La coutume, lorsqu'un hommage est rendu à une série, est de dresser le portrait du game designer principal. Mais pour Silent Hill, je ne peux que casser les règles, car force est de constater que celui qui a toujours insufflé cette âme si particulière à la saga, c'est bien le directeur sonore. Lui, c'est Akira Yamaoka, ce musicien prodige aux muses inépuisables, qui a prouvé que la musique de jeu vidéo pouvait elle aussi faire preuve de maturité. Crédité du premier Silent Hill jusqu'à Shattered Memories, Yamaoka continue de composer pour le jeu vidéo, mais il s'est cependant séparé de la firme Konami depuis maintenant plus de deux ans. Il reste malgré tout la personnalité star à qui l'on attribue toujours à juste titre le nom de Silent Hill, et c'est pourquoi sa carrière, de même que l'analyse de son évolution musicale, seront transcrites dans les lignes qui suivent.
UNE CARRIERE DU PLUS BON GOÛT
Akira Yamaoka naît le 6 Février 1968, dans la ville de Niigata au Japon. Etant jeune adulte, il poursuit ses études aux Beaux-Arts de Tokyo, pour finalement intégrer le studio Konami en Septembre 1993. A la base, Akira souhaitait devenir game designer, mais son destin fut tel que sa sensibilité musicale prenne le dessus pour le mener vers une carrière de directeur son. Il opéra d'abord sur les musiques de jeux Megadrive comme Sparkster : Rocket Night Adventures 2, ou plus tard sur la version PC Engine du Snatcher de Kojima, et sur les premiers ISS Pro sur Playstation, pour ensuite atterrir sur son premier projet d'envergure en 1999 : Silent Hill. Il prend alors ses marques en s'occupant intégralement des bruitages, des musiques de fond, mais aussi des morceaux écrits qui surviennent aux moments clés du jeu. Il fonctionnera ainsi pour chaque épisode, tout en collaborant avec Mary Elizabeth McGlynn pour les morceaux où elle chante. En 2003, Yamaoka devient producteur attitré de la licence Silent Hill. Ce jusqu'en 2009, où il décide de quitter Konami pour se rapprocher d'un artiste on ne plus charismatique au sein du studio Grasshopper Manufacture : Suda 51 alias Suda Goichi, le créateur de Killer 7 et de No More Heroes, homme dont il avait toujours apprécié les œuvres. Cela donne l'occasion à Yamaoka de signer la bande originale de Shadows of the Damned, très orientée punk rock/métal, ainsi que de Lollipop Chainsow prévu pour 2012. Le reste est à venir ! A noter qu'entre les nombreux lives qu'il a donné, l'artiste a sorti un album du nom d'iFuturelist en 2006.
RENCONTRE ENTRE MELANCOLIQUE ET SORDIDE
Pour que la recette d'un Silent Hill fasse effet, la qualité du son est un ingrédient primordial et incontournable. Cela, Akira Yamaoka l'a bien compris, et c'est pourquoi, à l'aide de son synthétiseur, de sa boîte à rythmes et de sa guitare électrique, il a donné vie à des sonorités aussi incongrues que terrifiantes au sein de chaque épisode. Son fil rouge pour composer des nappes sonores, est de partir de simples bruits. D'un son bestial, organique et crade, strident ou même industriel, se forme ensuite une rythmique qui occupe l'espace sonore tout en créant une ambiance oppressante au possible. L'influence de la musique répétitive et industrielle de Steve Reich est clairement là.
Yamaoka s'amuse ensuite avec ce matériau de base en utilisant divers effets, tels que celui de la spatialisation du son, qui peut vite devenir terrorisant quand dans une petite salle cloîtrée, un râle circule autour de nous comme s'il sortait des murs (l'expérience au casque est alors plus que recommandable). La gestion du silence est également brillamment mise en avant dans les Silent Hill. Les musiques d'ambiance savent se taire au bon moment, pour après repartir de plus belle, et instaurer un certain rythme dans le discours sonore. Du coup, le son semble constamment orchestrer nos émotions, et c'est lui qui indique de la façon la plus spontanée à notre cerveau : «aie peur», «sois en suspens», «sois en panique»... Le son qui accompagne les phases de jeu est donc relativement brutal et pénible à subir. Mais tout le génie de l'artiste réside justement dans le paradoxe qu'il fait exister entre ces nappes sonores difficiles à écouter, et la douceur des morceaux qui interviennent lors des cinématiques et des dialogues entre les personnages. En écoutant ces musiques à l'influence rock/pop rock pour la plupart, notre oreille est alors apaisée et beaucoup plus structurée. La patte Yamaoka est au sommet de son art dans chacune des mélodies, qui, tout en étant soutenues par un accompagnement puissant, conservent la mélancolie que l'histoire cherche à nous faire ressentir. Rien que pour le plaisir, voici quelques-uns des thèmes les plus marquants de Yamaoka, thèmes qui pourraient presque être signés Jay Jay Johanson pour certains. Et rien que pour le fun, je tenterai de n'exprimer qu'en un seul mot ce que chacun d'eux m'inspire, pour ainsi brosser un aperçu de l'évolution artistique qu'aura connu Akira Yamaoka durant ces années.
Silent Hill - «Tears Of» : Tristesse
Silent Hill 2 - «Promise» : Remord
Silent Hill 3 - «Letter From The Lost Days» : Affliction
Silent Hill 4 The Room - «Room Of Angel» : Iniquité
Silent Hill Origins - «O.R.T.» : Fatalité
Silent Hill Homecoming - «One More Soul To The Call» : Colère
Silent Hill Shattered Memories - «Hell Frozen Rain» : Récusation