1987, l'année de ma naissance. Sortie de bons nombres de choses aussi, des jeux, des grands films et plus particulièrement, Blue Velvet. Quatrième long métrage de sieur Lynch aprés un étrange Eraserhead, un troublant Elephant Man et un décevant Dune. 

Loin des réfléxions profondes d'un Lost Highway ou de la critique acerbe de Mulholland Drive, Lynch signe ici un film d'une narration pure, en privilégiant avant tout son ambiance. 

Synopsis : 

Alors qu'il se ballade tranquillement dans un champ, le jeune Jeffrey, revenu dans sa ville natale en raison de l'état de santé de son père, trouvera dans l'herbe une oreille fraichement tranché. N'hésitant pas une seconde, il l'a ramène au poste de Police. S'ensuivra une longue enquête pour découvrir à qui appartient cette fameuse oreille ainsi que les secrets qu'elles renferment...

Cast et Réal' :

Kyle MacLachlan, connu de Lynch pour sa présence dans Dune et par la suite dans Twin Peaks, tient ici le rôle principal. S'il est un acteur mésestimé, c'est bien lui. Au même titre d'ailleurs qu'un Bill Pullman ou encore Sam neil..mais je m'égare. C'est au côté de l'excellent et regretté Denis Hopper que Kyle donnera la réplique. Autre actrice familière du cinéma de Lynch, Laura Dern, que l'on reverra dans Wild at Heart (Sailor et Lula) ou encore Inland Empire. Ce casting s'achevera avec la présence de Isabella Rossellini en Dorothy Vallens, elle aussi présente par la suite dans Sailor et Lula.

Quatrième métrage donc pour Lynch, on y assistera à moins d'expériences filmiques, moins de délires visuelles ou encore de tentative de perte de spectateur par une chronologie perturbante. La narration se veut clair, point de flashback ou autres techniques étranges pour les néophytes. Blue Velvet semble d'ailleurs le meilleur film pour commencer la filmographie du monsieur.

C'est Blue Velvet qui signera pour la première fois la collaboration de Badalamenti et Lynch. Les deux monsieurs n'ayant pas travaillés ensemble par le passé. Angelo Badalamenti signe ici une musique typé film noir, policier voir même un peu Jazzy sur les bords. Du tout bon donc, s'inscrivant parfaitement dans l'ambiance du film. Notons toutefois qu'elle se veut plus anonyme que celles des films suivants, Badalamenti semblant plus assuré par la suite. 

Une certaine idée de la jeunesse : 

 

Le choix des protagonistes principaux n'est pas anodin. Deux jeunes, l'un revient pour voir son père et l'autre est une jeune fille encore à l'école s'attachant doucement mais surement au héros. 

Lynch nous présente ici une jeunesse désabusée, une jeunesse n'ayant plus d'empathie pour sa propre famille et cherchant à tout prix à fuir cet état de fait. Ainsi, on ne verra notre héros rendre visite à son père que deux fois durant le film, il ne lui parlera pas, ne montrera aucun signe de pitié ou même de tristesse. L'image du père sera au passage toujours trouble, jamais vraiment présente. Comme si par le choix de garder en quelque sorte une vision anonyme du père, Lynch nous présentait la vision du héros sur celui-ci.

Il en sera de même pour la situation du héros, devant plus ou moins travailler dans la quincaillerie de son père durant sa convalescence, on ne le verra que très peu de fois en son sein. Lynch tente-t-il de nous sous entendre que le héros y travaille la journée et fait ce qu'il a à faire le soir ? Il semble plus probable qu'il dépeindra l'image du jeune rejettant ses responsabilités.

Cette vision de jeunesse fuyant en quelques sortes ses devoirs, se verra renforcer par la suite du film. On y verra notre héros, chercher des réponses sur cette fameuse oreille comme si tout cela n'était qu'un jeu. Il se cache dans des placards, se crée un appareil photo camouflé ou se déguise tel un enfant. Avant même d'être un thriller voir une enquête policière, le film prend des tournures de films d'enfants sur un enfant. 

