« Thanks for playing ! »
Pays :
Canada, États-Unis, Royaume-Uni
Genre :
Action, Comédie, Fantastique
Réalisation :
Edgar Wright
Avec :
Michael Cera, Mary Elizabeth Winstead, Jason Schwartzman...
Durée :
1h52
Sortie :
1er Décembre 2010
Avertissement : cette critique peut contenir des spoilers.
Synopsis :
Scott Pilgrim n’a jamais eu de problème à trouver une petite amie, mais s’en débarrasser s’avère plus compliqué. Entre celle qui lui a brisé le cœur – et qui est de retour en ville – et l’adolescente qui lui sert de distraction au moment où Ramona entre dans sa vie – en rollers – l’amour n’a jamais été chose facile. Il va cependant vite réaliser que le nouvel objet de son affection traîne les plus singulières casseroles jamais rencontrées : une infâme ligue d’ex qui contrôlent sa vie amoureuse et sont prêts à tout pour éliminer son nouveau prétendant. À mesure que Scott se rapproche de Ramona, il est confronté à une palette grandissante d’individus patibulaires qui peuplent le passé de sa dulcinée : du mesquin skateur à la rock star végétarienne en passant par une affreuse paire de jumeaux. Et s’il espère séduire l’amour de sa vie, il doit triompher de chacun d’eux avant que la partie soit bel et bien « over ».
Critique :
Adaptation du comics quasi-éponyme, Scott Pilgrim vs. the World c’est un peu le fils prodigue de la pop culture geek au cinéma. En effet, et contrairement à d’autres adaptations de comics, le studio a choisi d’impliquer l’auteur, a confié le projet à un très bon réalisateur et a permis à ce dernier d’engager un casting de choix. Brian Lee O’Malley, l’auteur du comics n’avait pourtant pas fini d’écrire son œuvre lorsque les droits ont été vendus et que le film a été mis en chantier. Il a donc étroitement collaboré avec le grand et fabuleux Edgar Wright, le réalisateur britannique/geek-qui-s’assume dont les succès de Shaun of The Dead et Hot Fuzz lui ouvraient enfin les portes d’Hollywood… Enfin façon de parler : le film reste un métrage relativement indépendant simplement distribué par Universal Pictures.
Ce qui fait d’Edgar Wright un réalisateur talentueux, hormis son point de vue artistique évident et dont on reparlera, c’est son flair pour les comédiens qui collent parfaitement à la peau de ses personnages. Il aime ses comédiens, et on sent bien qu’il est plus intéressé par ce qui fait le sel du jeu d’acteur de ces derniers que par leur aspect bankable. C’est ainsi qu’il nous propose le sympathique Michael Cera dans le rôle principal, qu’on avait pu voir avant surtout dans Superbadou Juno (que je vous recommande très très chaudement d’ailleurs) et qui campe parfaitement bien la côté cool-mais-hyper-stressé du personnage de Scott Pilgrim avec un dosage juste ce qu’il faut de naïveté, combativité et d’humour. Il a une vraie complicité avec tous les comédiens du film, même les seconds rôles, et apporte une vraie vie au métrage. Il est bouleversant quand il brise le cœur de son adolescente de petite amie jetable Knives Chau campée par une Ellen Wong impeccable et tellement drôle quand il essaye de séduire la fantastique Ramona Flowers interprétée par l’irrésistible Mary Elizabeth Winstead. Cette dernière, elle aussi, propose une interprétation très juste de son personnage, si bien qu’on a l’impression qu’elle est directement sortie des pages du comics. Magnifique, pleine de cette grâce des grandes actrices de l’Âge d’Or d’Hollywood (elle est de la famille d’Ava Gardner) et elle aussi très drôle, elle est le vecteur de cette forme d’énergie acidulée dont déborde le film.
