Suite à quelques critiques ici-même à l'encontre d'Uncharted 3, j'ai décidé de prendre ma plume et mon clavier pour présenter mon point de vue sur une de mes séries favorites et détailler son évolution. On commence logiquement par le premier épisode.
Uncharted Drake's Fortune est apparu en 2007 comme la première exclusivité de la Playstation 3 à valoir le détour, à défaut de réellement justifier le prix de la console. On y trouvait un casting de personnages un brin caricaturaux mais très attachants, et un nombre certain de péripéties sur une île pleine de pirates.
Des personnages attachants
Une des forces de cet épisode est l'introduction impeccable des personnages principaux, à savoir Nathan Drake, Elena Fisher et Victor Sullivan. Dès la première scène, toutes les bases sont posées : Nathan est un chasseur de trésors chevronné, que l'illégalité, les pirates et les armes à feu n'effraient pas outre mesure. Il a d'excellentes connaissances historiques et linguistiques, et se réclame également d'une filiation avec le célèbre explorateur Sir Francis Drake. Il est de plus particulièrement enclin aux traits d'esprit et à l'ironie. Elena est quant à elle une journaliste ambitieuse, intrépide et maline. Elle n'a clairement pas l'expérience de Nathan Drake, mais ne se démonte pas pour autant devant le danger et semble particulièrement déterminée à réaliser son reportage. Enfin, Sully est le vieux brigand charmeur qui a été de toutes les aventures. Intéressé quasi uniquement par l'argent, les cigares et les femmes (possiblement dans cet ordre), il est prêt à tout pour éponger les dettes qu'il a contractées auprès de fréquentations peu recommandables. Sa loyauté envers Nathan semble cependant n'avoir d'égal que son goût pour l'humour grivois.
Des combats dynamiques
On rencontre en chemin une ribambelle de truands illustrant la face (plus) sombre de la chasse aux trésors, de l'implacable et très anglais Gabriel Roman au fourbe Atoq Navarro en passant par l'imbécile nerveux Eddie Raja. On croise surtout un tas de pirates en débardeur, armés jusqu'au dent et que l'on doit dézinguer sans se faire prier. La nécessité de profiter du décor pour se mettre à couvert s'impose rapidement, pour se protéger des tirs adverses et regagner de la vie, mais plusieurs éléments viennent s'assurer qu'on ne reste pas tranquillement planqué indéfiniment au même endroit. Tout d'abord, nombre de couvertures sont destructibles et s'effondreront après avoir essuyé quelques rafales, vous forçant à chercher promptement un nouvel abri. Le faible nombre de munitions vous oblige aussi à vous déplacer régulièrement pour récupérer celles laissées par les ennemis abattus ou disséminées dans les arènes, ce qui pousse également à utiliser les diverses armes à disposition. Enfin, les ennemis sont particulièrement mobiles et n'hésitent pas à vous prendre à revers ce qui impose de revoir fréquemment sa position dans les arènes. Notre panoplie d'options comprend aussi des coups au corps à corps, particulièrement efficaces pour achever les adversaires, mais à réserver pour le final puisqu'ils vous exposent considérablement aux tirs. Le jeu suggère également une composante infiltration, mais dans l'ensemble, il s'agit surtout d'observer avant d'agir, plutôt que de réellement éliminer la menace discrètement. Au final, on obtient donc des affrontements très dynamiques, qui demandent une bonne précision pour ne pas gâcher ses munitions, et une bonne tactique dans le placement pour gérer les vagues ennemies. Les différentes unités, du sniper au fusil à pompe en passant par la mitrailleuse fixe et le lance grenades permettent de pimenter cette recette réussie.
