Hostile est leur milieu naturel, et sauvage est leur instinct. Forêts, cavernes, déserts... Ils peuplent jusqu'à nos contrées les plus reculées, luttant, bataillant chaque jour pour assurer leur survie, et assouvir leurs convoitises de chair et de sang humain. Peut-être les avez-vous déjà croisés, auquel cas, il est probable que vous l'ayez regretté car, mieux vaut s'en tenir éloignés. Qu'ils soient de bons sprinteurs, de fieffés trompeurs, ou encore de terrifiants chasseurs, bien des espèces ont été recensées ces trente dernières années et, avec elles, autant de comportements et de modes de vie divers et variés dont vous vous apprêtez maintenant à faire l'étonnante découverte, si ce n'est la sinistre redécouverte.

 

Car, plus que des créatures, et bien plus encore que des monstres. Ce sont... des prédateurs.

Les prédateurs du J-RPG.



L'Empoisonneur
Espèce courante que l'on assimile souvent au moustique, au frelon, ou encore au serpent, l'Empoisonneur peut également s'apparenter à la flore environnante. Rarement habile, et doté d'une constitution particulièrement vulnérable, il ne survit qu'en sécrétant et véhiculant de dangereuses toxines, mais rarement létales pour peu que ses victimes aient été un minimum prévoyantes, et se soient procuré au préalable quelque sérum adéquat. La particularité du venin qu'il inocule tient du fait qu'il ne se développe qu'à la seule condition que la victime fasse un mouvement, et qu'il peut en outre occasionner d'importants troubles de la vision, caractérisés par des flashs fréquents et réguliers à chaque pas effectué; ce qui, dans les cas les plus graves, peut contribuer au développement de symptômes épileptiques aigus. De nombreux drames humains ont ainsi été recensés ces dernières années, d'hommes que l'on a retrouvés convulsant au sol, après avoir pourtant été soignés du poison qui les rongeait.

 

Le Rancunier
Il n'use que rarement de venin, mais d'aucuns diraient de lui qu'il est, à sa manière, un véritable poison. Le moins que l'on puisse dire du Rancunier, c'est qu'il n'est pas du genre à se laisser faire, et la plus grande erreur que l'homme naïf et trop sûr de lui puisse commettre serait de l'attaquer tête baissée sans réfléchir aux conséquences dramatiques de tels actes. Car, au fond, il n'attend qu'une seule chose : qu'on le frappe, qu'on lui fasse mal, qu'on le nourrisse et gave de douleurs comme un chocobo de légumes sylkis, pour ensuite punir et châtier en retour son assaillant, avec tant de plaisir et d'allégresse que les spécialistes en la matière l'ont bien vite surnommé le Prédo-Sado-Maso; et ce malgré le fait qu'à ce jour, nul spécimen n'ait encore été aperçu accoutré de cuir noir à clous, quoi que des rougeurs aient parfois été relevées au niveau de leur fondement. Si dans la plupart des cas, ces vindicatives créatures réagissent aux atteintes physiques à l'arme blanche, il subsiste quelques exceptions pour lesquelles l'usage de forces occultes est vivement proscrit, au risque de s'exposer à de tragiques représailles.

 
            Une victime de l'Empoisonneur.                                    Inconscient l'homme qui attaque un Béhémot.

L'Imperturbable
Il est ainsi des prédateurs haineux, et d'autres plus indulgents; mais nul ne saurait dire ce qu'il en est pour l'Imperturbable, tant celui-ci rend toute expérimentation difficile et fastidieuse. Tout ce que l'on peut mentionner à son sujet, c'est que l'on en distingue deux sous-espèces : l'Hermétique, et l'Intouchable. Entrent dans la première catégorie, les spécimens faisant montre d'une robustesse physique ou spirituelle hors-norme, au point d'en rendre tout assaut aussi futile que pourrait l'être un coup porté aux parties génitales d'un homme dopées au Toniglandyl. Les seconds, quand à eux, partagent avec leurs congénères cette propension à frustrer la plus barbare et irréfléchie des proies, mais adoptent un style plus fin, plus fourbe, amenant les experts à les qualifier de P*tain de Savonnettes, de par leur esquive surélevée et le peu de chances qu'ils laissent à leur proies de pouvoir les toucher.
Notons enfin qu'à la croisée des deux se trouvent toutes les créatures immatérielles, gazeuses, ou liquides, telles que les spectres et autres fantômes qui encaissent et, pourtant, esquivent en même temps. Si le débat reste entier quant à leur classification, la proie, elle, n'y verra que pareille frustration.