On retrouvera également dans le film l’excellente Brie Larson de le rôle de l’ex complètement garce de Scott qui l’a plaqué pour la sainte coolitude et sa carrière musicale. Elle est complètement jalouse, elle joue très juste et c’est encore une fois un vrai régal. Scott partage un studio avec un colocataire gay, Wallace, interprété par Kieran Culkin, qui, oui oui, est bien le frère de Macaulay « Home Alone » Culkin ! Bon vous commencez à me voir venir : il est là aussi impeccable est extrêmement drôle en particulier dans ses interactions avec la sœur de Scott (interprétée par Anna Kendrick que vous connaissez déjà probablement tous pour sa participation à The Hit Girls dans son numéro avec les gobelets). Bon, on ne va pas énumérer tout le casting mais il me paraît important quand même de saluer la prestation de Chris Evans, qui n’était pas encore ce bon vieux Captain America, ainsi que le grand Jason Schwartzman, que vous connaissez probablement pour son rôle de Louis XVI dans Marie-Antoinette de Sofia Coppola et dans les films de Wes Anderson et qui campe ici Gideon, le principal antagoniste du film et l’ex petit ami de Ramona bien décidé à la récupérer au grand désespoir de Scott Pilgrim.
La mise en scène du film est une gigantesque déclaration d’amour à la culture geek de tous bords. Les cadrages sont hyper inventifs, le montage est extrêmement rythmé et la direction artistique qui soutient la mise en scène est remplie de références musicales, vidéo-ludiques, à la bande-dessinée et au cinéma. Comment ne pas sourire aux effets sonores de Legend of Zelda, aux onomatopées et phylactères intégrés aux images exactement comme dans le comics d’origine, ou bien encore au fait que quand Scott bat un de ses rivaux ce dernier explose en pixels et pièces de monnaie comme dans les bons beat’em’all de notre enfance ? Ou encore la formidable séquence de comédie musicale qui sert de combat entre Pilgrim et les frères Katayanagi avec une référence aux Kaiju totalement délectable et d’une pêche d’enfer… Bref, le film est très généreux et malin dans ses références mais au-delà de ça est totalement bienveillant envers son public. On sent que le réalisateur a un vrai amour pour son sujet, et ça transpire pendant toute la durée du métrage. Et c’est là où la collaboration entre Wright et Brian Lee O’Malley est fantastique : en faisant le film en même temps que le second écrivait la suite de sa BD, le réalisateur a réussi à s’approprier totalement l’œuvre et à adapter totalement son style de storytelling à cette dernière pour créer une sorte de symbiose jouissive entre le papier et la pellicule. L’esthétique du film est très stylisée et a un vrai grain de BD filmée où même les effets spéciaux s’intègrent parfaitement à l’ensemble. Il n’y a ainsi jamais de décalage ni aucune faute de goût. L’étalonnage est tout aussi réussi avec un jeu particulier sur la texture de la pellicule utilisée ainsi qu’un jeu tout en nuance sur la vibrance des couleurs. C’est pop, c’est acidulé, c’est stylisé, c’est très propre et surtout c’est très frais. Et c’est finalement ça la clef du coffre au trésor qu’est Scott Pilgrim vs. the World : c’est un film très frais comme on en a rarement vu. Au delà des geekeries, il traite avec une bienveillance exemplaire du passage à l’âge adulte, de la complexité des relations amoureuses et humaines, du bien et du mal avec humour, le tout enrobé dans une bande-son rock/pop/folk/indé tout à fait magnifique à laquelle participe, entre autre, Beck.
NOTE : 8,5/10
Film générationnel, généreux, drôle, prenant et inventif, Scott Pilgrim vs. the World est de ces perles rares qui font passer un formidable moment de cinéma, donnent le sourire et remontent le moral. Si les ados et jeunes adultes des années 80 avaient le très bon La Folle Journée de Ferris Bueller, ceux des années 2010 peuvent compter sur le film d’Edgar Wright pour porter haut leurs couleurs. La seule question qui subsiste : est-ce que le réalisateur fera l’adaptation de Seconds, la dernière BD en date du canadien rock’n’roll geek dessinateur ?! On ne peut que l’espérer très fortement !