C'est surprenant. Surprenant comme on peut se laisser convaincre, séduire par un beau minois. Après tout c'est une passion le jeu vidéo. Parfois on ne réfléchie pas à ce que l'on fait et on fonce tête baisser, par amour, par coup de foudre. Un coup de foudre c'est ce qui m'a frappé quand j'ai vu cette petite brune d'Alice pour la première fois en vidéo. Je la connaissais déjà. D'un dessin animé vu maintes fois dans mon enfance, blonde à l'époque, d'un jeu sortie il y a dix ans, brune cette fois, puis de retour dans un film très décevant. En fait j'avais déjà un passé chargé avec Alice. Pourtant c'est aujourd'hui que j'ai craqué pour de bon.

Tes beaux yeux verts m'hypnotisent...

Alice Madness Returns est donc la suite si j'ose dire d'American McGee's Alice, sortie en 2001. Le jeu est d'ailleurs pour l'occasion fournit avec le bébé de Spicy Horse en téléchargement pour ceux qui prendront la belle en neuf. Pour les autres, privez vous je vous en pris de cette première mouture qui a malheureusement toutes les rides profondes de la vieillesse avancée.

Ce second volet est en ce qui me concerne une réussite flamboyante, de ces jeux que je vais retenir et chérir fort, d'abord parce qu'ils sont grandioses, ensuite parce qu'ils ne sont pas forcément très bien aimés des rapaces du marketing.

"Forgetting pain is convenient. Remembering it, agonizing. But recovering the truth is worth the suffering..."

Alice Madness Returns n'est pas le plus grand jeu que l'on est jamais vu. Si je devais attaquer dans le vif, je commencerais par une qualité technique qui sans conteste laisse parfois à désirer. Si la belle Alice joui d'une modélisation soignée, de détails qui fourmillent avec notamment une chevelure noire animée de manière remarquable (regarder ses cheveux a été un bon passe temps régulier dans mon voyage) il faut bien admettre que des imperfections sont très visibles. Les textures manques souvent de définitions mais surtout soufrent d'un des effets Mass Effect les plus violents que j'ai pu voir (on reste loin de The Last Remnant certes) avec ses décors souvent lisse pendant quelques secondes, le temps que la machine puisse tout afficher. Parfois on sera bloqué dans la simple action de courir ou sauter par un mur (ou une marche?) invisible qui dès que l'on consentira à faire demi-tour et à revenir franchir aura disparu par la magie du glitch. Dans un autre ordre d'idée, il peut arriver que la caméra est un peu de mal à cadrer la magnificence du décors ou des combats en arène réduite.

Pourtant, malgré ces défauts qui entraveraient aisément un quelconque autre jeu d'action/plateforme, Alice atteint le Pays des Merveilles sans encombre, offrant à qui voudra l'acquérir l'un des plus beaux jeux de cette génération de console. La raison en est simple, il est artistiquement irréprochable! Il arrive que parcourant un jeu quelconque, on se pose quelques secondes pour admirer une zone particulièrement saisissante de beauté. Ici, Spicy Horse a produit un travail hallucinant, une vraie leçon de design qui émerveille sans aucune relâche du début à la fin.

Quel que soit le chapitre, on reste émerveillé par la beauté des environnements.

Les inspirations sont nombreuses (on trouvera même un hommage à Tim Schaffer), mais la plus évidente est celle du réalisateur de la dernière œuvre cinématographique en date sur le personnage de Lewis Caroll; mon extravagant réalisateur préféré Tim Burton. C'est toute cette poésie macabre que l'on trouve ici transposée avec maestria, toute cette inventivité visuelle et de ton qu'il n'a pas su trouver pour son adaptation. Alice Madness Returns, c'est le Tim Burton de Sleepy Hollow, de Sweeney Todd ou de The Nightmare Before Christmas qui ferait un jeu vidéo. C'est par exemple en chantonnant No Place Like London que j'ai débuté le second chapitre de Madness Returns, la ressemblance étant pour le coup frappante.

"You are young...life has been kind to you. You will learn..."

