Il est assez rare que j'achète des jeux en 'dématérialisé', il faut vraiment que ceux-ci m’intéressent beaucoup pour que je franchisse le pas de ce mode de consommation que j’abhorre. Bref ce n'est pas le sujet, Sea Of Solitude est sorti et je tenais vraiment à y jouer depuis sa présentation à l'E3 2018. C'est désormais chose faite. Alors, moussaillon, quand est-il de cette petite balade en mer?

 
 
 
QUE D'EAU ! QUE D'EAU !!
 
Dès la première seconde nous sommes plongé dans cet univers aquatique. On ne sait pas ce qu'on fait là, l’héroïne non plus. Elle se réveille dans une petite barque en bois au milieu d'un océan tumultueux. Un gigantesque 'poisson-baleine-monstre-serpent' géant vous tourne autour. Une lumière au loin...qui amène à votre première rencontre, une fillette en imperméable jaune bien trop enjouée par rapport à l'environnement. Première discussion d'une longue série. Elle vous emmène un peu plus loin et l'on découvre alors toute la beauté artistique du titre. Une ville immergée sera le décor à cette aventure, et il faut bien avouer que cela à de l'allure!
 
 
Le style graphique fait très BD aquarelle à l'ordi (pour ceux qui connaissent, je trouve que cela ressemble beaucoup à 'Lou!', les rondeurs en moins). Du moins quand 'tout va bien', car l'atmosphère et la météo varie beaucoup au cours de notre avancée. De la tempête à l'océan 'toxique', l'environnement est appelé à souvent se modifier, parfois d'une seconde à l'autre, ce qui déstabilise pas mal. Vous êtes sur un toit, il fait beau temps et l'océan est calme, vous pénétrez en un saut dans la Gare et Hop! Ciel chargé et mer déchainée. Tout cela est dû évidemment à l'onirisme et le caractère très 'psychologique' des lieux.
 
 
De la fillette va découler quelques autres rencontres, dont une luciole qui servira principalement à vous indiquer le chemin, ce qui complètera vos fusées éclairantes, aussi là pour vous indiquer vos prochains objectifs. Car le jeu possède sa trame de laquelle vous ne pouvez déviez. C'est comme çà. Une zone après l'autre, une péripétie appelant la suivante. Et donc de rencontre en rencontre on avance...
 
 
LE MONSTRE EN CHACUN DE NOUS
 
Ses fameuses rencontres se font surtout avec les 'monstres', pas forcément mauvais, tous aux graphismes captivants. Chacun d'entre eux représentent soit un proche soit une facette de Kay, notre petite mademoiselle noire d'encre. Dans ce périple psychologique, elle devra faire face aux ressentiments de tous, les découvrir, les comprendre, les surpasser ou les accepter. Tout cela de manière symbolique. Cela se traduit généralement par des boules de lumières qu'il faudra libérer de la noirceur qui les retiennent prisonnières, ou bien atteindre ces mêmes sphère lumineuses après un parcours d'obstacle très simple. En fonction de la situation morale et sociale du monstre, il y aura aussi un décor et des 'ennemis' adaptés. Par exemple une école et ses conflits avec les autres élèves ou alors un immeuble d'affaire à gravir, ce qui amène un peu de variété dans les situations à traverser.
Mais le monstre le plus présent reste ce fameux poisson géant qui vous avalera tout cru si vous tardez trop lors des phases de nage en zone de tempête. Au début, vous le redoutez comme la peste mais assez rapidement vous comprenez comment il fonctionne et dès lors plus jamais il ne vous croque. Vous croiserez aussi pas mal la 'sorcière à la coquille', qui rappelle dans son design une des Femmes Titans du fameux manga. Je l'aime bien elle, elle m'a fait marrer avec son cynisme et son humour noir.
 
 
Sea Of Solitude n'est absolument pas un jeu difficile. Je l'ai fini en 3H40 en deux sessions sur la même journée (contre 3H20 pour Brothers...). C'est une virée reposante dans la psyché tourmentée d'une jeune femme déprimée. Cela peut paraître un peu rude de dire cela comme çà mais c'est exactement ainsi que je l'ai ressenti...mais je vais aborder cela dans le prochain paragraphe.
 
