Deux choses avant de rentrer dans le vif du sujet. Je n'ai joué à Dishonored qu'une fois et je suis donc peut-être passé à coté de plusieurs éléments concernant sa rejouabilité, les possibilités de son gameplay, l'impact de nos choix etc. D'autant plus que même si j'ai farfouillé dans les niveaux à droite et à gauche, je n'ai pas fais montre de beaucoup d'originalité et de variété dans mes approches. L'habitude sans doute ou la faute aux trailers ou juste parce que c'était le plus efficace.

Mon avis est donc susceptible d'évoluer. Le problème, c'est que pour le savoir je dois y rejouer et que pour le moment, j'ai un peu le sentiment de devoir me forcer.

Ce qui est marrant, c'est qu'il y a eu un pendant et un après pour Dishonored. Quand je jouais je trouvais le jeu très bon. Un archétype parmi d'autres pour faire un bon jeu me disais-je, avec son univers et son gameplay travaillé et un scénario qui affiche certes dès le début un manque flagrant d'ambition (c'était ma grande déception au départ), mais qui n'est pas non plus complètement ridicule. Un scénario pas dépourvu de défauts, de petits accrocs typique d'un jeu vidéo,  mais on comprend vite que l'intérêt du jeu n'est pas là, qu'il n'est qu'une base, un fil rouge entre les niveaux. Je me disais aussi qu'il faut juger un jeu pour ce qu'il est et pas uniquement sur ses attentes. Après tout, on peut faire un bon jeu avec un scénario mineur si l'univers et le gameplay sont jouissifs.

Mais quelques temps après, j'ai une autre vision sur le jeu et tout est venu d'une question. Suis-je excité, impatient, désireux de recommencer Dishonored ?  Vous connaissez déjà la réponse. Alors pourquoi ? J'ai apprécié y jouer donc d'où vient le problème ?

D'autres jeux me laissent cette impression. Les Souls par exemple (Demon's Souls et Dark Souls) et même Mario.  Pourquoi ne suis-je pas intéressé par une nouvelle partie? Et bien parce que ces jeux ne me racontent rien.

Aujourd'hui, quand je regarde Dishonored, je ne retiens qu'une succession de niveaux avec une cible au bout, des mécaniques de jeu efficaces pendant mais rien, entre-deux et au final, de suffisamment accrocheur. Comme si j'avais enchainé les maps du mode défi d'un Batman Arkham. C'est comme ne voir de Dishonored que les mécanismes à nues, sans un enrobage dont je ressens ici après coup le besoin. Un besoin vital pour continuer à éprouver de l'envie et de l'intérêt envers le jeu. Un besoin vital pour aller au-delà d'une seule partie et le regarder plus que comme un jeu. C'est-à-dire,  lui prêter de la grandeur. Mais là on en revient à mes attentes envers un jeu vendu 60 euro et non 20 et édité par Bethesda et non issue de kickstarter.

Pour les Souls, même si j'ai une meilleure opinion d'eux car mes attentes sur l'histoire sont nulles, j'apprécie de découvrir une nouvelle zone, ses ennemies, ses boss, d'appréhender son challenge. Mais une fois que c'est fait, c'est fait, pourquoi y revenir ? Alors que les Souls ont plus d'arguments que Dishonored je trouve. Grandes variétés d'armes et d'armures changeant l'approche que l'on a du personnage, 3 domaines de magie différents, feuille de stats, le frison de la difficulté ...

Dishonored c'est bourrin vs furtif et des choix qui ne trouvent réellement leurs échos que dans la cinématique de fin. Le truc: plus je tue plus l'univers est sombre, m'apparait comme gadget. Plus de rats, plus de malades, ça ne change pas grand-chose. Aider machin, ne pas l'aider, n'impacte qu'une zone ridicule à un seul moment du jeu et  létal/non létale sur les cibles; ben le scénario évolue pareil. La vérité, c'est que j'ai besoin d'une histoire, fut elle mauvaise pour rejouer rapidement à un jeu vidéo. Par exemple j'avoue à demi-mot en être à 3/4 parties sur les 2 premiers Assassin's Creed. L'histoire est nulle mais on me raconte quelque chose alors j'y rejoue avec ce qui est bien, et ce qui l'est moins. Mais toujours avec le sentiment d'être dans une histoire soutenue par un minimum de narration. Le problème ici, c'est qu'il n'y en a pas.

