Tout aura commencé par un petit gars du nom d’Abe libérant tout son peuple suite à une Odyssée suivi d’un Exode (rien que çà). Vint ensuite un certain Munch, bien moins connu et que je n’ai personnellement pas fréquenté - cela viendra peut-être un jour. Tout cela venait d’une société de développement avec un concept particulier: créer des jeux se déroulant exclusivement sur un autre monde du nom d’Oddworld. Oddworld Inhabitants qu’ils s’appelaient. Et s’appellent toujours d’ailleurs. Pour leur quatrième jeu, ils s’éloignaient grandement de l’ambiance instauré dans leur précédent titre pour s’orienter vers le ‘Western Glubuts’ (c’est comme des spaghettis, mais de l’espace). Et c’est ainsi que nous faisions connaissance avec l’Étranger. Originellement sorti en 2005 sur Xbox, il connu une version dites HD en 2011 qui rehaussa les graphismes. C’est sur cette dernière que j’effectuai ma partie.

IL ÉTAIT UNE FOIS DANS L’OUEST D’UNE GALAXIE LOINTAINE, TRÈS LOINTAINE

Chasseur de primes redoutable, celui connu uniquement sous le sobriquet de l’Étranger enchaîne les contrats les uns après les autres. C’est que L’individu en question à un grand besoin d’argent au vu d’une obscure opération promise par un docteur pas très net. Alors de hors-la-loi violents à vauriens absolus, notre taiseux héros pourchasse ses cibles sans relâche. Et c’est donc à nous de l’y aider.

L'Étranger est un chasseur de primes efficace et redouté

Malgré le fait que l’action se déroule sur une autre planète, on retrouve l’ambiance Far-West de notre bonne vieille Terre. Mais peuplé d’extraterrestres. On n’est alors pas vraiment dépaysé et la beauté des décors ne fait que renforcer l’immersion dans ce monde pourtant distant. Nous aurons droit à tous les poncifs du genre ou presque - la mine, le canyon… - dans une succession de niveaux qui se suivent avec un rythme très agréable. C’est là la grande force du titre: son atmosphère. À la fois lancinante et pleine d’action. Une conjugaison de plaisir ludique avec ses séquences pétaradantes et ses décors bucoliques où l’on se surprend à flâner.

Les environnements invitent à la contemplation. C'est Beau!

Au-delà de l’environnement qui subjugue, nous avons aussi les personnages qui sont réussis. Qu’ils s’agissent des premiers, seconds, ou troisièmes rôles, tous sont cohérents et crédibles. Et charismatique. Chaque fugitif, même si on ne l’aperçoit que le temps d’un combat, possède un caractère et une ‘dégaine’ unique qui le rends consistant, palpable. Après en ce qui concerne les villageois ou les nombreux sbires, on est plus dans le protagoniste générique de seconde zone mais même là on ressent un travail d’orfèvre dans la conception. Et la cerise sur le gâteau, c’est la qualité des voix qui finit d’asseoir la crédibilité de l’ensemble (uniquement en anglais sous-titré français…la plupart du temps).

Quand il arrive en ville, tout le monde change de trottoir...

Question level-design c’est là aussi une belle leçon. Malgré le coté très ‘couloirisé’, on à quand même l’impression d’une grande liberté d’exploration. En fait le jeu est construit en ‘rosace’: un noyau central assez large (une ville, une grande clairière avec sa rivière) duquel part tout un tas de niveaux linéaires qui conduisent à un boss. Une fois celui-ci vaincu, on ne fait pas marche arrière mais on emprunte un autre couloir qui ramènera au nœud central, pour la suite de l’aventure. Cela amène une appréciable fluidité et surtout ne nous fait jamais faire d’aller-retour dans les mêmes décors. C’est un vrai plaisir à parcourir.

Petit schéma du level-Design de La Fureur de L'Étranger: le centre plus foncé des rosaces représentent les noyaux centraux, dans lesquels l'exploration est libre. Chaque ligne signifie un couloir avec à la pointe un boss. Puis retour au noyau par l'autre ligne, 'l'autre couloir'.
Précision c'est un dessin approximatif pour faire saisir l'idée de la construction des niveaux, le nombre de pointe des rosaces ne représentent pas le nombre effectif des fugitifs du jeu...

MORT OU VIF

Passons maintenant au cœur du gameplay. Car il y a à dire… Tout d’abord vous devrez prendre possession d’une prime au bureau des…primes (logique). L’intendant derrière son bureau vous indiquera alors quel chemin emprunter pour dégoter le malfrat en question (passer par la grand-route/prenez le tunnel/demandez au passeur/descendre par les égouts etc…) et vous voilà parti. Mais tout d’abord possibilité de passer à la boutique pour faire le plein de bestio…munitions (j’y reviens !) ou d’améliorations de tenues (capacités de charge, protections, jumelles…). Une fois paré, en route pour la castagne. L’Étranger s’avance donc dans une nouvelle zone où très vite il va tomber sur toute une ribambelle de lascars - du menu fretin - qui tenteront d’empêcher sa progression. Parfois le parcours au sein du niveau sera parsemé de quelques péripéties comme un passage en wagonnet ou bien ponctué de portails métalliques à ouvrir par quelques habiletés.