 

La Terreur
Mais qu'est-ce que la frustration face à la peur, la crainte, et l'effroi que suscite la Terreur ? Si d'aucuns le confondraient avec le maître des lieux, le boss, il n'en est rien puisque seuls entrent dans cette catégorie les spécimens dits "communs", qui dominent toutefois de par leur force, leur stature, ou leur ruse, la faune locale dans laquelle ils ont établi leur nid, inspirant la crainte et l'angoisse pour l'homme qui oserait s'aventurer sur son terrain de chasse. Tantôt dragon imposant, tantôt lutin vicieux, la Terreur et l'angoisse qu'elle suscite peuvent prendre bien des formes, mais dans tous les cas, pousseront la victime piégée à la plus prompte des fuites pour le salut de son séant, déjà marqué, bien souvent, de l'empreinte d'un premier échec.

Un cas plus spécifique, qui aurait été aperçu dans quelques contrées fantaisistes et étrangères, relèverait de Terreurs dont la supériorité relative tournerait à l'indécence. Comme un Lion placé au beau milieu d'un troupeau de vaches apathiques, ou un expérimenté joueur de meuporg dans une zone pour novices, ce spécimen n'est pas à sa place "logique" et abattra d'un coup de patte l'incrédule qui s'en serait un peu trop approché, par curiosité naïve.

 

 
 Voilà ce qu'on appelle une écharpe de miss.                                       "WTF, 114 ?!" diront-ils alors.                

Le Cleptomane
Si l'homme est souvent la victime de ces créatures avides de sang et de chair humaine, il arrive qu'il soit lui-même le prédateur dans cet écosystème complexe; mais un prédateur avide de richesses et de deniers, davantage que de viande saignante. Bon nombre de Cleptomanes présentent ainsi des caractéristiques humaines, bien que l'histoire ait déjà montré qu'il existait, parmi eux, une minorité de spécimens d'apparence bestiale. Mais quelle que soit sa nature, nul ne craint pour sa vie plus que pour ses précieuses possessions en faisant la rencontre de ce malandrin cupide, qui ne convoite chez sa proie que ce qui lui remplit ses larges, très larges, foutrement larges poches. S'il n'est pas de nature difficile sur la valeur de son butin, le supplice psychologique qu'il fait subir à ses victimes n'a d'égal que le jeu de la roulette russe. Provoquera t-il l'hilarité en lui dérobant l'une de ses quatre-vingt dix-neuf potions au rabais, ou, au contraire, le fera t-il suer d'angoisse après lui avoir subtilisé l'exemplaire unique de cette armure de légende qu'il a eu la folie de ne pas équiper ? S'ensuit alors une course contre la montre empreinte de tension, entre le moment du larcin et le moment où le voleur cherche à fuir, court laps de temps pendant lequel la victime peut encore espérer récupérer son dû, en négociant ardemment avec lui à coups d'arguments tranchants.

