Far Cry. Une saga qui est désormais l’une des plus célèbres du jeu vidéo. Six épisodes principaux accompagnés pour la plupart d’entre eux de jeux annexes ou spin-off - à ma connaissance seul le 2 est un jeu servi sans accompagnement. Les différentes ‘versions’ du 1, Blood Dragon pour le 3, New Dawn pour le 5, les nombreuses extensions pour le 6 qui verra à n’en point douter lui aussi s’adjoindre un spin-off d’ici peu… Et Primal pour le 4, qui est donc l’objet de ce qui nous intéresse présentement. Dès le concept on comprend qu’on aura affaire ici à un opus à part : pas d’armes à feu, pas de véhicules, pas de jumelles…
Car en effet, nous voilà ici en plein âge farouche, armé seulement de notre coutelas et de notre insatiable envie de découvertes, qu'elles soient environnementales ou humaines. Mais notre héros aura également un puissant atout dans sa poche, et pas des moindres : il a en effet le pouvoir de contrôler les bêtes féroces qui peuplent cette époque. Une capacité qui lui sera fort utile face aux nombreux dangers qui le guette, et notamment les clans rivaux qui tentent eux aussi d’accroître leurs territoires…
- Éditeur : Ubisoft
- Développeur : Ubisoft Montréal
- Distributeur : Ubisoft
- Année de sortie : 2016
- Joué sur PS4
- Article composé de 2328 mots
IL ÉTAIT UNE FOIS OROS
Nous voilà donc dans la peau de Takkar, un Wenja en quête du reste de son peuple dispersé. Suite à une chasse au mammouth avec quelques compagnons et surtout de la déroute qui s’en suivit, il se retrouve sur les Terres d’Oros, où l’on dit que les Wenjas auraient été aperçus. Comme début de preuve il fait la rencontre de Sayla, également Wenja et accessoirement collectionneuse d’oreilles Udam, un peuple sauvage des environs qui traquent les semblables de notre protagoniste comme des animaux. Et pour cause, ces néanderthaliens sont de fait cannibales, ce qui se pose là en terme de menace convenez-en. Mais ils ne sont pas la seule peuplade dont il faut se méfier dans les environs, car les cruels Izalis sont tout aussi dangereux avec leur culte du feu qui les voient brûler vifs tous ceux qui s’opposent à leur soif d’extension.
Les Terres d'Oros seront votre immaculé terrain de jeu
Et comme si tout cela ne suffisait pas, la faune locale se révèle particulièrement coriace et affamée. Entre les loups, les lions, les ours… et les smilodons (!), que de gentils animaux qui n’hésiteront pas une seconde à vous dévorer tout cru !
Et c’est pourtant dans ce contexte difficile que Takkar et Sayla se décident à bâtir un village Wenja, en partant de rien. Petit à petit, bout de bois après bout de bois, pierre après pierre et surtout de wenjas sauvés en wenjas rassemblés, le frêle campement laisse place à un hameau agréable.
Mais qui attire sur lui l’attention des deux autres peuples belliqueux…
On rencontre pas mal de Wenjas solitaires sur notre route... à nous d'en faire une communauté soudée
Alors. Globalement oui on retrouve le principe de la jouabilité classique des Far Cry : sur une carte à découvrir et emplie de danger, vous devez réaliser des missions pour vos alliés, capturer des camps adverses (avec ici une petite nuance entre les villages et les bûchers d'alertes) et tuer les noooombreuses choses qui vous attaquent en permanence. Le tout à la première personne comme dans tout FPS qui se respecte.
Toute la particularité de Primal vient donc de l’époque de l’action. Pas d’uzi, de 4X4 ou de deltaplane en ces temps reculés, même si une (grosse) entorse est faite en ce qui concerne le grappin, bien présent. En ce qui concerne les armes, on retrouve bien l’arc, mais évidemment de type artisanal, avec toutefois plusieurs modèles (court, long, double) néanmoins il est parmi un arsenal digne de l’âge de pierre : sagaie, gourdin, fronde, couteaux de lancer… et bombes diverses (bon OK, là on dépasse de loin la suspension de crédibilité). Chacune est améliorable grâce aux nombreuses ressources à récolter au cours de vos pérégrinations en terre sauvage (bois, fleurs, peaux de bêtes etc…), de quoi se constituer un bel attirail pour massacrer ce que bon vous semble.