Toutes les missions débuteront au bureau des primes

Après moult affrontements on parvient dans la zone du fugitif. Là encore chaque boss aura sa petite particularité qu’il faudra découvrir pour mieux l’appréhender, mais après quelques essais on comprend la méthode, le ‘pattern’ à effectuer pour en venir rapidement à bout. Une fois le malandrin à terre, la suite du ‘couloir’ s’ouvre et nous ramène plus ou moins prestement à la zone centrale où nous allons toucher notre prime et récupérer le contrat suivant. Puis rebelote…

Petite explication des barres de vies. La barre verte-orangée c'est la 'vie' classique telle qu'on l'entend dans le jeu vidéo. La barre bleue, c'est la barre d'énergie. Vide, le personnage est sonné pour un moment. Idéal pour le capturer. Le système est le même pour notre perso, à l'exception que la barre bleue permet de restaurer la barre verte (il se martelle le torse tel un gorille pour se revigorer). Les armes ne produisent pas les mêmes effets et sont plus ou moins létales en fonction de leur puissance et du statut de la cible. À vous de privilégiez une approche ou une autre...

Ça, c’est pour le cadre global. Passons maintenant aux spécificités. Tout d’abord la vue. Il est possible à tout moment de basculer de la vue à la 1ère personne à la vue à la 3ème. Dans les faits la caméra subjective sera centrée pour les phases de tir et la caméra éloignée pour les phases d’exploration et de plate-forme. Notez bien que le jeu malgré ses deux vues distinctes est principalement un FPS, ce qui veut dire que vous n’aurez pas accès à son arme quand vous êtes en vue externe. Cependant avec ce point de vue extérieur notre gars possède des attaques de mêlée qui peuvent s’avérer très efficaces dans certaines situations. Sachez également que la maniabilité est exemplaire dans les deux jouabilités. Dans tous les cas notre héros réagit au quart de tour, sans le moindre souci. Une belle performance. Et ses animations sont top, ce qui rajoute à la prouesse.

Le chasseur de primes à un certain 'avantage': il est sa propre monture. Vous connaissez le principe du fusil de Tchekhov?
Plus bas, en médaillon: Doué de tout les talents, l'Étranger excelle aussi bien dans les fusillades que dans l'exploration. Et plus encore...

Ensuite un point très important (qui pour moi est crucial et devrait-être présent dans tout jeu vidéo moderne): vous pouvez capturer ou tuer tous les antagonistes. Et je dis bien tous (excepté le boss final, mais c’est un cas à part). Donc soit vous buter tout ce qui bouge soit vous la jouer un peu plus finement. Ou un mix des deux. Mais là ou le concept est poussé encore un peu plus loin c’est que chaque ennemi vaincu rapporte un peu de sou…sachant que les captures rapportent plus que les cadavres. Y compris pour les boss, avec parfois des primes qui passent du simple au double en fonction de l’état du susdit fugitif. À chaque affrontement contre l’un de ces chefs se pose alors un choix et surtout deux techniques différentes à dégoter. Bon, celle qui consiste à le dégommer n’est pas dure à comprendre. Mais celle qui consiste à le mettre à terre suffisamment longtemps pour s’approcher de lui et le capturer dans le ‘bracelet-ceinture-prison’ demande parfois un peu de jugeote. Heureusement nous sommes aidés dans cette tâche par tout un panel de munitions pas piqué des hannetons…

Pas forcément évident à percevoir sur une photo mais la capture s'effectue via un bracelet qui aspire la proi.. la victim.. la fripouille un peu à la manière du piège à fantômes des Ghostbusters.

LES BIENFAITS DE LA NATURE

L’Étranger n’est pas très friand des technologies de son monde. Son arme de prédilection est une arbalète qu’il recharge non pas avec des carreaux mais avec…des animaux. De toutes petites bestioles qu’il collecte dans la nature et qui chacune on leur fonction que le chasseur de primes usitera à bon escient. Petit tour en revue de la faune locale:

Le Putois: Sert de ‘lacrymo’ et permet de déstabiliser la cible suffisamment longtemps pour la capturer en sureté. Son évolution le transforme en ‘mini Trou Noir’, attirant tous les adversaires avoisinants vers lui…bien pratique pour rameuter plusieurs ennemis sur un point unique.

L’Araignée: Permet de ficeler les vauriens de bas étage (ne marche pas sur les gros durs). Son évolution emprisonne plusieurs cibles si proches les unes des autres.