 
DÉPRESSION AU NIVEAU DE LA MER
 
Moi, j'ai du mal avec la dépression. J'ai eu des 'dépressifs' parmi mes proches et j'ai vu ses 'ravages'. Je ne considère toutefois pas cela comme une maladie mais plutôt comme un 'sentiment'. Un état d'esprit. Comme être heureux, ou triste, ou amoureux. Quand on est amoureux on est pas 'malade'. Aucun médicament au monde ne vous empêchera de tomber amoureux et aucun n'ont plus ne vous 'soignera' de la dépression, jamais. La pilule du Bonheur n'existe pas. Je digresse mais cela me permets de revenir sur mon sentiment vis-çà-vis de ce qui est décrit dans le récit de cette 'Mer de Solitude'.
 
 
Cornella Gepper, qui as conçu le jeu, y a mis ses expériences personnelles (sans doute un peu 'romancées' comme on dit) et au vu de son vécu, je suis resté un peu perplexe. Je veux dire ce qu'elle décrit dans le jeu n'a en soit rien de 'dramatique' - Un jeune frère chamaillé à l'école sans qu'elle y prête attention, des parents qui ne s'aiment plus, un ex-copain devenu loup solitaire. Tout cela reste malheureux bien sûr mais pas de quoi sombrer dans la noirceur de l'âme. Il s'agit de coups durs de la vie certes mais franchement en ce qui me concerne cela ne m'émeut mais alors pas du tout. J'ai connu des événements personnels bien plus terribles que cela...alors parcourir un récit où une femme sombre dans la dépression pour ces quelques faits mineurs, ça ne m'a sincèrement pas captivé.
Je sais bien que nous ne sommes pas tous égaux face aux aléas de l'existence et que chacun à sa propre expérience, son propre ressenti et son propre vécu mais là sincèrement on est au niveau du 'Je suis Tristesse pour pas grand-chose'. Si il s'agit là des grands malheurs de sa vie, je l'échange contre la mienne quand elle le veut!
Ou alors elle n'a pas mis ce qu'elle voulait vraiment y mettre?! Ou bien c'est moi qui n'est mais alors rien pané à la métaphore du jeu!? Le bateau vert et bleu signifie t-il quelque chose? L'île finale aussi? Sa famille a t-elle disparue en mer? Là il y aurait alors un tout autre sens au titre mais c'est moi qui interprète, je n'en ai aucune idée.

 
Autre petit point qui me chagrine, mais pas tant que cela: la surface de jeu est en fait assez restreinte. Il s'agit en fait du même quartier que vous allez parcourir sous des climats et des ambiances différentes. On n'y fait pas gaffe au début car le jeu est suffisamment malin pour nous faire tourner en bourrique mais on finit par le remarquer. Rien de bien méchant cependant. Puis il y a aussi quelques environnements bien distinct de ce 'quartier central'.
 
 
Beaucoup critiquent sa maniabilité un peu hasardeuse...j'ai eu droit à mes quelques coins de murs bloquants et des animations de personnages saccadés mais en terme de 'Gameplay' pur je n'ai pas eu de véritable gros soucis. Kay est maniable, un peu légère dans ses déplacements certes mais pas de quoi s'indigner non plus. La conduite du bateau est aussi un peu déroutante à prendre en main, mais au bout de quelques minutes on s'y fait et il n'y a de toute façons aucune utilité à le diriger avec précision.

CONCLUSION:
 
D'un point de vue artistique c'est sublime. D'un point de vue technique, c'est très bien au vu du niveau de la production dites 'indépendante' (EA à donné un 'léger coup de pouce' financier). Je n'ai rien à redire de ce point de vue là, je n'ai eu aucun problème...(ah si! Le son qui a 'grésillé' à cinq ou six reprises! Aucune idée si cela vient du jeu en lui-même, de ma 'copie' ou de ma console -mais cela ne me le fait pas ailleurs...). Mais d'un point de vue 'scénaristique'...ça tombe à l'eau (HA!HA!). Je n'ai pas été touché par cette description fantasmagorique de la dépression. Je m’attendais à quelque chose de tellement plus sombre, de tellement plus profond, de tellement plus doux-amer. Et c'est finalement très gentillet, j'irai pas jusqu'à dire de 'Bisounours' mais pas si loin quand même. Si le monde entier n'avait que ce genre de problème là à régler, on vivrait au Paradis!
Il est peut-être là le message caché du jeu...