TitanFall fait partie des ces futures licences chaudement attendues par les joueurs, prévu pour le 13 Mars 2014 sur PC, Xbox One et Xbox 360, ce qui en fait donc une exclusivité Microsoft. Une exclusivité de poids tant l'engouement sucité par sa présentation à l'E3 2013 à fait l'effet d'un raz de marée. Nerveux, fluide, dynamique, le titre se présente comme le FPS du futur donnant au passage un sérieux un coup de vieux à des licences de shoots enracinées comme Call of Duty ou Battlefield.

 

C'est donc tout logiquement qu'on voit TitanFall rafler sans partage la majeur partie des récompenses de l'E3 et la Gamescom éditions 2013, parmi lesquels on retrouve les honorifiques titres de “Meilleur jeu multijoueurs”, “Jeu le plus original”, “Jeu le plus impressionnant” ou encore “Meilleur jeu console” et “Meilleur Jeu PC”. Oui, y'a pire.

 

Un statut (précoce?) de futur Hit en puissance qui rime désormais avec enjeu. Un enjeu qu'il est intéressant de décrypter pour les 3 acteurs concernés, à savoir le développeur Respawn Entertainment, l'éditeur Electronic Arts mais aussi le constructeur Microsoft.

 

 

 

Respawn, la résurrection au service d'une revanche.

 

Retour en Mai 2010, l'affaire fait grand bruit dans la sphère vidéoludique. Vince Zampella et Jason West, les deux fondateurs du studio Infinity Ward, sont licenciés par Activision sous le motif d'insubordination. Si cette mesure fait parler d'elle c'est d'abord pour le flou qui entoure l'histoire, mais aussi parce que le studio Infinity Ward, impacté, est à l'origine d'une des licence les plus lucratives du Jeu Vidéo : Call of Duty.

 

On apprend alors que l'éditeur reproche aux deux concernés d'avoir secrètement engagé avec des concurrents (dont Electronic Arts ?) une discussion concernant la création d'un nouveau studio, comme pour profiter de leur nouvelle réputation grandissante avec avec la clé, on se doute, une revalorisation nette des prestations mais pas seulement. D'autres éléments indiquent que West et Zampella dénoncaient également le manque de contrôle qu'ils pouvaient avoir sur l'aspect créatif de la licence phare d'Activision, pourtant leur oeuvre. Les deux compères cherchaient alors à retrouver leur indépendance artistique dans des contrées forcément plus vertes ailleurs. En résulte finalement le licenciement pur et simple du duo infernal, qui réclamera néanmoins des droits sur Call of Duty : Modern Warfare 2 qu'ils ont produit mais aussi la licence Call of Duty, qu'Activision s'acharnera -logiquement- à conserver.

 

S'en suit en Avril 2010 la création du studio Respawn Entertainement (Respawn comme Résurrection, ce n'est pas un hasard) par les deux anciens développeurs d'Infinity Ward qui rameutent au fil du temps quelques talents de leur ancien studio. Une résurrection qui prend forme sous l'aile d'Electronic Arts, le concurrent principal d'Activision, de quoi s'offrir la perspective d'une douce vengeance. L'éditeur Américain assurera la distribution des jeux du studio Respawn tout en respectant l'indépendance créative de ce dernier sur ses produits. Finalement, les revendications au coeur de l'affaire de Mai 2010 semblent alors évidentes.

 

En 2011, le studio tease leur premier projet avec une image floue sur leur site officiel pour ne finalement le dévoiler qu'en 2013 au cours d'une conférence Microsoft à l'E3 2013, TitanFall est né. Le pebliscite provoqué par leur nouveau titre s'apparente désormais comme la meilleure des revanches sur Activision (qui affiche au passage un score en baisse pour le millésime 2013 de Call of Duty). L'occasion de reprendre le dessus sur un éditeur souvent décrit comme tyrannique en ayant trouvé refuge chez l'éditeur concurrent qui, pas fou, accéde avec joie aux revendications de Zampella et West au vu de leur potentiel créatif mais aussi (et surtout ?) commercial.

 

 

Amour, gloire ..