 

Les Geignards
Nous l'avons vu, la plupart de ces prédateurs adoptent un comportement fondamentalement solitaire et indépendant. Mais l'on ne saurait employer le singulier quand il s'agit d'évoquer le cas si particulier des Geignards, prédateurs au pluriel qui vivent et chassent en colonie. Leurs attributs physiques, leur force brute, ou leurs aptitudes magiques sont autant de détails négligeables quand ils en viennent à utiliser ce qui fait leur force véritable : une plainte, un cri, un hurlement, répété tel un écho par chaque membre de la colonie, inlassablement, jusqu'à déstabiliser voire rendre fous leurs proies. D'antiques religions accordent une valeur spirituelle élevée aux Geignards, considérant leurs cris si insupportables qu'ils eurent pu dépasser les frontières du corps humain, remonter le fil de l'âme, puis atteindre et irriter l'entité suprême elle-même, celle qui dirige les petits hommes comme autant de marionnettes à vocation narrative et ludique, poussant alors cette dernière à user de son pouvoir absolu, la divine Tablette aux Boutons où figure la non moins sacrée Rune de Mutisme; et d'une simple pression sur celle-ci, réduire au silence ces immondes créatures sonores jusqu'à ce que leur sort en soit scellé.


La faim justifie les moyens.

Les Geignards sont parfois... extatiques ?    

Le Fléau
Si, dans une certaine mesure, ses attributs peuvent se rapprocher de ceux d'un Empoisonneur, le Fléau n'en reste pas moins une espèce à part entière, autrement plus dangereuse que son inoffensif cousin. Là où ce dernier se contentait d'empoisonner ses victimes, dans une vaine tentative de palier à son insigne faiblesse, le Fléau, que l'on surnomme parfois l'Odieux aux Mille Germes, ou l'OMG, est un fervent défenseur de la variété quant à la manière d'acculer ses proies. C'est pourquoi leur fera t-il découvrir simultanément, et en plus du traditionnel poison, des afflictions aussi diverses et joyeuses que la paralysie, la démence, la pétrification, l'aveuglement, la narcolepsie ou, pire encore, le mutisme, quand bien même sa victime soit déjà silencieuse par nature. Faibles sont alors les espoirs de survie des êtres acculés par tant de handicaps; à moins que l'un d'entre eux ait eu la bonne conscience, la présence d'esprit d'effectuer au préalable une séance d'acupuncture à base de seringues vaccinatoires, ou d'avoir eu recours à tout autre procédé immunitaire que ce soit, tel que des charmes de protection, des talismans, des masques à gaz... Le rescapé pourra ainsi soigner ses coéquipiers pluri-maladifs au moyen de breuvages et baumes divers ayant fait la fortune des apothicaires de tout rang, pour qui le Fléau est désormais symbole de prospérité, en plus d'être idôlatré comme peut l'être une vache en Inde.

 

Le Coffré
Vil, traître et rusé, le Coffré se terre, comme son nom l'indique, dans un coffre d'apparence commune pour appâter et piéger l'homme avide de richesses qui, au moment d'ouvrir cet objet du désir, devra alors se confronter avec désenchantement à la vivacité frénétique de ce diable en boite, dont le trésor tant convoité pourrait bien n'être, au final, qu'une sévère déculottée. Si l'on peut admettre qu'il est très remuant, son endurance souvent élevée nous amène également à dire de lui qu'il a... du coffre, d'où son surnom bien mérité de Coffre-Fort. Si une forte majorité de ces redoutables créatures ont intégré le coffre à leur métabolisme, ne faisant plus qu'un avec celui-ci, certains experts aiment à leur attribuer quelques cousins éloignés, qui ne partagent avec eux que l'endroit de leur cachette et leur fourberie manifeste. Pas forcément des plus vifs, et souvent dissociés de la boite-à-traitrise qui les contient, leur principale singularité tient de leurs étonnantes facultés à se contorsionner pour entrer dans la dite-boite, eussent-ils un volume dix à cent fois supérieur à celle-ci, défiant ainsi les lois de la physique comme le feraient vingt clowns dans un célébre numéro de cirque, où chacun sort tour à tour d'une petite voiture à deux places.

 

 
  Le Fléau chasse aussi le squale.                                                 C'est la mort coffre ce prédateur.  

