Note du 12 Mars 2012 : Je remonte cet article aujourd'hui pour célébrer les dix ans de la première diffusion de The Shield sur FX. L'occasion pour ceux qui en ont la chance de découvrir cette série majeure et pour les autres de ce replonger dans l'univers unique du chef d'oeuvre de Shawn Ryan.

 Avant propos : J'ai beaucoup hésité avant d'écrire cet article. Non pas à cause de son intérêt, j'avais vraiment envie de parler de cette série qui s'est imposée comme ma favorite EVER. J'avais juste un doute sur la façon dont j'allais le construire, j'ai donc décidé de cacher les Spoils majeurs tout en faisant une deuxième version de mes phrases pour ceux n'ayant pas vu le show. Ce ne fut pas toujours facile mais je ne voulais pas  donner que mon point de vue sur la série, je voulais aussi et avant tout vous donner envie de la découvrir. Attention quand même aux traces de Spoils, mais vous pouvez être certains qu'ils ne sont pas majeurs. C'est dit.

 

 The Shield : Chroniques de la rue

 

The Shield c'est avant tout ses personnages, sa Strike Team et Vic Mackey. Mais c'est aussi une chronique réaliste et percutante de la rue. Celles de Los Angeles plus précisément, avec ses immigrés, ses dealers, sa violence, sa Police et ses politiciens. Tout au long de la série, Shawn Ryan (le créateur) apportera un point de vue assez pessimiste sur l'avenir de ces rues gangrenées par le crime. C'est aussi pour cela qu'à part quelques exceptions comme Claudette, aucun personnage n'est totalement blanc. The Shield c'est un peu le The Wire de L.A.

 

Dans ce cadre où le danger règne en permanance, la série dépeint la vie d'un commissariat, le barn alias le bercail, qui est peuplé de flics plus ou moins pourris. Malgré tout, tous tentent à leur manière d'apporter un peu de sécurité aux habitants honnêtes du quartier fictif de Farmington. Même Vic mais nous y reviendront plus tard. Ces personnages ont tous à un moment ou à un autre leur heure de gloire. Ils sont souvent passionnants même dans leur intérêt secondaire. On pourrait émettre une critique en disant qu'à partir de la saison 3, la série se referme sur elle- même pour laisser toute la place à la Strike Team et à Claudette et Dutch, mais dans les deux premières saisons, tous les personnages sont mis sur un pied d'égalité. Prenons Julian Lowe qui fut pendant ces deux saisons mon personnage préferé. Flic très croyant et débutant, il a le "malheur" d'être né homosexuel. Evidemment, dans le milieu très macho de la Police tout cela est très mal vu. Julian va donc tout mettre en oeuvre pour brider ses instincts et reprendre "le droit chemin". Malheureusement, il fait partie des têtes qui tombent à partir de la troisième année et à part quelques apparitions de sa femme qui le remettent sur le devant de la scène, sa storyline personnelle s'arrête net et on ne saura pas vraiment ce qu'il deviendra malgré une image assez émouvante dans l'épisode final qui laisse comprendre que tout en lui n'a pas changé. Julian est souvent émouvant, torturé et en contradiction avec lui-même ce qui en fait un personnage passionnant à plus d'un titre. Son Instructeur au début de la série, Danny Sofer, est elle un peu moins intéressante bien que, dans les deux dernières saisons,  grâce à l'enfant qu'elle a de Vic elle tient une place primordiale dans les relations de Vic avec sa famille.

 

En dehors de la Strike Team, certains personnages arrivent malgré tout à sortir du lot, Claudette et Dutch par exemple. Duo très attachant et lui aussi uni par des liens très fort, ils seront importants dans la chasse au Vic. Claudette est le seul personnage qui restera droit dans ses bottes de bout en bout mais qui, comme tout ceux qui voudront se mettre en travers du chemin de Mackey, sera écrasé. L'histoire de ce couple platonique se termine tristement mais Claudette reste une des figure magnifique de la série. Aceveda aussi est assez complexe. En dehors du fait que le visage de Bennito Martinez m'inspire une infinie sympathie, le personnage évolue pas mal au cours de la série. D'abord Capitaine honnête, ses ambitions politiques le pousseront un peu hors du droit chemin jusqu'à être un des éléments majeurs des évènements de la saison 5 et de la mort de Lem avec Kavanaugh. Finalement, c'est sa fin qui sera la plus décevante, même si son Happy Ending est le seul à noter dans les dernières minutes de la série.

