Charmeur Assassin's Creed ? Il l'est sans le moindre doute. Ses  graphismes sont d'une beauté féroce, ses animations sont hypnotique ; à tel point que, pendant un moment, on ne prête que peu attention à ce gameplay pourtant sans ambition, ni intérêt... Le jeu impressionne aussi par la densité et la richesse de la foule, ainsi que par le niveau de détail des environnements rendant les villes immersives et un minimum crédibles.

Les ambiances sonores, composées par Jesper Kyd, surprennent car à des instruments et des sonorités évoquant parfaitement le Moyen-Orient, se mélangent des sons plus synthétiques, plus modernes mais, au final, jamais discordants entre eux. Pas plus que tous les éléments visuels, interfaces et autres filtres technologiques, qui peuvent surprendre au début mais qui finalement confèrent au jeu un petit cachet.

On est donc avec délice dans l'univers d'Assassin's Creed. Tellement que malgré ses défauts, il me faut résister à l'envie de le relancer, de temps à autre, rien que pour gouter à nouveau à la terre sainte, sa campagne et ses villes. Bref, on est bien dans cet univers, on y croit…pendant un temps tout du moins.

Car il faut en premier lieu, tenir tête à une répétitivité empoisonnante, d'autant plus regrettable que le gros de l'histoire est simple et dépouillé. 9 cibles à abattre, avec d'abord l'enquête puis l'assassinat. Les séquences d'assassinats sont plutôt plaisantes, elles varient un peu les situations et mettent nos cibles en avant lors de petites scènes. Scènes qui malheureusement, de par leurs inéluctable récurrences représentent un premier élément de répétition, introduisant un quelque chose de mécanique un brin peu naturel. Le problème principal vient donc de l'enquête, identique pour chacune des 9 cibles, offrant peu de méthodes (4) et le plus souvent sans aucun challenge. Les rares objectifs secondaires ne valent guère mieux et les points d'observation trop nombreux finissent par énerver plus qu'autre chose.

Malheureusement ce problème de fond ne sera guère compensé par une forme en demi-teinte. Si les combats sont ce qu'il y a de plus sympathiques, ils sont tout de même handicapés par une IA mollassonne, néfaste pour le rythme, provoquant irrémédiablement ici et là une suspension de l'action plus que malvenu. Même si l'on peut en partie compenser cela, être sans cesse à l'attaque, saisir des gardes, lancer des couteaux, on a un peu le sentiment de combler une brèche plus que de se faire plaisir. En revanche, certains ennemis peuvent briser notre garde, nous attraper, contrer et chacune de leurs attaques nécessitent une commande précise en réponse. Bien sûr on peut reprocher à leurs attaques de ne pas faire très mal et à notre barre de vie d'être importante mais ces rares combats nous offrent un plus d'engagement et d'attention agréable . J'apprécie aussi le côté réaliste des affrontements, l'entrechoquement des lames. On frappe 3 fois l'ennemi, 3 fois nos lames se touchent mais il ne s'agit pas pour autant de parade, ça fait diminuer sa "barre de vie" et le 4eme coup, le seul à toucher sa chair, lui est fatal.

L'aspect le plus raté de la maniabilité reste la plate-forme. Deux boutons à maintenir enfoncés en plus du joystick à pousser et puis basta. Non pas simple et accessible, la plate-forme se révèle juste simpliste, quand bien même, aucune grande frustration ne vienne entacher le gameplay. Tout juste pestera-t-on contre les sauts loupés d'Altaïr ou son refus d'agripper certains éléments. Le problème, c'est qu'à niveler vers le bas son gameplay, on n'y trouve certes aucunes contrariétés majeures et libres à chacun de se satisfaire de son exécution visuelle, mais on n'y trouve aussi et surtout aucune sensation de jeu concrète. En somme, si l'animation est belle, rapide ou encore fluide, elle laisse le joueur apathique face à un gameplay d'une platitude navrante.