L’écureuil: Une grande Gueule. Attire à lui la crapule la plus proche. Pratique pour ‘casser’ un groupe d’ennemis et faire défiler une par une nos futures cibles.

L'arbalète peut accueillir deux types de munitions à la fois, ce qui permet d'élaborer quelques stratégies plus ou moins vicelardes... La gachette gauche contrôle le projectile de gauche, et si vous avez bien suivi, la gachette droite le projectile de droite. Les munitions sont interchangeables via un menu rapide à tout instant.

Le Zap: un insecte électrique et l’arme de base de notre héros. Tir infini avec une capacité de charge infligeant plus de dégâts et peu servir aussi de ‘déclencheur’ sur certains appareils. (à droite sur la photo au-dessus)

Le Fuzzle: Petite boule de poils vorace qui dévore le pauvre hère qui en reçoit une. Avec une seule il peut s’en sortir mais avec 4 ou 5 il finira en casse-croûte. La créature faisait sa première apparition dans Munch’s Odyssee apparemment…

La Mouche: version oddworld. Donc assez maousse. Servent de fait comme ‘gros projectile’ qui peuvent assommer à peu près n’importe qui en en coup. En deux tirs la cible passe à trépas dans la plupart des cas. À utiliser avec modération donc si vous souhaiter capturer tout les sacripants du jeu.

La Chauve-souris: Big Boum Badaboum. Explose à l’impact. Gros dégâts par conséquent. La version upgradé cible même ses proies. Là encore si vous comptez faire le jeu en ‘Pacifiste’, munitions peu recommandé. Utile toutefois contre les tourelles et autres canons.

Les Abeilles: La mitraille. Peu utilisé pour ma part car assez peu efficace. Mais à l’avantage de toujours toucher un ennemi car ciblage automatique de base.

 

La Guêpe: Munitions assez limité à usage exclusif du mode sniper. Tue en un coup au but à 99%. Se révèle utile dans certaine situation compliqué. Mais là encore en cas de mode ‘No Kill’ on fera l’impasse.

 

LIBRE COMME UNE RIVIÈRE

L’aventure est composée de 8 chapitres, divisée en deux par sa moitié suite à un retournement de situation qui redéfinit tout les objectifs du personnage principal. Cette révélation que je ne connaissais absolument pas malgré les quelques années du titre remets à plat tout le concept du jeu tel qu’il est établi dans les 4 premiers segments et redistribue toutes les cartes.

Le fameux docteur qui contre une somme assez coquette vous promet l'opération qui changera votre vie...

Afin de conserver la surprise aux futurs joueurs je ne dévoilerai rien mais je dirai simplement que le chasseur de primes évolue vers un rôle plus messianique et libérateur (tiens tiens cela me rappelle quelque chose) avec une résolution finale pleine de sens et de poésie. Un message écologique qui fonctionne à merveille, avec suffisamment d’amertume et de mélancolie pour renforcer l’impact du message.

La carte de la région dans laquelle se déroule le jeu. On se rends compte au fur et à mesure de l’importance du cours d’eau dans le scénario...

La fin laisse la possibilité d’une suite mais l’aventure peut également se clôturer ainsi, avec cette forme de désespérance en suspens. Aucune idée si le studio voulait faire une séquelle, mais aujourd’hui cela tient de l’improbable. 4 jeux sur L’Oddworld existent, 2 on connu des ‘remasters HD’ (Stranger et Munch) et 2 des ‘Remakes’ (les Abe). La suite logique serait donc de poursuivre l’exploration de cette étrange planète à la fois si proche et si lointaine…mais à l’instant T c’est sans doute tirer des plans sur la comète que d’espérer tout cela… Mais rien ne nous empêche de rêver.

Reviendrons nous un jour sur Oddworld? Et qui succèdera à Abe, Munch et l'Étranger?

~€~

C’est rare mais quand vient le moment du bilan de La Fureur de L’Étranger, il n’y a que du positif à en retirer. Pas un seul défaut à relever sur ce titre, à quelque niveau que ce soit. Pour moi c’est donc un Jeu Parfait que nous propose Oddworld Inhabitants. Le seul petit Hic eu lieu sur le double-boss de fin qui m’a fait voir rouge, mais cela reste amplement dans les clous de l’acceptable.
Beau, prenant, charismatique, un brin de mystère et d’évasion, message profond, ambiance western crépusculaire, intelligence dans la conception, gameplay aux petits oignons sans anicroche, originalité dans l’approche, univers fascinant, personnages attachants…Non vraiment, je n’ai rien à reprocher à ce jeu vidéo.
J’aurai pris le temps pour m’y mettre mais vraiment quelle réussite totale que cette aventure. Immense coup de cœur et gros conseil pour ceux qui ne connaîtraient pas, vous n’aurez aucun regret !