Le Vert Lent
Sans nul doute l'une des espèces les plus rares de cette faune complexe, que l'on ne trouve qu'à quelques lieux fantaisistes, le Vert Lent est une créature d'apparence inoffensive, qui ne doit son appellation qu'à la couleur de son corps frêle et chétif, ainsi qu'à sa démarche nonchalante mais terriblement anxiogène pour quiconque a déjà eu l'occasion de s'y frotter. Car sous ses airs de petit pois anorexique, se cache en réalité l'un des prédateurs les plus impitoyables et psychopathes qui soit, un suppôt de Satan mû par des pulsions sadiques et meurtrières. De ses pas lents qu'éclairent la lanterne qu'il tient d'une main, il avance, inexorablement, et endure sans sourciller les vaines tentatives de ses proies pour terrasser le monstre de résistance et de vitalité qu'il est. Et lorsqu'enfin, il arrive à portée de sa victime, tétanisée par un faciès si dérangeant, il n'a besoin que d'un simple coup de son petit couteau, mais non moins létal et imparable, pour transpercer et déchirer le corps de l'impuissante proie, qui aurait mieux fait de s'enfuir quand elle en avait encore le temps, l'occasion, et la présence d'esprit.
S'il n'a guère d'autre surnom courant, on raconte toutefois qu'une ancienne civilisation au langage grossier et décadent utilisait parfois, pour parler du Vert Lent, le qualificatif de Relou Chelou.

 

L'Assassin
Tel l'homme en rut, il est un prédateur qui ne s'embarrasse guère de préliminaires longs et fastidieux, pour préférer une approche plus directe et percutante. Ainsi l'Assassin, puisque tel est son nom, ne cherche pas à faire mal, ni même à user de stratagèmes superficiels pour affaiblir sa proie; il cherche à tuer, d'un coup, d'un seul, aussi brusquement que possible, sans tenir compte de facteurs aussi futiles que la résistance physique, magique, ou encore la solidité de quelque accoutrement protecteur. Né pour être craint, né pour être brusque, mais surtout, nécromant, l'Assassin compte, parmi ses outils favoris, des sortilèges de mort instantanée invoquant ni plus ni moins que les âmes damnées de l'outre-monde, pour venir faucher les vies sans défense qui leur sont offertes. Parmi ses cousins notoires, le Comte-à-rebours est un assassin plus noble et magnanime, qui laisse du temps à sa proie, par le biais d'un décompte, avant de lui faire subir le châtiment suprême; d'où son appellation subtile et sans pet. Enfin, citons également un autre cousin, le Multiplicatueur, qui lui tue ses victimes instantanément pour peu que leur mystérieux chiffre qui indique le niveau soit un multiple de trois, quatre ou cinq.
S'il est particulièrement impitoyable, il n'en reste pas moins que le meilleur moyen d'échapper à un prédateur si meurtrier est encore de... le tuer, avant que lui ne vous tue.

 

 
"Oh mon DIEU, il me RATTRAAAAAPE !!"                                                      Ça Gaze, Doom ?                  

Nous venons de le voir, le domaine du J-RPG est un environnement peuplé de créatures toutes plus étonnantes les unes que les autres, qui partagent néanmoins cet intérêt commun pour la chasse à l'homme. Il va sans dire qu'il ne s'agit là que d'une exposition non-exhaustive de ces créatures, tant il existe d'autres espèces non moins fascinantes. Ainsi aurait-on pu parler du Mort-Vivant, et ses allergies chroniques aux substances curatives, ou encore du fameux Plagieur dont la spécialité est de copier l'apparence, les techniques de sa proie, afin de la confronter à elle-même. Nous aurions, de surcroit, pu évoquer les nombreux croisements qui se sont opérés entre chacune de ces espèces, créant ainsi quelques espèces bâtardes comme le Vert Lent Rancunier, l'Assassin Coffré, le Geignard Cleptomane, et tant d'autres encore. Mais il convient de terminer ce document par la mention d'une espèce volontairement oubliée jusque là, qui est peut-être même la pire de toutes. Une abomination, qui hante aujourd'hui encore les cauchemars des quelques miraculés qui n'ont pas totalement perdu la raison après y avoir été confrontés.

 

Son nom ?...

...le Récalcitrant !

 


L'horreur en image.