Oh et abordons quelques instants l'IA, qui pour l'infiltration, n'a d'intelligente que le nom. Les exemples peuvent être légion, se "dissimuler" en moine... sans autres moines au milieu desquels réellement se camoufler. Se mettre à l'abri du regard d'un garde derrière un mur, puis observer ledit garde refuser d'inspecter le lieu où, il y a 5 secondes, un individu suspect a été aperçu etc.  

Hélas, il ne faudra pas non plus compter sur son scénario pour venir changer la donne. En premier lieu, la trame de Desmond est foirée de A à Z. D'abord par un personnage pas une seule seconde crédible, otage passif au-delà de toute vraisemblance, dans lequel on ne croit plus, une fois passé sa 3eme réplique nonchalante avec ses ravisseurs: "bon,  qu'est ce qu'on fait maintenant ?". Ensuite, parce que la plupart des éléments entourant l'Animus ne sont ni clair ni logique. La 1ere fois que j'ai fait le jeu, sans doute pas très attentif face à la déception que fut ce pan de l'histoire, j'étais persuadé que Desmond revivait les souvenirs de son ancêtre en étant passif, l'Animus comme machine à voyager dans le temps mentalement. Alors que pas du tout, Desmond joue son ancêtre, concept hasardeux dont la seule raison d'être et d'offrir aux joueurs une mise en abyme de m'as-tu-vu fort maladroite.

Enfin, Desmond intervient trop souvent et pour rien, les passages le concernant sont inintéressants, et peuvent se résumer à faire des allers-retours entre la machine et le lit, lire des mails en majorités inutiles..., que du bonheur. Le rythme s'en trouve haché, la fin du jeu est d'ailleurs, à ce niveau-là, un vrai supplice et surtout, son environnement étriqué et froid contraste difficilement avec la taille et surtout la chaleur ressentie quand on joue Altaïr.

La trame de ce dernier est meilleure (ce n'est pas compliqué) mais elle n'est pas franchement réussie pour autant. Elle a des sursauts, non pas une révélation à la fin mais l'envie d'en offrir plusieurs, c'est généreux. Idem pour certains dialogues entre Altaïr et son maitre, pas trop mal écrit et rendant le personnage un peu intéressant et attachant. Seulement voilà,  il faut aussi compter avec des scènes de confessions aberrantes de bêtises dans leurs formes et sur plusieurs trous ou manques dans l'écriture. Ces "oublis", sur les Assassins ou leurs cibles ( en général comme celles d'Altaïr), m'apparaissent plus comme des fainéantises d'écriture, que l'envie d'évoquer, par exemple, l'aveuglement et la docilité d'un Altaïr, posant peu de questions et prêt à tout afin de regagner son honneur. En fait j'ai parfois plus l'impression que la sympathie que j'éprouve pour la trame d'Altaïr, est d'avantage lié à un potentiel plutôt que les faits, ramenant AC à un jeu avant tout mal raconté. 

En conclusion, s'il y a des aspects et des moments où j'apprécie AC. Dans ces instants en apparence fait de pas grand-chose ou le jeu sait être magique, comme lors d'une simple balade à cheval à travers la terre sainte, ou dans les rues chaudes de Damas à écarter la foule du bras, pour finir par  l'ascension d'une cathédrale imposante. Ces moments fugaces ne fonctionnent que lors des 5 premières heures de jeu, quand on fait pour la 1ere fois chaque ville et la campagne qui les sépare. Malheureusement au-delà, usé que l'on est de répéter les mêmes séquences, on finit par n'avoir plus qu'une seule envie, c'est d'arrêter ou d'en finir au plus vite. Seulement, 5 heures de jeu, ce n'est qu'un tiers de l'aventure. AC est attirant, envoûtant, on à parfois du mal à lui résister, on veut prendre la manette, y retourner mais dès que l'on gratte un peu, le vernis s'écaille et c'est bien malheureux.