Quatrième :
Ignatius Martin Perrish passa la nuit ivre, à faire des choses terribles. Il se réveilla le lendemain matin avec une terrible gueule de bois et... une paire de cornes qui lui sortait des tempes. 

Au début, Ig croit que les cornes sont une hallucination, celle d'un esprit malade, rongé par la colère et le chagrin. Cela fait un an que Merrin Williams, sa bien-aimée, a été violée et tuée dans des circonstances inexplicables. Depuis, reclus dans sa solitude, il vit un enfer, et il a plus de raisons qu'il n'en faut pour sombrer dans la dépression. Pourtant les cornes sont on ne peut plus réelles. 
Jadis, Ig le vertueux faisait partie des privilégiés : né dans une famille riche, second fils d'un musicien renommé et frère cadet d'une star montante de la télé, il avait la sécurité, l'aisance, une place reconnue au sein de sa communauté. Ig avait tout pour être heureux, plus encore il avait Merrin et un amour réciproque, auréolé de magie, fondé sur les mêmes rêves. Mais la mort de Merrin a tout détruit. Seul véritable suspect, Ig n'a pourtant jamais été accusé ni jugé. Et donc jamais innocenté. Pour le tribunal que constitue l'opinion publique de Gideon, sa ville natale du New Hampshire, Ig aura beau dire ou faire, il est et restera toujours coupable, car ses parents riches et influents ont exercé des pressions pour faire boucler l'enquête. Il est abandonné de tous, Dieu y compris. De tous, sauf de son démon intérieur... Et voilà qu'Ig se retrouve soudain doué d'un nouveau pouvoir, assorti à son nouvel aspect et tout aussi terrible, un macabre talent qu'il compte bien utiliser pour retrouver le monstre qui a tué Merrin et détruit sa vie. Être bon, prier... tout ça ne l'a mené nulle part. Il est temps de prendre sa revanche... Il est temps de donner sa part au diable...

Mon avis :
Joe Hill a commencé avec Le Costume du Mort, un premier roman juste excellent.
Ensuite, Joe Hill s'est tourné vers la forme courte et nous a pondu le non moins qualitatif recueil Fantômes.
Enfin, Joe Hill est aussi le scénariste du comics multiprimé Locke & Key ; pour moi, le meilleur comics actuellement.
Vous l'aurez compris : Joe Hill est un touche-à-tout de génie.
Alors, on a le choix : soit on peut le prendre en grippe, soit on ouvre une de ses œuvres et on découvre l'une des voix plus singulières de la littérature américaine.

Cornes est son deuxième roman donc.
C'est l'histoire d'un type qui se réveille un jour avec des cornes.
Même s'il en a pas mal abusé la veille, ça n'a pas l'air d'être la faute de l'alcool. Pas cette fois en tout cas.
Ce n'est pas non plus sa petite amie qui l'a fait cocu ; celle-ci est morte dans d'affreuses circonstances il y a un an.
Depuis, Ignatius s'en veut. Parce que d'une certaine manière, il n'est pas innocent. Alors, il boit. Pour oublier.
Pire, autour de lui, tout le monde le croit coupable. Même sa famille. Surtout sa famille. Ig est seul, terriblement seul depuis que Merrin n'est plus là. Ig n'a plus rien, alors, oui, Ig boit pour oublier, pisse sur des tombes, couche avec une femme qu'il n'aime pas en pensant à celle qu'il a aimée, et injure dieu autant qu'il le peut.

Et, puis, arrivent ces saletés de cornes que son entourage semble à peine remarquer ; mieux, tout le monde se met à lui raconter ses plus noirs secrets, ses désirs inavoués, ses souvenirs les plus malsains. L'occasion pour Ignatius d'enquêter et de découvrir l'assassin de la femme qu'il a aimée plus que tout. Car quand dieu vous a tourné le dos, il ne reste que le diable...

Comme Sean Stewart dans Dead Kennedy par exemple, le fantastique est un prétexte. À une chronique sociale, à un roman noir. Dans le cas présent, il sonde les âmes, les explore, les révèle. Pêle-mêle, Cornes parle de conneries d'adolescent, de parents absents, d'amour, de noirs secrets, de solitude, et de toutes ces choses dont on a déjà causé cent fois, mais dont Joe Hill a réussi à en tirer une histoire intéressante, touchante, profonde, intelligente, et ce, jusqu'à la toute dernière page.

Ah, oui, Joe Hill est le fiston de Stephen King. Mais, vous savez quoi, on s'en fout. Dans quelques années, Stephen King sera le père de Joe Hill.

9/10 Entre roman noir et roman fantastique, Joe Hill nous raconte une histoire diablement touchante. Une future référence du genre.

Simatural