La variété est d'ailleurs au rendez-vous, mais jamais sans une cohérence avec l'histoire qui est contée. Cette histoire si prenante, pleine de suspense et de schizophrénie. Car pour sûr Alice Madness Returns est aussi à ce niveau là largement au dessus de ce que l'on rencontre habituellement dans un banale jeu de plateforme. Ne cherchant jamais à défaire réalité et invention, faits et rêves, le jeu distille son histoire au travers de cinématiques dans un style original en papier animé de divers effets, mais surtout au travers de souvenirs que l'on trouvera cachés ça et là dans des trous de serrures et qui nous éclaireront au fur et à mesure sur le passé trouble d'Alice Liddell (rien à voir avec la superette) à la manière des cassettes audio disséminées dans Rapture.

Assaisonner les groins avec le poivrier montre la voix souvent invisible vers de précieux souvenirs.

Le jeu rappelle aussi assez souvent Silent Hill dans son scénario, non pas pour son angoisse latente, mais pour sa propension à mêler une histoire personnelle à une mythologie qui dépasse le personnage. A vrai dire, on suit Alice à Londres dans une institution pour enfant dirigée par un psychiatre qui tente de lui faire oublier le traumatisme de l'incendie meurtrier qui a emporté sa sœur et ses parents dix années plus tôt. Le paradoxe étant qu'Alice cherche à comprendre les raisons de cet incendie, en prenant le chemin de son Pays des Merveilles autrefois si magnifique et désormais si torturé. La deuxième intrigue se situant dans la destruction progressive du Pays des Merveilles de manière mystérieuse...et les deux formant une histoire mature et poignante.

Pour achever ce tableau que j'espère le plus flatteur et juste possible, j'indiquerais également que le jeu ne se départie par d'une qualité musicale exemplaire. Les thèmes mélancoliques côtoient les cordes dissonantes et donnent au tout une qualité indéniable et une personnalité auditive forte. Les doublages sont par ailleurs très corrects bien que parfois un peu mou, mais toujours sauvé par une traduction sans faille et pleine de bon mots.

Comme les décors, la bande son sait se renouveler et garde une vraie cohérence avec l'esthétique.

Alors vous l'aurez compris, la forme est présente. Est-ce pour autant un bon jeu? Certainement, même si c'est sur le fond que le jeu n'est pas original. Les phases se divisent en deux grandes sections: la plateforme et les combats. La première repose sur un système de quadruple saut assez efficace et plaisant. Au lieu de simplement sauter, on peut ajouter un double saut, planer avec la robe puis sauter de nouveau pour prolonger le vol, qui sera parfois agrémenté de souffleuses verticales ou de longues descentes en glissade sur les fesses. L'exploration est également de mise car nombre de passages cachés (parfois un peu grossièrement malheureusement) donneront l'envie de sauter sur des plateformes invisibles. Les combats eux sont mines de rien un peu technique, chaque ennemi apportant son lot de paterns et de points faibles. Le couteau Vorpalin, la gatling poivrière (si si croyez-moi), la tête de cheval massue ou encore la théière mortier ne seront pas de trop contre certains ennemis particulièrement coriaces (surtout en mode cauchemardesque).

Ces théières peuvent être un peu coriaces, mais avec la bonne combinaison d'arme on en vient à bout.

Ces deux éléments de gameplay qui compose 80% du jeu sont parfois entrecoupés de petites pauses respirations avec d'autres gameplays: du shmup, de la plateforme 2D, du pachinco ou bien même du puzzle, bref un peu de tout pour ne pas lasser sur long terme, d'autant que le jeu bénéficie d'une durée de vie surprenante pour cette génération de console; comptez 15 à 20 heures en fonction de votre zèle à découvrir tous les secrets que renferme le jeu.

Je n'ai pas manqué d'apprécier les changements de gameplay qui apporte de bonnes pauses.

Voilà donc pourquoi je me suis épris d'Alice une fois pour toute. Alice est belle à pleurer. Pas techniquement non, mais artistiquement. C'est l'une des plus belle réussite de cette génération et ce avec une aisance, une cohérence avec le scénario et un respect de l'œuvre originale qui force l'admiration. Je ne manquais jamais de passer quelques secondes de temps à autre, à admirer chaque changement de robe de cette brune aux grands yeux verts merveilleux, à contempler le ciel où la Lune fumait une pipe créant par sa fumée une aurore boréale, à regarder l'architecture de chaque chapitre à chaque fois renouvelée avec talent, le tout bercé par une bande originale magique. Le jeu n'apportera pas de révolution en terme d'interaction pure, mais il est l'exemple du gameplay traditionnel sans défaut majeur et simplement plaisant qui est sublimé par l'enrobage en or, mature sans être gore pour être gore ou grave pour être grave. Un must-play...