Corvo est un légume, une paire de mains qui flottent dans le vide et dépassent de l'écran. Il n'exprime rien et donc n'existe pas et c'est gênant. Comme lors de la première rencontre avec l'outsider, personnage sous-exploité, pas dans le background mais le scenario. Corvo obtient de lui son premier pouvoir et il ne réagit pas sur le fait que l'assassin de l'impératrice avait le même. Non, il s'en fout alors que c'est censé être une histoire de vengeance.  Ensuite entre 2 missions nos alliés ne font que nous aboyer des ordres, on aurait dit le héros de Bioshock mais sans le twist finale. Corvo s'exécute sans rien dire, rien ne vie, tout va trop vite.

L'histoire, celle d'un homme qui va renverser le pouvoir en place, ne donne l'impression de ne se dérouler que sur 5 ou 6 jours. Le QG de nos alliés est dans une zone sinistrée de la ville où il n'y a rien d'intéressant à faire. Pouvoir planifier nos missions, caché depuis un quartier plus vaste et vivant avec des quêtes secondaires ici aussi, m'aurait plus intéressé. Desquêtes qui auraient pu impacter le déroulement de la trame principale en nous offrant des alliés pour l'objectif non létal d'une future cible, plutôt que de toujours devoir rechercher cette approche (et l'éventuel allié qui nous l'apporte) à l'arrache pendant la mission elle-même. Et pourquoi y a-t-il plusieurs façon de tuer une cible mais à chaque fois, une seule approche non létale ?!

L'univers a un cachet fort, certains lieux sont très inspirés mais il ne m'a pas transporté de bout en bout. La mission dans le quartier riche est à la fois réussie pour tout le travail esthétique de la réception huppée dans laquelle on s'infiltre mais avant cela je trouve que c'est complètement incohérent. J'imaginais un quartier épargné par la peste, plus vivant que les autres lieux. On aurait eu à se faufiler entre les gardes mais aussi les passants, au milieu de maisons illuminées. Au lieu de cela, les maisons sont en ruines, on y trouve des pestiférés alors que de l'autre côté de la rive, le gratin de la ville se réunit comme si de rien n'était. En d'autres mots, Il y a une maison chic et une seule au milieu d'une zone en ruines !!

Le gameplay  a des accrocs, jouer bourrin et c'est passer à côté du travail effectué sur le level-design, qui pour le coup est assez formidable. Jouer furtif, c'est se rendre compte que certains pouvoirs, armes et gadgets ne servent à rien. Faire une risquette d'action pour varier les plaisirs et profiter de plus de synergie entre certaines  armes et pouvoirs et c'est l'effet boule de neige. Le vacarme du combat vidant parfois les alentours de tout les ennemis. Plus que de choisir comment j'avais envie de jouer (par exemple je commence discret puis si je me fais gauler je frappe puis retour en mode ninja), j'ai eu plus l'impression d'avoir choisi un camp en début de partie et d'avoir été forcé de m'y tenir parce que les deux approches ne s'harmonisent pas. Et faire la même chose pendant 20 heures ne m'encourage pas à rejouer. Surtout quand en plus l'histoire n'est pas un facteur d'immersion.

 Au final et malgré son gameplay certes bien huilé (bourrin et furtif séparément) et différent de la concurrence. Malgré un univers qui affiche lui aussi son originalité. L'impression d'un manque d'impact sur l'histoire, son héros transparent, le sentiment d'une aventure trop courte, et surtout son absence de narration, sont autant d'éléments qui m'ont laissés sur ma faim. En attendant de voir si j'y rejoue, Dishonored m'est apparu trop froid.