La roue des armes qui fait montre du matériel de notre héros des temps anciens. Rigolo de noter qu'elles sont toutes des armes de lancer, y compris le gourdin (en seconde fonction). La sagaie s'utilise aussi bien en corps-à-corps qu'en arme de jet (efficace !)
Possibilité également de remplir sa besace de plusieurs mets qui octroieront durant un petit laps de temps des capacités améliorées (en discrétion, course, résistance) et bien sûr sauront vous apporter soins aux moments opportuns (c'est-à-dire souvent, très souvent !)
Ajoutez à cela de (très) nombreux collectibles à amasser - trop à mon gout - qui finiront de vous occuper entre deux chasses à la belette.
L'IMPITOYABLE LOI DE L'ÉVOLUTION
L’autre grande particularité de Primal, c’est la notion de village à faire prospérer. Soit en accumulant des PNJ lambda soit des individus plus marqués, qui eux apporteront leur savoir-faire à la fois au bourg et à Takkar. Pour les citoyens anonymes, ils sont récupérables grâce aux nombreux événements aléatoires qui se déclencheront lors de vos balades en forêt ou ceux déjà prédéfinis et visibles en oranges sur la carte d’Oros. Il s’agit de mission de sauvetage la plupart du temps mais il peut être question également d'une zone à défendre ou d’une escorte de wenjas en goguette. Il se peut même que certaines d’entres elles soient de l’exploration de grottes inexplorées.
Le village s'agrandit au fil des rencontres et des améliorations des huttes. Les habitations des 'personnalités' peuvent effectivement se voir renforcer, à condition d'avoir collecter au préalable les ressources idoines...
Pour ce qui est du recrutement de ce que je vais nommer les ‘personnalités’, il s’agit en fait de toutes les quêtes annexes proposées dans Primal, même si quelques-unes se révéleront indispensables. Signalisées par des pastilles jaunes il s’agit d’épreuves plus ardues que la moyenne qui permettront à notre héros d’évoluer dans son apprentissage pour devenir un fier guerrier. Notez que chaque personnalité apporte un arbre de compétences lié à sa spécialité.
Takkar notre survivant est présenté ici en compagnie de ses compagnons que je vous présente de suite : Sayla la cueilleuse, Tensay le chaman, Jayma la chasseuse, Karoosh le combattant, Wogah l'ingénieux, Dah l'Udam et Roshani l'Izila. Tous apportent de précieuses compétences à l'évolution du village et de notre héros.
À cette illustration ci-dessus, il faut ajouter Urki, parodie du célèbre Hurk (rôle secondaire dans pas mal d’épisodes de Far Cry) et qui est ici un véritable abruti qui n’apporte rien en soi en dehors d’une touche d’humour bienvenu dans ce monde de brutes.
Urki à une drôle de particularité, à l'instar de Kenny dans South Park : il meurt à la fin de chacune de ses missions.
Parlons maintenant du meilleur aspect du jeu selon moi : les animaux apprivoisables.
Quelle merveilleuse idée que les développeurs ont eue là !
La ‘capture’ est simple : une fois débusqué un animal que vous pouvez soumettre, il suffit de lui lancer un appât puis de se rapprocher doucement de lui en maintenant carré. Auparavant il faudra avoir terminé une mission pour Tensay le sorcier car c’est de lui que vous viendront les améliorations permettant de capturer de plus gros familier (car non tous ne sont pas attrapables dès le départ, loin de là). En vérité le plus difficile sera de croiser les animaux dits « rares », disons une version plus ‘majestueuse’ que leur équivalent standard. Pour ce faire il faudra user de patience et de la vue ‘chasseur’ dans les lieux de passage connus de votre objectif jusqu’à tomber sur une trainée de fumée jaune indiquant la présence d’une de ces bestioles pas facile à croiser.