 

Au rang des personnages secondaires, nombre de figures ont traversé le Bercail et/ou le destin de la Strike Team. Tavon, David, Anthon, Armadillo etc. On pourrait en citer bon nombre comme cela et tous ont apporté quelque chose à l'intrigue mais surtout, ils ont tous plus ou moins oeuvré à la chute de la Strike Team. Car The Shield c'est l'histoire d'une chute, d'une descente aux enfers, un numéro d'équilibriste sur une lame de rasoir. C'est ce qui fait la dramaturgie unique de la série.

 

La Strike Team : Unis envers et contre tous.

 

Malgré une qualité indéniable des personnages secondaires, The Shield place au centre de toute l'histoire le destin d'une équipe : La Strike Team. Il y aurait beaucoup de choses à dire sur ces amis incroyablement soudés. Il y a un Âge d'Or de la Strike Team qui s'étend sur les deux premières saisons. Une époque où Vic et ses potes faisaient la loi à leur façon, en instaurant un respect et une crainte chez les criminels. Mais une des qualités majeures de la série est son aspect feuilletonnant. Je suis dans l'ensemble assez critique envers les séries comme Dexter qui développent une histoire pendant une saison avec un début, un milieu et une fin et qui passe  totalement à autre chose l'année d'après. The Shield est, sur ce point, un sommet de feuilleton. On peut largement considérer l'oeuvre comme un tout, comme aussi une sorte de film de 88 fois 45 minutes. Dès la saison 3, la Strike Team sombre peu à peu, accumulant les erreurs mais toujours sauvée par son leader paternaliste Vic. Rien même la dispute après que Lem ait brûler l'argent volé des Arméniens ne peut séparer Lem, Ronnie, Shane et Vic. La scission dans le groupe commencera à se faire avec la terrible fin de la saison 5 et la mort de Lem assassiné par Shane. A partir de cet instant, la Strike Team ne sera plus la même, elle ne sera plus jamais réunie comme au temps de sa splendeur. Nous, spectateurs, constatons ce fait avec nostalgie et amertume. Pas Vic, qui a une capacité étonnante à aller de l'avant et à ne jamais se laisser déborder par sa conscience, tout en entrainant ses compagnons. Car Vic est une ombre planante et pesante sur cette équipe. Pourtant, même si Lem est la caution morale du groupe, aucun des membres n'osera jamais aller contre le leader. Toute cette terrible chute est à mettre sur le compte de Vic jusqu'à, encore une fois, la saison 5 où Shane va prendre son ampleur et mettre Vic devant ses actes jusqu'à la fin. Je reviendrai sur Shane et sa relation fraternelle et conflictuelle avec Vic dans le dernier paragraphe. La série n'hésite pas à montrer l'injustice qui régie parfois le monde et qui nous fait parfois haïr Vic. Quelle souffrance de voir pendant 2 saisons Lem se faire détruire peu à peu par Kavanaugh interprété magistralement par Forest Whitaker qui prendra le moyen détourné de la Strike Team pour atteindre Vic. C'est de sa faute ! Tout est de sa faute ! Et à part Shane, personne n'osera le dire. Le problème c'est que Shane a été elevé à la sauce Mackey et, c'est bien connu, on fait toujours mieux (ou pire) que soit. Cette théorie se confirme encore dans The Shield.

 

La Strike Team est donc une équipe fascinante, de part la fidélité qui unie ses membres, mais elle est aussi incroyablement desservie par le charisme animal de Mackey qui, petit à petit, tournera plus du côté voyou que du côté flic

 

Vic/Shane : Frères ennemis 

 

Attention ce chapitre comporte quelques spoilers

 

