Synopsis: Chez Lumon Industries, un programme est utilisé pour séparer les souvenirs non professionnels et les souvenirs professionnels des employés. Ils ont volontairement subi une dissociation (severance), une puce à cet effet ayant été introduite dans leur cerveau. Cependant cela n'est pas aussi pratique et simple que ça en a l'air. Mark Scout est le chef d'une équipe composée de Dylan George, Irving Bailiff et de la nouvelle venue, Helly R. Leur mystérieux travail au service du raffinement des macrodonnées, consiste à repérer des chiffres sur un écran d'ordinateur et à les jeter à la poubelle, sous l'autorité de la directrice de Lumon, Harmony Cobel et de Seth Milchick qui est le superviseur du sous-sol des dissociés et qui agit comme une sorte de surveillant en chef. 

Créateur: Dan Erickson

Distribution:
Adam Scott : Mark Scout
John Turturro : Irving
Britt Lower : Helly R
Zack Cherry : Dylan
Patricia Arquette : Harmony Cobel
Christopher Walken : Burt
Tramell Tillman : Seth Milchick
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Dès les premières annonces je fus très intrigué par cette série. Ses visuels très épurés et son concept un peu nébuleux surent attiser ma curiosité et c’était donc avec impatience que j’attendais de la découvrir. Diffusée à partir du 18 février sur Apple TV+, elle est composée de neuf épisodes pour cette première saison que je dévorai très vite.

On y suit les mésaventures de Mark et de ses collègues du département des Raffinements des Macrodonnées au sein de la société Lumon. Tout cela pourrait paraître que de très banal si l’entreprise n’était pas d’une bizarrerie sans nom, cultivant le culte du secret à son paroxysme et surtout qui semble ne rien produire de concret. Ha ! Et il ne faut pas oublier le concept au cœur du show qu’est celui de la ‘Dissociation’. Un procédé qui consiste via l’aide d’une puce implantée à la base du cervelas à dissocier sa vie personnelle de sa vie professionnelle.
Concrètement cela signifie que le Mark de la société Lumon ne connaît pas le Mark qui sort les poubelles de chez lui tous les matins. Il s’agit de deux entités distinctes, avec chacune leur quotidien et leur expérience. On différencie les deux personnalités en les qualifiant « d’Inter » (la part de l’esprit qui jamais ne sort de l’entreprise) et « d’Exter », celle qui à sa vie en dehors des locaux de la boîte. Et le plus fou dans tout cela, c’est que Mark - ainsi que l’ensemble de ses collègues - furent volontaires pour subir la dissociation !

Et c’est au travers du personnage d’Helly R, la petite nouvelle que nous découvrirons la vie au sein de cette société à nulle autre pareille. Une femme qui entrera en rébellion contre son état et cherchera par tous les moyens à s’échapper de cet enfer. Quitte à entrer en conflit avec elle-même (ou plutôt son « exter ») et causer des soucis au reste de son équipe. C’est sur ce postulat que commence ‘Severance’, avant qu’on apprenne à connaître d’autres tenants et aboutissants et d’avoir un tableau général qui poussera Mark à lui aussi partir à la recherche de la vérité sur l’entreprise qui l’emploie.

Métaphore évidente du monde de l’entreprise moderne et de la déshumanisation de ses employés, Severance pousse le concept le plus loin possible en faisant de ses petites mains du quotidien des travailleurs n’ayant même plus conscience du bienfondé de leur travail. Un travail absurde qui ne rime à rien, avec des récompenses tout aussi ubuesque, des protocoles tirant à la dictature évidente et le sentiment profond de n’être qu’un pion remplaçable dans une mécanique bien huilée qui nous dépasse de loin. Je pense que chaque employé du système actuel pourra se reconnaître dans cette satire pas si surréaliste que cela, malgré son ton volontairement saugrenu.

Derrière ce projet confidentiel qui n’a pas eu l’honneur d’une campagne de publicité pharaonique comme peuvent en concevoir Disney+ ou Netflix se cache tout de même quelques (très) grands noms du milieu du cinéma. À commencer par Ben Stiller qui sera producteur associé et réalisera pas moins de six épisodes sur les neufs à ce jour. On retrouve le talent du comédien pour mettre en scène des univers farfelus mais crédibles qui savent happer le spectateur. Devant la caméra on retrouvera excusez du peu Patricia Arquette, John Turturro et l’immense Christopher Walken, tous trois dans des rôles secondaires voire tertiaires mais qui mettent en avant leur brio et leur savoir-faire. C’est en tout cas un vrai plaisir que de les voir dans ce show sans prétention financière.

Cependant le héros de Severance se nomme Adam Scott, un acteur que je découvre ici et qui ressemble sous certain angle à ce bon vieux Tom Cruise (à mon humble avis). Pour l’accompagner il sera en binôme avec Britt Lower, la fameuse nouvelle recrue qui mettra le boxon dans son quotidien bien pépère. Pour compléter la fine équipe, John Turturro donc ainsi que Zack Cherry, un comédien qui traîne ses guêtres ici et là à Hollywood (on l’a vu notamment dans des petits rôles chez Marvel). Ce quatuor sera au centre des péripéties que nous suivrons dans cette série.

Je précise que nous ne connaîtrons que la vie personnelle de Mark et nullement celles de ses collègues, que nous n’apprendrons donc à connaître qu’au travers de leur « inter » au sein de la société. Mark lui à une petite vie de banlieusard tranquille, avec sa voisine un peu trop curieuse, une sœur enceinte jusqu’au cou et un beau-frère complètement illuminé écrivant des bouquins de bien-être personnel digne d’un gourou.
Et au milieu de tout cela, l’apparition d’un drôle de type qui affirmera être son meilleur ami, alors que pourtant il lui est totalement inconnu. Un certain Peter qui semble au bout du rouleau et qui le lui assure, a réussi à annuler les effets de la dissociation…

Severance est ce qu’on appelle une série ‘concept’, c'est-à-dire qu’à partir d’un concept inédit de base (ici la dissociation) elle part sur des pistes de réflexion au travers de ces différents personnages et ses situations qui poussent l’idée toujours un peu plus loin. Toutefois, malgré sa réalisation tirée à quatre épingles et la qualité de ses interprètes je peux aisément comprendre qu’on ne soit pas subjugué par la proposition de Ben Stiller et ses amis. De nature lente, sans la moindre parcelle d’action, un humour froid (voir glacial), une atmosphère volontairement terne et peu enjouée (avec certaines séquences vraiment siphonnées à relever quand même) et cultivant les mystères et les non-dits, le show ne plaira de toute évidence pas à ceux en quête d’action et de dépaysement. Par contre si les thrillers psychologiques, les enquêtes mi-absurdes mi-glauques et l’ambivalence des personnages sont plus votre truc, n’hésitez pas à jeter un coup d’œil à cette série peu mise en avant. Vous ne le regretterez pas !
À date mon œuvre majeure de 2022, assurément.

L'Avis d'Amidon, le chat de la maison:


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