Ce gros matou nous obéit au doigt et à l'œil, mais il nous causa bien du souci avant cela...
Il existe également quatre chasses spéciales, très difficiles, qui vous opposeront à des « animaux-boss » (la dernière ligne dans la capture d’écran du tableau des bêtes ci-dessous). Il vous faudra plus d’une vie pour en venir à bout mais celle de ces « super-animaux » elle ne se rétablira pas à chacun de vos trépas. Et fort heureusement car sinon ce serait un cauchemar. Si vous êtes attentifs vous aurez capté que je parle de quatre chasses mais que le tableau ne présente que trois animaux sur sa dernière ligne, c’est que la quatrième concerne un mammouth, animal non-apprivoisable (une véritable lutte de longue haleine pour venir à bout de cet affrontement dantesque).
Voici donc notre bestiaire que je m'empresse de vous expliquer. Déjà, l'Ours ultime est ici actuellement décédé, mais pas de panique il suffit de le réanimer en usant de fleurs rouges (en mode difficile il me semble que chaque animal perdu l'est définitivement, à vous d'en apprivoiser un nouveau. Seul les trois du bas restent constamment accessibles). Ensuite chaque ligne descendante représente des animaux plus forts que la ligne précédente. C'est-à-dire qu'un animal de la deuxième ligne vous protégera des attaques des animaux semblables de la première, mais pas de la troisième (j'espère être clair...). Exception faite de la belette qui elle fait fuir toute la faune alentour à cause de sa folie sauvageonne.
Transition parfaite pour expliquer que bien que non-apprivoisable, il est tout de même possible de monter les ancêtres des éléphants (oui je sais ce n’est pas vraiment leurs ancêtres), avec une subtilité toutefois, cet exploit ne sera possible que sur les jeunes pachydermes (on les distingue des plus âgés avec l’habitude). Je précise au passage que les Dents-de-Sabre et les Ours apprivoisés sont également chevauchables. Il est possible de charger et d’attaquer quand on contrôle l’une de ces bêtes, tout en gardant également la possibilité de se servir de ses armes. C’est une certaine gymnastique à adopter mais c’est vraiment fun à jouer, bien qu’un peu brouillon.
Créature d'une autre époque aujourd'hui simple souvenir...
Dernière bête à votre disposition et sans doute celle la plus utile, la chouette. Elle vous servira d’éclaireuse pour mieux appréhender camps et bûchers à conquérir en marquant les ennemis avec des icônes correspondant à leur statut (berserks, vigies, empoisonneurs…). Oui il s’agit d’une autre entorse à l’immersion mais c’est un code récurrent de la série et cela ne choquera pas plus que cela les joueurs connaissant le principe. Les améliorations du volatile sont plutôt chouettes (Ha Ha Ha quel comique je fais !) avec possibilité de tuer une cible en chargeant (attaque à recharger pour éviter de tuer tous les ennemis avec le piaf sans aucun effort du joueur) ou bien de largage de différents types de bombes. Là encore c’est complètement farfelu mais hein bon, on n’est pas ici pour faire un cours scientifique sur la préhistoire…
Le volatile nyctalope survole les alentours afin de mieux appréhender les dangers. À droite les bombes disponibles au largage (comment cela pas réaliste ?! Elles livrent bien le courrier ces bestioles, pourquoi pas des obus ?)
SI PEU DE CHOSE ET POURTANT
Malgré toutes ces concessions à la vraisemblance, il se dégage quelque chose de fort de ce Far Cry Primal. Comme la sensation de (re)découvrir l’histoire de nos ancêtres et de nos origines, avant l’apparition des téléphones portables et des voitures électriques. Et de se dire que l’Humanité en est réellement passée par là un jour, il y a environ 10 000 ans (à quelques jours près). À vivre de peu, à chasser des bêtes féroces pour survivre, à cueillir des baies pour manger, à peindre des grottes ou sculpter des pierres pour seules distractions artistiques sans oublier d'explorer un monde alors totalement inconnu. Une aventure qui nous fait relativiser sur l’époque que l’on vit, finalement plus qu’agréable (je n’ai jamais fait de promenade en vélo en craignant de me faire dévorer par un ours par exemple). Parce que oui, quoi qu’on en dise, quoi qu’on raconte et quoi qu’on tente de faire croire de nos jours, on en est passé par là. Et c’est parfois bien de s’en souvenir.
