Attention, ce texte contient des spoilers au sujet d'un niveau en particulier de Modern Warfare 2.
Il a beau s'être écoulé à environ douze millions d'exemplaires à travers le monde, Modern Warfare 2 (MW2) a mauvaise réputation. Sixième épisode de la série Call of Duty, ce jeu de tir court et intense, au mode multijoueurs particulièrement soigné, s'est en effet vu critiqué pour diverses raisons.
Jeu de tous les records (d'après le Guiness, son démarrage constitue le plus réussi de l'histoire du divertissement), MW2 est d'abord le symbole d'une industrie où ce sont les jeux violents et classiques qui rencontrent le plus vif succès, au détriment peut-être d'autres titres plus originaux. L'image que renvoie son éditeur (sauf au Japon), le tout-puissant Activision-Blizzard (Guitar Hero, World of Warcraft), contribue probablement à ce désaveu.
Après un CoD4 (le premier Modern Warfare, sorti en novembre 2007) accusé de véhiculer une idéologie nauséabonde et pro-américaine, un niveau politiquement incorrect de MW2 (certes plus nuancé sur ce dernier point) a récemment fait grand bruit. Soldat infiltré parmi les terroristes russes que combat son pays, le joueur se retrouve, avec quelques compagnons, à ouvrir le feu sur des civils dans un aéroport. Il est possible de ne pas tirer du niveau, qui est lui-même optionnel, mais le mal est fait, d'autant que la scène rappelle des attentats récents. En raison de ce passage, le titre a été interdit en Russie, tandis qu'en Allemagne, utiliser son arme conduit droit au Game Over.
Par ailleurs, MW2 souffre du même défaut que CoD4 en son temps : sa campagne solo, très brève, ne dure que six heures environ. Pour pallier à cet écueil, d'autres modes plus conséquents (les Opérations Spéciales, une nouveauté, ainsi que le multijoueurs) ont été implémentés, et d'après le studio qui développe le titre, Infinity Ward, cette courte durée de vie est indispensable à l'intensité du mode Histoire ; mais pour un jeu vendu à 70 euros, l'addition reste salée.
L'autre grande polémique concernant MW2 est venue, avant même sa sortie, des options multijoueurs de sa version PC. En cause, les serveurs privés, cette fois aux abonnés absents. Une option jugée indispensable par les joueurs, au point qu'une pétition, rassemblant 256 640 signatures, a été mise en ligne... Même si une fameuse capture d'écran, qui montrait la page d'un groupe de boycott envers MW2 sur Steam, où la majorité des inscrits était en train de jouer, souligne l'hypocrisie de certains internautes.
Les contenus téléchargeables du titre, qui apportaient chacun cinq nouvelles maps multijoueurs (dont à chaque fois deux reprises de CoD4) pour quinze euros et se sont au final très bien vendus, ont également suscité de vives critiques.
Et les joueurs qui avaient apprécié CoD4 n'ont pas tous été convaincus par MW2, loin de là. De fait, la campagne solo du jeu, quoique excellente, manque d'originalité ; des scènes originales font leur apparition, mais elles demeurent dans l'ensemble très brèves. Le mode multijoueurs, lui, se révèle bien inférieur à celui du premier Modern Warfare, notamment en termes d'armes et de maps ; si bien que près de trois ans après sa sortie, les serveurs de CoD4 demeurent encore très fréquentés.
Finalement, MW2 est le parfait "jeu Mac Do" : très américain, extrêmement populaire, un peu vulgaire, agréable mais vite oublié.
Car les chiffres sont clairs : plus encore que CoD4, MW2 s'est révélé un énorme succès. C'est là le paradoxe : tout le monde déteste MW2, mais tout le monde l'achète. Certes, les joueurs qui le critiquent sur les forums ne sont pas forcément ceux qui se sont rués dessus
en fin d'année dernière, et on peut évidemment apprécier le titre en étant conscient de ses défauts ; mais sur Internet, la mauvaise réputation du jeu a de quoi surprendre.
Mais en dépit de ces critiques, qui dans l'ensemble paraissent fondées, MW2 demeure un excellent jeu de tir, intense, spectaculaire et superbement réalisé. Et si le studio Infinity Ward s'est vu délesté de ses deux fondateurs, Jason West et Vince Zampella, puis d'une partie du reste de l'équipe, suite à un brouille avec Activision, nombreux sont les titres à s'en inspirer. A commencer probablement par le prochain Call of Duty lui-même, Black Ops, signé par le studio Treyarch (qui alimente la franchise en alternance avec IW, sans atteindre son niveau de qualité), bien qu'il se déroule pendant la Guerre Froide ; ou encore le Medal of Honor à venir, basé sur le conflit d'Afghanistan et dont le nom sonne comme un retour aux sources. Parmi eux, un jeu connaîtra peut-être le même succès... Et les mêmes critiques ?