De l’autre côté de l’atlantique, l’usage veut de taxer de ‘’vaporware’’ les produits informatiques survendus et amenés à disparaître. Mais l’illusionniste Magic Leap (ML) se bat avec l’énergie du désespoir pour échapper à cette funeste sentence commerciale. Fidèle à l’état d’esprit opportuniste de son dirigeant qui blâme le contexte extérieur, en réalité la pandémie et ses conséquences économiques ne font que mettre en exergue l’impuissance de la société à redorer un blason terni par de fausses promesses.

La traduction immédiate est l’annonce d’un nouveau dégraissage massif du personnel et ce « à tous les niveaux hiérarchiques », se désole Rony Abovitz, PDG de cette ancienne pépite. S’il se refuse à quantifier le nombre de personnes remerciées, l’agence Bloomberg rapporte, selon ses sources, plus de la moitié du personnel aurait fait les frais de cet énième plan de licenciement.

Depuis décembre dernier, ML accuse difficilement le contrecoup commercial de son casque Magic Leap One AR. Ventes désastreuses (100 000 unités escomptées.. 6000 ventes effectives en six mois), prix prohibitif (3000$ réduit dans la précipitation à 2200$) et technologie très en deçà des promesses ont entrainé une cascade de licenciements et de claquement de porte de ses cadres dirigeants, avant l’évocation d’un probable repreneur. Mais très vite, la nécessité d’opérer un repositionnement marketing en direction des entreprises a été soufflée dans les oreilles des décideurs…

Pour Lewis Ward, analyste émérite de l’agence IDC, il est exagéré d’imputer à la pandémie les mauvaises perspectives économiques qui attendent Magic Leap. « Bien que les dépenses informatiques des entreprises diminuent, il existe des opportunités de marché tels que les outils de collaboration virtuelle à distance » , glisse-t-il. ML aurait pu tirer son épingle du jeu à l’exemple de Parsec dont la suite logicielle collaborative destinée aux développeurs rencontre un fort succès. Selon lui, cette crise sans précédent a mis en exergue les faiblesses structurelles de Magic Leap.

« Le coût élevé du casque, en plus d’un catalogue de jeux et d’applications dérisoire n’ont rien de séduisant pour le joueur/utilisateur » , égrène l’analyste. Une porte de sortie de crise existe néanmoins. Evoqué par le PDG de ML , « le recentrage vers le marché professionnel est impératif », abonde l’analyste Lewis Ward mais il tarde à se concrétiser. D’après les projections du cabinet IDC, la réalité augmentée « a un bel avenir devant elle auprès des entreprises ». La faillite de Magic Leap est donc à écarter : « je ne pense pas que ce soit la dernière fois que nous entendrons parler de Magic Leap ».