Synopsis: Jérôme Kerviel intègre la Société Générale en 2000 où il travaille tout d'abord au service du "suivi de marché". Rapidement, il intègre la mythique salle des marchés. Il devient alors l'assistant du desk de Fabien Keller, qui fait de lui un trader et lui apprend la spéculation boursière et la dissimulation de ses profits. Kerviel va se prendre au jeu et risquer chaque jour un peu plus, sans jamais inquiéter ses supérieurs. 

Réalisateur: Christophe Barratier

Date de Sortie: 2016

Distribution:
Arthur Dupont : Jérôme Kerviel
François-Xavier Demaison : Fabien Keller
Sabrina Ouazani : Sofia
Thomas Coumans : Mathieu Priester
Tewfik Jallab : Samir
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Ce que l’on appelle « L’Affaire Kerviel » défraya la chronique en janvier 2008 lorsque la Société Générale se rendit compte de l’énorme perte financière qui l’accablait. Je ne vais pas jouer les analystes d’opérette, le monde de la finance est pour moi une nébuleuse absolue qui ne m’intéresse en rien et je serai bien incapable de vous dire les tenants et les aboutissants de cette histoire.

Mais c’est justement là qu’intervient le film de Christophe Barratier - qui est passé à la postérité pour son film « Les Choristes » - qui rend compréhensible tout ce micmac qui poussa le jeune Trader dans cet infernal engrenage (« L’Engrenage » étant le titre du livre-témoignage de Kerviel). Le réalisateur et son scénariste Laurent Turner firent tout leur possible pour rendre leur histoire la plus pédagogique possible, effort qui en valut la peine car bien qu’on ne saisisse pas les tréfonds de ce métier obscur (dans tous les sens du terme) on parvient à saisir le plus important et les quelques ‘tours de passe-passe’ nécessaires qui permirent à cette étrange entourloupe de voir le jour. De ses débuts ‘modestes’ jusqu’à son éclatement.

Modeste signifiant 2.5 millions d’€uros… et l’éclatement 50 Milliards (!). Soit presque deux fois les fonds propres de la Société Générale à l’époque (1,7 fois pour être pointileux). La perte imputée à Jérôme Kerviel sera elle du montant devenu célèbre de 4,9 milliards d’€uros.

Attention toutefois, j’insiste sur le fait que le scénario et la mise en scène taille pas mal dans le vif pour aboutir à un métrage compréhensible par tous. La véritable histoire étant bien entendu plus alambiquée et plus tortueuse, comme le prouve entre autre la page wikipédia consacrée à cette affaire (et qui décrit des choses totalement absentes du film). Les puristes y verront un sacrilège mais le Grand Public - peu au fait de cet univers - prendra le récit comme il est, et c’est très bien ainsi.
Précisons enfin que bien que le héros soit Jérôme Kerviel et que par conséquent une certaine empathie se crée à son égard, ses mauvais actes ne sont pas occultés, loin de là. Le film se veut assez neutre sur le bonhomme, montrant ses bons et ses mauvais aspects. Et surtout cette soif insatiable de ‘toujours faire plus’, jusqu’à l’absurde et l’incompréhensible.

Mais justement, parlons-en de ce personnage. C’est Arthur Dupont qui prête ses traits au célèbre ex-trader, un acteur totalement inconnu pour ma part mais qui avec son regard bleu profond et sa bouille de gendre idéal un peu naïf parvient à nous alpaguer dans son récit. Alors certes quand on connaît le visage du vrai Kerviel, plus carré et plus marqué, il faut un petit temps d’adaptation mais très vite on n’y pense plus. Il joue à merveille le petit gars un peu perdu - ou qui fait semblant de l’être - qui petit à petit se fait sa part du Lion. L’agneau qui devient loup.

Dans le rôle du mentor et du pédagogue (à la fois pour notre héros et pour nous public), un François-Xavier Demaison dans ses petits souliers. S’il y a bien un film dans lequel cet acteur à toute sa place, c’est bien celui-là. Ancien avocat fiscaliste ayant assisté de visu à l’effondrement des Tours du World Trade Center en 2001, il connaît les rouages de ce monde de fous. Ici il joue un type à la fois détestable mais fidèle en amitié, aux valeurs morales ambigües et pleines de contrastes. Sa séquence devant la télévision lors des Attentats de Londres où il se remémore le 11 Septembre, l’homme et le personnage fusionnent pour un rare moment de pure vérité sur grand écran. La scène-cœur du film.

On retrouve également au casting le très doué Thomas Coumans qui joue l’ami de Jérôme bossant au service du contrôle et qui on donc une relation parfois assez tendue, Sabrina Ouazani en ‘Love Interest’ avec du caractère et Sören Prévost, fils de son père, dans la peau d’un chef de service au caractère versatile.
Mais celui qui pour moi bouffe l’écran à chacune de ses apparitions, c’est Tewfik Jallab dans le rôle de Samir, un homme d’affaires avec qui Kerviel entretient de très bonnes relations (et l’un des rares à être au courant de ses magouilles). Cet acteur à ce qu’on appelle un charisme animal dans chacune de ses scènes. Vraiment impressionnant.


Photo de tournage

Il faut bien que je l’admette, alors que le cinéma français n’a pas mes faveurs, « L’Outsider » est un bon film qui revisite la tragique histoire de Jérôme Kerviel et de son incroyable ‘arnaque’ (appelez cela comme vous voulez). Barratier parvient par un véritable coup de force à humaniser cet univers et à le rendre palpable pour le commun des mortels, pour qui tout cela reste un mystère insondable et surtout un repère de requins attirés non pas par l’odeur du sang mais celle de l’argent.
Seul regret, qu’il n’y ait pas un caméo de Jérôme Kerviel en personne au cours du film. Mais bon, cela aurait été sans doute pousser le bouchon un peu trop loin (et peut-être aussi ne le voulait-il pas, tout simplement…)

L'Avis d'Amidon, le chat de la maison:



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