C'est à mes yeux la partie la plus passionnante de la série: la relation entre Vic et Shane. Shane qui est d'ailleurs à mes yeux le personnage le plus fascinant de la série et un des tout meilleurs de l'histoire des séries. Saluons quand même le travail de Walton Goggins et de Michael Chiklis (mais plus celui de Goggins quand même) qui ont donné à leur rôle l'ampleur qu'ils méritaient. Finalement, ce duo est le centre de la série. C'est de lui que viendra tous les problèmes. Car Shane est un peu le petit frère de Vic. Il l'adore, il l'admire et il lui a tout appris et cela se ressent pendant quasiment 4 saisons. La Strike Team est née grâce à eux. Mais l'ombre de Mackey est trop pesante et le petit veut voler de ses propres ailes. Seulement une chose sépare Shane de son mentor : les émotions. Shane est un émotif, il ressent les choses et est imprévisible. C'est pour cela que ses conneries sont plus grosses et surtout plus difficilement réparables que celles de Vic. Vic met ses sentiments de côté et fera preuve d'un cynisme incroyable du début à la fin. Dès que Shane tuera Lem etcoupera donc définitivement le lien avec Vic et la Strike Team, il se rapprochera du mauvais côté. Shane est rempli de regrets et de remords, pas Vic et c'est ce qui fait que celui-ci lui est supérieur. La Strike Team était indispensable à Shane car elle lui permettait de canaliser ses émotions et à bien choisir les bonnes et les mauvaises actions. Ses valeurs sont les mêmes que celles de Vic, il tentera donc de prendre les mêmes routes que lui mais sa tête, ses émotions, ses sentiments lui feront toujours perdre pied. Toutes les conneries que Vandrel fera, Vic les découvrira. Il lui pardonne d'ailleurs toujours jusqu'à la goutte d'eau ou la goutte de sangqui va mener Shane à partir pour offrir une saison 7  de cavaleextraordinaire. Par moments, Shane voudra retrouver l'appui de Vic, trouver son pardon, mais la rupture est consommée. Les deux frères finiront ennemis et c'est encore une fois Mackey qui signera l'arrêt de mort et la fin de l'histoire de Shane. Car même loin de lui, ses proches subissent toujours ses actions.

 

Pendant la saison 6 et 7, l'hyperémotivité de Shane va mettre sa famille et ses amis en danger  à cause de sa relation avec Diro Khezakien, puis de sa trahison, puis en révelant que la Strike Team a voler le Train de l'Argent puis en retrahisant le camps adverse. Heureusement Vic est là pour sauver les meubles. Vandrel sombre totalement quand il apprend qu'il a tué Lem pour rien, car le remords le ronge  beaucoup trop alors que Vic aurait pensé que tout est arrivé "parce qu'il le fallait" comme pour le meurtre de Terry Crowley. Le destin se met donc en route pour lui et même si par moment sa famille lui apportera un peu de bonheur, rien ne pourra empêcher l'issue fatale que cette erreure a signée. le coup de grâce pour Shane se joue probablement dans le dernier épisode, bien que dès sa fuite il ait renoncé à jamais à la tranquilité, lors de cette scène incroyable d'une discussion téléphonique entre Shane et Vic. C'est encore lui qui influera le plus sur le destin d'un des ses (anciens) proches, mais cette fois il aura du mal à enfouir cela dans sa conscience. 

 

Shane est donc un gaffeur malgré tout toujours soutenu par Vic. Mais en allant trop loin et en se mettant Vic à dos, il devra s'assumer, ce qui est trop dur pour lui et son émotivité. Shane et Vic sont donc deux frères ennemis qui auront vécu une relation fascinante et bouleversante.

 

Conclusion : Une odysée tragique unique

 

The Shield c'est donc l'histoire d'une famille unie que le hasard va séparer, c'est aussi la peinture d'un homme froid et constamment aux frontières de la morale qui ne peut s'empêcher de gâcher les vies de ceux qu'il aime. The Shield c'est une galerie de personnages passionnants, inoubliables. C'est un puzzle implacable, un piège qui se referme petit à petit, une tragédie bouleversante qui se finit de la plus belle des façons. Car soyons clairs, le final de la série est un des plus extraordinaires qu'il m'ait été donné de voir. Et je suis un fan absolu de Six Feet Under ! L'image finale d'un homme brisé est ambigue, chacun se faisant sa propre idée de la suite. Je voudrais vous dire ce que j'en pense mais ça serait malhonnête pour vous. Shawn Ryan a donc crée une oeuvre magistrale, une peinture violente d'un monde sans pitié, d'une cohérence sans faille, qui reste dans le coeur comme un voyage terrible mais unique.

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Je vous laisse avec le générique de l'épisode finale qu'il ne faut pas regarder avant d'avoir vu la série, c'est un nid à spoils ! J'espère vous avoir donné envie de voir la série avec cet article qui fut ardu à écrire.