Inversion, c'est l'histoire d'une invasion alien dans une ville appelée Vanguard qui ressemble à la New York des séries télé. La fille d'un policier est enlevée par les méchants, il part à sa poursuite avec son partenaire.

 

C'est un jeu très cinéma, dans le sens où les personnages restent rarement longtemps sans ouvrir la bouche et où l'action est entrecoupée de nombreuses scènes Cinématique avec le moteur du jeu. D'ailleurs leur nombre est un record, mais à l'inverse de Max Payne 3 elles sont passables et la transition ne fait aucun doute ce qui les rend moins agaçantes. Non j'ai plus eu le sentiment par moments que Saber Interactive aurait dû faire un film quitte à avoir autant de cinématiques, mais c'est plutôt que le scénario est rentré un peu de force dans le jeu, à grand renfort de doublages et de cut-scenes, comme si les deux étaient pas vraiment faits pour être ensemble.

 

On a affaire à des dialogues entre la série B et Z, entre de la décontraction second degré et du pathos maladroit. Le récit démarre en fanfare avec l’invasion alien dans les rues de Vanguard. Pour une fois on n’est pas propulsé directement dans un univers post-apo mais on assiste au premier rang à comment tout a débuté, l’origine de la catastrophe. Les “aliens”, des humains bourrus façon Mad Max, passent lors de la première apparition pour des punks énervés cherchant à mettre la pagaille dans la rue. Les deux flics sortent les fusils à pompe du coffre de la voiture, une journée ordinaire qui commence.

 

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Ces “Lutadores”, comme on les appellera plus tard, semblent gérables pour nos héros et sont peu nombreux. Quand on réalise que des incidents de ce type se produisent un peu partout dans la ville au même moment et que des voitures, puis des morceaux entiers de la voie urbaine se mettent à flotter dans les airs, on comprend avec frayeur qu’on est face à une force d’invasion. La gravité devient folle et c’est toute la ville qui se disloque petit à petit. Alors surgissent des visions d’un début d’apocalypse ciel bleu qui pourrait avoir comme lointain héritage les villes sombres et grises de Gears of War.

 

La suite, les ⅗ du jeu, sont donc la quête pour retrouver la fille de Davies, le héros. Il ne se passe rien, je me suis ennuyé ferme si ce n’est pour les décors inédits qu’on traverse et qui alimentent un léger mystère - joliment relayé par les personnages qui se posent de bonnes questions - sur l’origine des Lutadores, la nature des robots volants qui les harcèlent et plus généralement comment tout ce à quoi l’on assiste est possible ; mais ça n’a pas vraiment pris sur moi. Les batailles rangées répétitives sont restées le coeur de ce que le jeu me racontait.

 

Au dernier cinquième, une révélation énorme a relancé mon intérêt pour l’histoire de ces deux flics, bien appuyée par quelques décors sensationnels et des batailles uniques, jusqu’à la fin étonnamment sombre. En terme d’ambiance on aura finalement troqué avec bonheur Gears of War pour Stargate Universe, et revisité un peu de Centre Terre 7ème Continent en plus de Max Max, ce qui fut très plaisant.

 

La configuration de la manette est très classique, c’est un copié-collé ou presque (l’utilisation du Gravlink, on y vient) de celle de Gears of War, une énième itération. En ce qui concerne Inversion, ce schéma est tout à fait fonctionnel, ce qui conviendra à KingTedDy, mais n’exprime rien, ne produit aucune sensation particulière - ce qui m’embête moi. Un schéma lisse qui ne cherche pas une quelconque pertinence avec les actions assignées pour le maniement du personnage. Rappelez-vous, je m’enthousiasmais dans Doom 3 au sujet de l’assignation de “s’accroupir” au maintien enfoncé du stick de mouvement. De même enfoncer le stick droit de visée pour zoomer, concentrer son regard au centre de l’écran, semblait naturel, organique : immersif. Inversion, à part opter pour (ou valider ?) le tir sur une gâchette, ne fait preuve d’aucune inventivité et d’aucun génie dans ses commandes.

 

Les actions de base comme tirer, marcher, se mettre à couvert ; jusqu’à la dispersion des balles marquée par l’écartement du réticule, je n’en retiens rien. Générique c’est le mot qui me vient instantanément pour qualifier l’implémentation de l’ensemble des actions du personnage, ensemble lui même sorti tout droit d’un cahier des charges du TPS contemporain. Le personnage répond au doigt et à l’oeil, ses armes ont une dispersion ni trop grande ni trop élevée. L’éloge de la fadeur, à l’image de la composante coop’ du jeu redoutable d’originalité.

 

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Et ce fameux Gravlink, qui permet d’augmenter ou réduire le poids des objets dans une zone, se manie ni plus ni moins comme une arme : on vise et on appuie sur le bon bumper (les boutons de tranche de la manette 360).

