Dieu m'est témoin, amis, j'ai tout fait - TOUT, et tellement plus encore ! - pour tenir mes vieux démons à distance.
L'âge avançant, j'ai mis de la tolérance dans mes coups de sang, de la patience dans mes bouillonnements intérieurs, une sourdine à mes cris du coeur et le mors au dent de mes aspirations les plus absolues. J'ai mis du conditionnel dans mes inconditionnels, j'ai fait de mes "je sais" des "je crois" en puissance (ou, du moins, en potentialités). Mes coups de bottes ou mes coups de cravache, je me suis appliqué à les donner avec plus de noblesse, plus de manières, moins de vindicte, moins de délectation. J'ai comparu mille fois devant le tribunal de ma conscience, et j'ai plaidé coupable sans attendre ni clémence, ni pitié d'aucune sorte. J'ai voulu demander pardon, même, de mes injustes railleries à l'encontre de tant d'oeuvres que, de toute évidence, je ne comprenais pas. Girls und Panzer, Hyperdimension Neptunia, j'ai battu ma coulpe en leur nom, en les priant symboliquement d'oublier mes outrages.
Rien n'y a fait.
Chaque jour, les monstres reviennent, chaque jour ils sortent de leurs placards, naphtaline et vieux linge, chaque jour ils s'extirpent des tiroirs, chaque jour ils font de mon ombre le théâtre de leurs parades infâmes, leurs macabres pantomimes, et chaque jour ils se rient de moi, et chaque jour ils s'échinent à me pousser tête la première dans l'abîme ouvert devant moi.
La folie me guette, amis, je le redoute.
Ou bien est-ce le monde qui me guette, paré des traits de la folie ?
Il me semble qu'il s'amuse de mes angoisses existentielles. Ou bien qu'il me punit ?
Est-ce là, oui, la punition pour mes péchés d'orgueil ?
Dois-je voir dans cet Etrian Odyssey IV un châtiment divin ? Ce Dungeon RPG à l'ancienne serait-il la juste rétribution de nos décadences institutionnelles et de nos Babels de pixels, prêtes à s'effondrer sous le poids de nos permissives apathies ?
Car à peine avais-je lâché un bon mot sur les très généreuses "3 utilisations" offertes par la démo jouable (contre les 15 à 30 habituelles, à votre bon coeur m'sieurs-dames) que déjà, déjà, j'étais contraint de laver mes yeux à l'eau de javel par un character designer sans pitié ni tabous - ou, en tout cas, peu disposé à se soucier des miens, et tant pis si ce sont ceux d'une civilisation entière :
Aussi, je m'interroge, amis.
Je m'interroge vraiment.
Je sais que ce nouveau siècle balbutie, qu'il apprend ses gammes, qu'il marche à tâtons.
Je sais, même, que le précédent n'a pas été avare en clichés et en mysoginies, dans sa façon d'aborder la féminité dans les oeuvres de fiction dédiées au grand public.
Pourtant, je me demande - et je suis sincère, je le jure face au Ciel - depuis quand notre fantasme ultime, en matière de guerrières sauvages ou lascives amazones, le souffre de nos désirs sur la mèche de nos fantaisies, tient-il moins de Barbarella que des moins pubères de nos petites soeurs cosplayées en dominatrices bondage - avec, dans le regard, toute la badassitude des soeurs Olsen période Disney Channel ? Depuis quand nous émoustillons-nous d'un mouflet à peine sorti de ses couches-culottes et habillé comme un vétérant du sexe tarifé ?
Lassé de ses formes opulentes et de ses strings aux plis, replis, surplis évocateurs, banalisé par ses itérations séniles, le fanservice a-t-il fini par tant se lasser de lui-même qu'il s'en retrouve réduit à réinventer, encore, et encore, et encore, son rapport coupable à la sexualité, dans la transgression et la surenchère qui président à sa gloire ?
Et demain, alors, amis ?
Quand cette nouvelle norme, à son tour, n'aura plus tant d'attraits ?
Qu'irons-nous chercher comme troubles égéries, pour peupler nos rêves érotiques ?
Quels nouveaux interdits bafouerons-nous, pour garantir le grand frisson à ceux qui nous lisent ou nous jouent ?
Je m'interroge, je m'interroge, sans trêve mais jamais sans reproches, hélas - et pendant ce temps-là, les monstres paradent en file indienne, ils dansent et ils s'exhibent, sans pudeur ni morale, et toujours ils me poussent, et toujours ils me traînent, et toujours ils me tirent jusqu'au gouffre devant moi.
Qui est peut-être une gueule ouverte.
Celui d'une bête immonde qui, ma foi, me ressemble.
Ou même : qui nous ressemble à nous, tous, tous autant que nous sommes.
Si tant est, bien sûr, que nous soyons.
Mais voilà que déjà, amis, mes mots m'abandonnent à leur tour. Voilà qu'on me les prend, qu'on me les enlève, qu'on les défait de leur sens.
S'il est une bonne âme qui me lise encore, puisse-t-elle les rapporter aux générations qui viendront afin qu'elles puissent, elles aussi, peut-être, choisir la voie de la lumière plutôt que les sentes de Géhenne de manière à pouvoir
RAAAAAAAAAAAAAAAAAHHHHHH
P*TAIN MAIS C'EST PAS POSSIBLE, ça !
ON AVAIT DIT "UNE" BONNE RAISON, BORDEL !
UNE !
Comme dans l'expression "une seule", ou dans sa déclinaison "la seule et l'unique" !
ça suffisait amplement !
Non parce que je veux bien que la folie me guette, ou que la patience blablabli, que la tolérance blablabla, ce genre de c*nneries de couvent, mais f*ck off, à la fin, amis, va falloir se calmer la zigounette un peu, là, parce que sinon le Comte Zaroff, c'est à la carabine qu'il va vous faire l'article, et il saura mettre les plombs sur les i, avec noblesse, élégance, distinction et cette bestialité inhumaine sanguinaire qu'on appelle le flegme brittanique. Puis il vous collera patiemment une pomme dans le c*l, du persil dans le nez, il vous plantera avec noblesse la rondelle sur une broche et il vous bouffra de la tête au pied sans vindicte ni délectation, mais beaucoup de plaisir quand même. Et peut-être une pointe d'origan.
Car comme l'écrivait il y a peu l'un des plus grands esprits de notre temps (doublé d'un bon ami à lui, c'est-à-dire bon ami à moi) :
"Motherfuck! What does a brother have to do to pacify a bitch? I'm telling you G, I've tried everything! God be my witness! I have shown respect, charm, under-fucking-standing! But that is the last fucking straw!"
(Isaac Washington)
Votre dévoué (bien que perplexe ce soir),
Comte Zaroff