Bon, avant d'aller plus loin, laissez-moi vous prévenir que l'article qui suit risque de vous déprimer. Vraiment.

Donc n'allez pas plus loin si vous voulez rester de bonne humeur pour la journée.

...

Bon, les endurcis sont restés alors allons-y.

Imaginez. Vous êtes Américains et avez perdu votre boulot. Vous avez été expulsé de votre maison. Toutes vos économies ont disparu. Pourriez vous survivre avec 1000$ par mois ?

C'est le défi que vous propose Spent, un jeu que j'ai découvert ce week-end et qui a commencé à faire parler de lui. Alors, êtes-vous prêt à relever le défi ?

Pour la plupart d'entre nous, la pauvreté est quelque chose qui n'arrive qu'aux autres. Nous autres gamers avons des emplois relativement confortables, sommes véhiculés plus ou moins correctement, profitons d'une bonne couverture sociale (merci la France) et pouvons payer nos factures dans les temps. Nous vivons tranquillement en nous disant que si nous perdons notre emploi, nous nous débrouillerions d'une manière ou d'une autre et que nous retomberions sur nos pattes.

Mais, et si cela se passait mal ? Et si vous vous retrouviez sans foyer ni emploi, à lutter pour survivre, non seulement pour vous mais aussi pour votre enfant, le tout avec seulement 1000$. Y parviendriez-vous ?

En fait, c'est beaucoup plus difficile qu'il n'y paraît.

Ce jeu dont je vais vous parler, Spent, a été conçu par un certain McKinney pour une organisation caritative de Caroline Du Nord, l'Urban Ministries of Durham. Il s'agit d'un jeu flash qui s'appuie essentiellement sur du texte et plonge le joueur au coeur d'une situation désespérée.

Et je ne plaisante pas sur le mot, désespéré est bien le terme.

Alors que le joueur commence une partie, il reçoit 1000$ et se voit demander de trouver un lieu où habiter ainsi qu'un emploi pour payer les factures. Le joueur doit alors choisir entre habiter près de son boulot (et ainsi économiser sur l'essence) ou bien loin à la campagne (et économiser sur le montant du loyer). A vrai dire, la voiture est bien le seul luxe accordé au joueur - et même cela peut vous être retiré...

Trois types d'emploi sont ensuite proposés : serveur, manutentionnaire et assistant de bureau. Ce dernier, a priori le plus confortable des trois, demande la réussite d'un test de dactylographie - que j'ai raté lors de ma première partie hélas. Au lieu de cela, j'ai choisi le boulot de manutentionnaire.

Avec une rentrée d'environ 1200$ par mois et un loyer de seulement 780$, j'espérais bien pouvoir m'en sortir. Mais hélas, la vie n'est pas aussi simple.

Choisirai-je une couverture maladie complète mais très chère, ou bien préfèrerai-je compter sur la chance de rester en bonne santé ? Alors que les notes de mon gosse commencent à chuter, est-ce que j'accepte de lui payer des cours de rattrapage ou est-ce que je le laisse se débrouiller seul ? Tandis que le moment arrive du prochain contrôle technique de ma voiture, est-ce que je paie ou bien est-ce que je prends le risque de l'amende ? Alors que mon chien tombe malade, est-ce que je paie 200$ de frais de vétérinaire, ou bien 50$ pour le faire piquer, ou encore est-ce que je le laisse souffrir ?

Alors que les jours du mois passent, votre ventre se noue de plus en plus. Ce n'est pas un jeu que vous pouvez gagner. En tout cas, pas sans d'énormes sacrifices.

Ou bien vous pouvez vous tourner vers vos amis.

Spent inclue en effet un lien Facebook, permettant aux joueurs de demander de l'aide à leurs amis. Vous pouvez ainsi leur demander de garder des affaires pour vous, d'aider votre enfant à étudier, ce genre de chose. En fait, le jeu essaie de vous communiquer la sensation mêlée de honte et d'humilité qu'il y a à demander de l'aide à autrui.

Personnellement, je me suis montré trop fier et n'ai demandé l'aide de personne, pour finalement terminer le mois avec seulement 600$ - alors que le loyer restait encore à payer.

Argh.

Ce jeu m'a terriblement déprimé. J'ai connu une situation similaire par le passé et devoir choisir entre payer l'électricité ou des soins ne m'est aps inconnu, par exemple. C'est le genre de chose qui vous prend aux tripes quand cela vous arrive et qui vous marque définitivement.

C'est là que vous vous dites que des millions de personnes sont dans cette situation, que cela soit aux Etats-Unis ou en France. Des millions.

L'objectif de Spent n'est pas de vous pousser dans une malsaine spirale d'optimisation économique : son but est de vous faire non seulement découvrir l'existence de cette précarité, mais aussi à quel point il peut être difficile de demander de l'aide quand vous vous retrouvez dans une telle situation.

Peut-être (et je dis bien peut-être) que le fait de savoir à quel point cette situation est difficile à vivre en incitera quelques uns à plus de générosité. Pour d'autres, ce ne sera qu'un cinglant rappel d'une situation dans laquelle on ne souhaite plus jamais retomber