Un rythme captivant
Ces gunfights représentent la majeure partie du jeu qui se voit par ailleurs rythmé par des phases d'exploration (enfin, de balades et de plateforme assistée dans les niveaux linéaires) et plus rarement par des puzzles qui ne demandent pas une grande réflexion (spoiler : la réponse est dans le carnet). On a droit à deux séances en jet-ski, à une course poursuite en voiture ou l'on mitraille ses nos poursuivants et à une fuite lors d'un effondrement, qui sans être inoubliables, parviennent sans mal à tromper la routine. L'un dans l'autre, si les différents ingrédients de l'aventure sont bien disjoints (gunfight en arène, plateforme, puzzle, cutscene), le jeu peut se targuer d'un rythme maîtrisé, avec une aventure divisée en chapitres d'une demi heure environ. Ce découpage sans temps mort assure qu'il se passe toujours quelque chose, que notre intérêt est maintenu, que nous soyons toujours mû vers l'avant. Les cutscenes ne font ainsi jamais plus de quelques minutes et s'insèrent ainsi très naturellement dans le fil du jeu, sans le moindre chargement. Le remarquable doublage parachève leur qualité et participe grandement au charme du titre.
Regard critique
Après ce chapelet de descriptions mâtinées d'éloges, je relèverai tout de même quelques défauts ou déceptions. Tout d'abord au niveau de la maniabilité, qui n'est pas parfaite : la visée n'est pas très intuitive, le personnage glisse sur le sol et se plaque exagérément sur les parois. De plus, comme il s'agit d'un titre étendard de la PS3, le jeu s'essaye laborieusement à l'intégration des fonctionnalités Sixaxis avec des mini-jeux d'équilibre dispensables et un lancer de grenades inutilement complexe. Les combats comportent aussi leur lot de problèmes, avec ces ennemis qui semblent prendre bien trop de balles par rapport à leurs tenues légères, une impression qui n'est pas aidée par la détection délicate des headshots. Certaines arènes abusent aussi un peu trop des vagues d'ennemis, en n'hésitant notamment pas à les faire spawner de là où vous venez, ce qui ne manque jamais d'étonner. Le dernier segment de l'aventure introduit également des monstres surnaturels qui obligent à "déjouer" en rendant inadéquats tous les réflexes et stratégies acquis précédemment, puisque les couvertures et la précision deviennent inutiles. Si l'on chipote un peu, on peut relever que la cohérence des environnements de l'île, entre jungle et ruines, s'avère être à double tranchant, avec une certaine monotonie qui peut s'installer et une prédominance des tons verts, oranges et marrons. On peut aussi déplorer le dénouement un peu trop dirigiste qui va jusqu'à faire appel à des QTE.
En définitive, on se laisse facilement emporter et charmer par cet ersatz d'Indiana Jones moderne, qui aurait troqué son fouet contre un AK47 mais aurait conservé l'exotisme, les trésors, le surnaturel et les nazis. Les personnages partent certes d'archétypes connus, et la valse des trois ennemis nuit un peu à leur développement (j'aurais voulu voir plus de Gabriel Roman qui est un peu éclipsé par l'irruption surprise de Navarro sur le devant de la scène), mais les dialogues permettent tout de même d'insuffler une identité appréciable dans le cast principal. On n'en ressort pas nécessairement renversé, mais il n'y a pas à rougir non plus. Les personnages sont bien campés, ont des motivations intelligibles et cohérentes, et le mix de références historiques, d'action, d'humour et d'émotion remplit tout à fait son contrat, ce qui est d'autant plus remarquable quand on compare avec le reste de la production. Ceci dit, Uncharted Drake's Fortune le fait avec un tel naturel que cette réussite n'est pas toujours immédiatement évidente. Pour l'anecdote, j'avais loué le jeu peu après avoir acheté ma console, et je l'ai retourné après l'avoir bien plié en un week-end. J'avais passé un très bon moment, mais rien ne m'intimait pour autant de l'ajouter définitivement à ma collection. J'ai depuis réparé cette erreur pour pouvoir en profiter à loisir, en le platinant au passage, et même si la maniabilité et la technique ont pris un coup de vieux depuis, il reste un divertissement tout à fait honnête.