 

La question est de savoir si l'exclusivité glanée par Microsoft sur le 1er opus (et seulement, à l'heure d'aujourd'hui) ne va pas à l'encontre de la philosophie de Respawn Entertainment qui pourrait chercher, logiquement, à diffuser leur nouveau projet au plus grand nombre en envahissant toutes les plateformes disponibles. Une exclusivité qui s'est, bien entendu, négociée avec l'éditeur Electronic Arts moyennant (sans doute) un gros chèque. Une puissance de frappe pécunière qui donne l'avantage au constructeur Américain face à la concurrence Japonaise. Si Electronic Arts a accepté le deal, c'est qu'il s'y retrouve financièrement, voir même ailleurs.

 

En effet, en Mai 2013, Microsoft annonce enfin aux yeux du monde la Xbox nouvelle génération, la Xbox One. Or, au grand damn des joueurs (peu renseignés ?), la firme de Redmond en profite aussi pour annoncer la mise en place de DRM et d'un checking internet obligatoire tous les 24h pour jouer. Une politique flatant à tous les égards une certaine branche de l'industrie, les éditeurs, là où on y retrouve justement.. Electronic Arts. Etrangement copain depuis quelques mois, la nouvelle voie engagée par Microsoft n'y est sans doute pas étrangère. On le sait, les éditeurs luttent avec passion contre le marché de l'occasion, un marché où ces derniers n'ont aucun contrôle et perdent la marge potentielle qu'ils pourraient dégager de la vente d'un jeu neuf.

 

 

.. et trahison.

 

Cependant, coup de théâtre ! Seulement 3 mois après l'annonce de la Xbox One Microsoft craque face à la grogne montante des joueurs et fait machine arrière. Les contraintes imposées par la nouvelle politique du géant vert s'envolent, les avantages avec. La machine s'aligne donc sur son concurrent Sony, au grand désespoir des éditeurs qui reviennent finalement à la case départ.

 

Un revirement qui pourrait sonner comme une trahison au yeux des principaux concernés et avoir de sérieuses répercussions sur l'entente Microsoft/Electronic Arts à l'avenir. Une friction symbolisée par la sortie médiatique du directeur financier de l'éditeur il y a 1 mois annonçant que le premier opus de TitanFall est et restera bien une exclusivité Microsoft mais que l'accord ne prenait en compte que cet épisode et pas les suivants, laissant donc la porte grande ouverte à un TitanFall 2 sur .. PlayStation. Une intervention qui pourrait s'interpêter comme un rappel à l'ordre pour Microsoft, Electronic Arts essayant par cette voie de destabiliser le constructeur après l'affaire Xbox One. Entre temps devenu le sujet de toutes les convoitises, le nouveau phénomène TitanFall se vendra désormais à prix d'or, et même pour Microsoft, qui devra sans doute revoir son financement à la hausse si ce dernier compte prolonger l'exclusivité.

 

En effet, si TitanFall rencontre le succès escompté, le constructeur Américain aura tout intérêt à passer à la caisse, et cela malgré la somme qui pourrait être reclamée.. Une licence avec un tel potentiel pourrait devenir LE jeu à posséder sur Xbox One, et une console (récente de surcroit) doit nécessairement posséder des titres forts, des killer-ap, pour s'imposer.

 

C'est pourquoi il n'est pas aberrant de penser que Microsoft tâchera de faire de TitanFall 2 une exclusivité, comme son ainé (en profitant au passage d'élargir l'accord pour quelques épisodes). Plus intéressant encore, ils pourraient en faire une exclue Xbox One en choisissant donc leur nouvelle plateforme comme seul support du jeu, à la manière de Gears of War 2, Halo 2 ou encore Fable 2. Une manière d'attirer le joueur PC (conquis par le 1er) sur leur machine.

 

 

On comprend finalement que TitanFall represente l'un des plus gros tournants de l'année 2014 dans cet univers impitoyable qu'est le Jeu Vidéo. C'est un enjeu artistique, financier et stratégique pour Respawn Entertainment, Electronic Arts et Microsoft. Un rapport de force en coulisse qui trouvera sans doute son apogée lors des prochains mois, avec une première échéance en Mars 2014.