Une petite fille qui en a vu de belles dans sa pourtant courte existence. Quelle aurait été notre vie si nous avions vécu à cette difficile époque ? Avait-elle au moins une NES pour passer le temps ?
J’aimerai revenir en quelques lignes sur les trois peuples présents dans le jeu, à savoir les Wenjas, les Udams et les Izilas. Les Wenjas représentent le peuple médian entre les Udam néanderthaliens en voie de disparition car ayant été incapables d’évoluer et de renoncer à leur culture grégaire tandis que les Izilas, malgré leur terrible croyance représentent de fait les premiers bâtisseurs (les « Pierres qui s’élèvent »). De plus la scène cachée post-générique entretient une ambigüité bien amenée qui permet de conclure que finalement c’est bien la rencontre entre ces trois cultures qui permettra à « la société » de grandir et de prospérer (le mot « société » étant un peu trop fort au vu du contexte j’en conviens), se devant de garder le meilleur et de rejeter le pire de chacune des peuplades pour avancer et perdurer. L’air de rien il y a un message plutôt bien amené dans Primal, sous ses airs sauvages et brutaux…
KOLAPULA WATARE GUGNA ! KAPAWARE WENJA !
On terminera ce tour d’horizon des terres d’Oros en évoquant quelques défauts du titre, assez mineurs mais parfois irritants. Le plus probant - et constant dans la franchise - reste le fait d’être constamment attaqué de tout coté, par des Udams, des Izilas, des loups, des aigles, des élans, des mammouths, des smilodons, des ours j’en passe et des meilleurs ! Vraiment au bout d’un moment ça finit par rendre dingue de ne pas pouvoir faire trente mètres sans se faire agresser, on se croirait à la Gare du Nord...
L’autre problème vient des quelques erreurs de programmation du grappin qui m’ont parfois bloqué dans le décor, me forçant à me téléporter au camp le plus proche. Pas bien grave mais ça ne m’a pas fait plaisir…
Je tiens à évoquer aussi le fait que j'ai tout fait dans le jeu à l'exception de la collecte des divers objets, comme l'indique le tableau ci-dessus. Relevez je vous prie le fait que les collectibles représentent 50% de l'aventure globale ! De mon point de vue c'est beaucoup trop et j'inclus donc cela dans ma liste de griefs envers ce Far Cry.
Autre info, j'ai mis 28h50 pour en venir à bout, sachant que l'épopée possède un gros ventre mou quand il s'agit d'améliorer tout son matériel.
Sinon je me dois me relever le fait que la carte de ce Primal est basée sur la carte du 4 grandement remaniée. Beaucoup s’en offusquèrent à l’époque, ce qui ne fut pas mon cas. Notez bien que les lieux ne sont pas semblables (Oros n’est pas du tout situé au même endroit que Kyrat).
En tant que spin-off du 4, je ne vois pas en quoi le fait qu'ils aient réutilisé comme base la carte du jeu principal soit un scandale...
Pour information, il existe trois niveaux bonus nous mettant dans la peau d’un mammouth que je n’ai malheureusement pas pu faire à grand regret (-> DLC). Et pour conclure il est important de préciser l’énorme travail linguistique réalisé sur ce jeu, avec la création d’un langage évidemment pas véridique mais à tout le moins réaliste se basant sur les travaux et la collaboration de spécialistes des proto-dialectes. Chapeau !
J'aurai bien aimé testé ces fameux niveaux dans la peau d'un mammouth mais bon, tant pis. Pardonnez le flou de ce cliché, il se trouve que le héros à quatre pattes de cette aventure est légèrement myope...