Ce n'est au final que par la mort et le sexe que le jeune héros commencera à devenir adulte, à prendre conscience des choix qu'il fait ainsi que de leurs conséquences. La mort et la violence frappant le héros alors qu'il croit encore jouer un jeu sans conséquence. 

L'amour sera aussi traité du point de vue de la jeunesse. L'amourette entre notre héros et la jeune blonde aura ainsi des relents d'amour de lycée, la jeune fille pardonnant son amoureux avec une facilité assez déconcertante. Il en sera de même pour la vision de l'amour par le rêve qu'aura la jeune fille au début du film, un monde sombre reprenant ses couleurs grace aux rouges gourges amenant l'amour sur terre...

Une ambiguïté sexuelle :

Aprés avoir posé sa base narratrice ainsi que ses thèmes forts (jeunesse, amour, abandon), Lynch n'oubliera pas ce qu'il maitrise comme personne, la symbolique. Choisissant de placer son film dans une époque plus ancienne que celle de la réalisation, permettant ainsi d'aborder des thèmes plus sensibles. 

L'homosexualité semble être le premier choix d'interprétation. Le héros devenant ainsi homosexuel refoulé, rejettant ce qu'il est de manière inconsciente. Plusieurs indices semblent le laisser croire. Comme cette fameuse phrase que répétera Dorothy plusieurs fois durant le film et notamment juste aprés que le héros lui ait fait l'amour " Il a mit sa maladie en moi". De cette phrase résonne tous les clichés homosexuels connus. L'homosexualité en tant que maladie contagieuse. De plus l'attirance du héros pour Dorothy semble se faire tout d'abord à cause de l'aspect androgyne de celle-ci. En témoigne cette scène où l'on peut la voir se déshabiller, retirer sa perruque et paraitre soudainement trés masculine de dos. 

Autre point, la boucle d'oreille que portera le héros tout au long du film. Celle ci n'ayant pas la même symbolique qu'ici, elle semble représenter pourtant la sexualité du héros. Les boucles d'oreilles ayant été popularisé par la communauté gay et hippie aux états unis. Le héros semble ainsi échapper ce qu'il est en revenant dans sa ville, tentant de se refaire une identité en flirtant avec la jeune blonde. 

L'homosexualité se verra représenté aussi par Denis Hopper, homosexuel n'acceptant pas ce qu'il est et cherchant à tout prix à le cacher. Celui-ci refusant qu'on le regarde lorsqu'il veut faire l'amour, comme s'il refusait qu'on le voit pour ce qu'il est. Préferant aussi se camoufler dans le noir, éteignant les lumières autour de lui, pour qu'ainsi personne ne puisse vraiment voir qui il est vraiment. 

De cette incapacité à s'accepter résultera un comportement d'une grande aggresivité, cherchant à tout prix à montrer qu'il aime les femmes, quite à en faire trop. Ce qui ne l'empêchera pas de fréquenter un bordel gay. Hopper sera aussi le seul à déceler l'homosexualité du héros. Une phrase résonne encore " tu es comme moi", signifiant ainsi qu'il a vu ce qu'était le héros, qu'il ne peut lui cacher. 

Cette impossibilité d'acceptation aménera Hopper à vouloir la mort de tout le monde comme moyen de se faire oublier, de devenir autre. 

N'oublions pas le mari disparu de Dorothy que l'on croit kidnappé. Il en est autrement, celui semble plutôt accepter son statut car on le retrouve dans une petite salle avec son fils dans le bordel gay qu'Hopper fréquentera. Le père semblant plutôt avoir quitté sa femme, celle-ci semblant refuser son départ préférant pretexter un kidnapping. 

Conclusion :

Encore une fois, il serait facile de trouver encore d'autres symboliques mais je vous laisse seul maitre de votre interprétation. 

Pour tous les détracteurs de Lynch pour son style prétentieux, masturbateur ou autre, Blue Velvet est pour vous. Simple d'accés, ne cherchant pas à prendre la tête au spectateur mais avant tout à raconter une histoire, s'il est un film à voir de la filmographie de Lynch, c'est celui-ci.