 

Le jeu utilise l’auto-régénération sans bien sûr prendre la peine de la justifier dans son récit, classique, mais nous offre quand même dans ce marasme d’apologie du déjà-vu la manipulation de la gravité. Elle consiste à affecter une zone : bleue, les objets et les ennemis léviteront et on pourra les attraper et les lancer ; rouge, les objets suspendus tomberont et les ennemis seront accablés au sol, vulnérables à une exécution. Les deux pouvoirs sont capables d’enlever la vie à des ennemis faibles. Reste à voir comment le jeu les exploite.

 

Assez mal à vrai dire. Lors du dernier cinquième les deux pouvoirs sont utilisés à merveille lors d’un enchaînement de boss et d’arènes tous plus retors et inventifs les uns que les autres. Mais avant ça… La manipulation G est complètement anecdotique lors des combats, qui se règlent bien plus simplement à coups de fusils classiques. Tout au plus on “s’aidera” de la gravité faible contre de lointains snipers qui one-shotent en difficulté Hard (nommée “Gravité forte”). Pire, quand on acquiert le pouvoir de faire léviter des objets lourds comme des voitures, qu’on se dit que ça va enfin servir à quelque chose ce machin, on se retrouve à balancer les caisses contre des piliers au lieu de la tête des dix gus qui arrivent sur nous, faute à une architecture trop étroite.

 

La partie de l’aventure racontée par le challenge lui-même créé par le level design n’est donc pas fameux. Les boss sont tout de même réjouissants, ils nécessitent tous une technique différente, beaucoup de mouvements, on en vient même à s’affranchir du système de couverture pour se protéger derrière un pilier. Lors de ces séquences je me disais qu’il y avait vraiment un potentiel…

 

Qui arrive à la fin. Dans un festival extravagant de difficulté, les arènes font revenir des boss déjà vus, parfois en double, toujours dans des conditions nouvelles qui font monter la pression : sbires en nombre infinis, couvertures destructibles, architecture qui complique l’exécution d’une stratégie a priori connue mais compliquée dans ce nouveau contexte. Le jeu nous demande d’être inventif.

 

La dernière arène en gravité zéro est épique, je l’ai recommencé un nombre de fois hallucinant. Je n’ai pas parlé précédemment de ces phases alors qu’il y en a régulièrement dans le jeu mais elles se jouent à un mouvement près comme les batailles au sol. Et ce mouvement, le saut en arrière depuis une couverture, le jeu m’a enfin forcé à l’utiliser lors de cette ultime épreuve de force.

 

Inversion a un challenge qui s’épanouit malheureusement seulement dans la dernière partie de l’aventure ; mais alors quel challenge ! Cependant il ne faut pas être réfractaire à la difficulté die’n’retry autant en terme d’apprentissage de la stratégie que d’exigeance de skill abusée. Ce n’est pas mon cas, ce qui me permet d’apprécier et de terminer les TPS et FPS de cette génération dans les modes extrême. Je reconnais que ça ne sert pas du tout la narration, mais du point de vue de ma sensibilité ludique je marche sans problème, ça me dérange pas d’en chier grave et de recommencer 50 fois parce que bon sang c’est trop dur !

 

En prime à la fin on manque même de munitions… Et les armes à énergie qui brûlent les adversaires ont un certain peps !

 

La réalisation du jeu est de toute beauté à part pour les visages moyens (mais le héros a des cheveux - coucou BlackLabel !). Les murs invisibles sont déconcertants de bêtise et nous forcent à suivrent un chemin arbitraire dans des décors qui apparaissent gigantesques. Les tares éternelles de cette gén’ ! Sur PC le jeu tournait bien sur ma machine moyenne et s’il ne propose pas de synchronisation verticale j’ai rarement eu du tearing. Certains panoramas sont magnifiques et les ennemis, s’ils ne réagissent pas bien physiquement aux impacts, ont le bon goût de pouvoir être démembrés. Esthétiquement on ne reste heureusement pas dans l’urbain moderne peu inspiré du début mais là encore il faut pousser le jeu pour voir ce qu’il a à nous offrir.

 

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Inversion cache bien son jeu. Après l’enthousiasme suscité par le démarrage cinématique de l’histoire j’ai déchanté et maudit le jeu pendant des heures de shooting nul dans des couloirs, avec de temps à autre un boss pas si mal. Et puis la révélation Stargate Universe est arrivée et le jeu s’est mis à enchaîner des arènes au LD enfin audacieux et à la difficulté tellement exagérée que je l’ai adoré. J’ai adoré alors battre le jeu et suivre la fin de la quête de Leo et Davis, et j’ai tremblé après le générique quand j’ai vu que j’avais débloqué un mode de difficulté supérieur, le cauchemardesque “Trou noir”. J’ai vérifié, et sur consoles ils n’ont même pas mis de succès pour battre le jeu dans ce mode ! C’est dire comment il doit être abusé et exclusivement réservé à de véritables Fous Furieux.