je répète cette même chorégraphie, avec cette boule dans le ventre, cette peur d'aller une fois encore au tapis.

Cinquante fois, peut-être soixante, pour parvenir à sortir victorieux de cette bataille. Mais cette fois, j'y suis. Je suis à nouveau démuni, sans munitions, blessé et en perdition. Je n'ai guère d'autre choix que d'espérer, avancer avec d'infinies précautions pour glaner quelques herbes et remèdes qui me permettront de me soigner. C'est étrange, la maison semble bien silencieuse, presque paisible à présent que son croque-mitaine s'en est allé. Et maintenant, je peux ouvrir cette porte qui me donne enfin accès au jardin. Fuir? Impossible, toutes les issues sont fermement condamnées. Je n'ai guère qu'un chemin à suivre, car au loin, déjà, une autre demeure m'attend. Et le mal, je le sens, y est un résident permanent...