L'Origine des Colosses

Quelques millénaires avant l'origine des conflits cybernétiques du XXXI° siècle, les ancêtres des Colosses n'étaient qu'un peuple de bipèdes sauvages et pacifistes. En voie d'extinction, leur peuple était en proie à de nombreux prédateurs, tant leurs incapacités à s'adapter à leur environnement s'étendaient de leurs corps incroyablement chétifs, à leurs cervelets binaires et dénués de tout phénomène de neuroplasticité.

Mais c'était bien avant l'arrivée des ancêtres Aldéïdes... Des êtres de science, froids et inquiétants, attirés par l'exploitation de la faiblesse de ce peuple en déclin au profit de leurs obscurs desseins.

C'est ainsi que les derniers ancêtres Colosses virent un jour débarquer les membres d'une mission d'expédition sur la surface de leur planète. Ils n'eurent aucun mal à se laisser convaincre de participer au premier programme de fusion entre le corps et la machine, mené par l'Académie des Sciences Cyborgologiques Aldéïques. Cette dernière, en phase de finalisation, leur promettait un perfectionnement du corps et de l'esprit absolument inégalable. Des possibilités d'extension et de substitution de leurs membres, des implants cérébraux simulant les relations complexes entre la structure de la masse cérébrale et le système nerveux, leur assurant ainsi un usage et un contrôle optimal des éléments mécaniques et électroniques intégrés au corps... Finalement, ce n'était rien moins que l'être parfait face à l'adversité d'un environnement hostile que les Aldéïdes offraient comme perspective.

Entre le déclin évident programmé par la nature et l'espoir de survivre en prenant sa revanche sur la fatalité, les ancêtres des Colosses furent hypnotisés et séduits par ceux qu'ils croyaient être leurs sauveurs. Tous les individus sans exception, s'imaginant déjà posséder une puissance supérieure à celle de leurs prédateurs, furent alors embarqués dans les vaisseaux de transports hyperspatiaux. Le voyage prit fin sur Aldès, un monde riche en ressources et aux dimensions réduites, sur lequel les Aldéïdes semblaient réguler les naissances avec une précision singulière.

Mais les atrocités qui les attendaient n'étaient en rien comparable à ce que peut être la bienveillance d'un sauveur...

Étiquetés et identifiés par codes barres magnétiques comme de vulgaires marchandises dès leur entrée dans les vaisseaux, ils furent rapidement traités avec le mépris et l'indifférence qu'on n'accorde qu'aux cobayes. Les membres des familles se virent séparés dans la plus grande déchirure et classés par catégories relatives aux seuls paramètres physiques. Les Aldéïdes, incapables d'identifier la douleur chez leurs sujets d'étude, n'avaient en aucun cas la possibilité de montrer un tant soit peu de compassion en rendant leurs protocoles moins intolérables. La plupart des jeunes adultes étaient amputés sans la moindre technique d'anesthésie, les plus faibles des enfants mourraient dans d'interminables et atroces agonies... Et leurs cris plongeaient les adultes dans un état imperceptible de torpeur profondément haineuse.

"Le Programme", comme le désignaient les cyborgologues Aldéïdes, permettait une avancée sans précédent du développement des capacités organiques et de la définition toujours plus précise de la vie. La première phase, celle du développement du corps, touchait là les frontières de sa réussite. Ceux qui avaient pu supporter cette phase devenaient plus massifs, plus impressionnants et plus résistants. Tout le potentiel de la force renfermée sporadiquement dans un corps était concentré dans chaque cellule, chaque organe, chaque membre de cette nouvelle race, que le peuple Aldéïde commença à nommer "Les Colosses".

Mais il est des leçons que les plus grands savants de l'Histoire Universelle n'apprendront sans doute jamais à mettre en pratique. Bien qu'ils en connaissent parfaitement la théorie. Comme purent le prédire les vieux sages Aldéïdes, qui n'avaient de sage que la capacité d'anticipation des conséquences par l'exercice de leur raison pure, la créature finit par se retourner contre son créateur.

C'était une nuit comme les autres.

Une nuit de trop.

Leur haine sinistre et leur sombre colère. Leur rage bouillonnante d'attendre. De supporter la douleur... De subir.

Les cris. Le sang. Les crânes, les craquements d'os qui se brisent dans le creux d'une main. Les larmes. Le sang. Toujours le sang. Jusqu'à la démence. Jusqu'à la fureur.

Et c'est ainsi...

C'est ainsi que, poussés à bout, les Colosses laissèrent éclater l'expression de leur incommensurable douleur contenue. Sur chacune de leurs cibles s'abattait leur terrible courroux. Chacun de leur geste était funeste. Lourd de mélancolie, d'une tragique et paradoxale culpabilité et d'une agressivité incontrôlée envers tous les membres de cette race maudite en laquelle ils avaient jadis eu confiance... Le massacre, d'une rare violence, fut un désastre absolu. Ne laissant que poussière, lambeaux de chairs et désolation. Les premiers Colosses ne s'arrêtèrent que lorsqu'ils crurent que la planète des ancêtres Aldéïdes ne comptait plus le moindre survivant.

Aujourd'hui tristement célèbre pour avoir été la V1 de la cybernétique, les nouvelles générations de Colosses gardent surtout en eux ce besoin organique de destruction de tout ce qui ne semble pas connaître la difformité de la torture et de la souffrance. Leurs actes ne sont que le produit du seul instinct qui les anime : la volonté de dominer et d'anéantir toute forme de vie. Ils vibrent au son des cris de douleur de leurs victimes, se délecte de voir le sang sombre et épais se répandre à leurs pieds et la chair s'ouvrir entre leurs mains ingrates et puissantes.

Toutes les espèces de notre sombre XXXI° siècle, savent que le seul recours qui puisse encore exister face à ces monstres cybernétisés reste leur cruelle incapacité d'évolution. Leur esprit, resté au stade primitif de la phase 1 du Programme, rend leurs équipements bioniques, pourtant ultra-performants, sujets à de nombreux dysfonctionnements. Si vous tenez à la vie, évitez donc de combattre à armes égales et sachez utiliser leurs faiblesses.

Même si vous faites partie de leurs semblables, méfiez-vous... Ils n'auront pas la moindre idée de ce qu'est la pitié.

 

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