Bonjour à tous ! Encore une fois on se retrouve pour parler d’un jeu, et plus précisément de Trine Enchanted Edition, version améliorée de Trine qui était sorti en 2009 sur PC, PS3 et XBOX360, mais pas sur WiiU, la console n’existant pas à l’époque. Frozenbytes, le développeur, n’étant pas snob, nous avait cependant gratifié de son Trine 2 à la sortie de la console (avec du contenu en plus et une technique irréprochable), et vient aujourd’hui nous permettre de prendre un cours de rattrapage premium en sortant la version améliorée de ce premier volet sur WiiU. Personnellement je trouve que la version de base se défend encore très bien aujourd’hui, aussi bien techniquement qu’artistiquement, et que le temps passé à optimiser ce qui n’avait pas besoin de l’être aurait été mieux employé à corriger le gameplay de la série en prévision de l’épisode 3. Car si le jeu est une grande réussite sur de nombreux points, il a aussi des défauts assez gênants qui viennent ternir le tableau. Ouvrez donc vos yeux et vos oreilles, asseyez vous au coin du feu, et laissez moi vous conter l’histoire du Trine.
L’histoire de Trine Enchanted Edition (que j’appellerai Trine à partir de maintenant, vu qu’en dehors de l’aspect graphique c’est le même jeu qu’en 2009 avec quelques options en plus) commence dans un royaume victime d’une crise de magie noire. En effet les morts reviennent à la vie, et ils ne sont pas contents. Résultat on peut parler d’une vraie invasion. Dans le chaos qui en résulte trois personnages se rencontrent dans le sanctuaire du château :
- Pontius le guerrier qui ne rêve que de batailles et de gloire. Il est le dernier défenseur du château, son intellect limité ne lui permettant pas de saisir le concept de « mort-vivant ». Son rêve est de rejoindre l’armé du roi.
- Zoya la voleuse qui a profité de cette histoire pour s’infiltrer dans le château et y chercher des richesses, notamment un artefact de grande valeur. Elle va se faire piéger par ce dernier et c’est bien fait pour elle.
- Amadeus le magicien, coureur de jupon, qui plutôt que de fuir le château a préféré chercher pourquoi une lumière jaillissait de ce sanctuaire normalement protégé par magie de toute intrusion. C’est sans doute l’ancêtre des héros des slashers movies…
Nos trois héros-malgré-eux vont alors découvrir le trine, artefact magique qui va lier leurs âmes, les obligeant à rester les uns avec les autres jusqu’à nouvel ordre. Le genre d’artefact qu’on est bien content d’avoir comme copain quand on va en boite. Sauf que nos trois compères ne sont pas vraiment ravis (surtout que leur avis sur la question, le trine s’en balance), et décident de partir à la recherche d’un moyen de lever le sort, avant de découvrir que cela ne pourra se faire qu’en retrouvant deux autres artefacts complémentaires du trine, et en arrêtant par la même occasion l’invasion des morts-vivants.
La narration suit le principe d’un conte de fée qui nous serait raconté par une tierce personne. Le doublage français est de qualité, avec des intonations justes et parfaitement adaptées, ce qui mérite d’être signalé. Les personnalités des trois héros ne sont développées que pendant leur introduction respective dans le premier niveau (qui sert de didacticiel). Par la suite elles n’évoluent pas, et servent surtout à justifier leurs réactions (comme le fait que Pontius réagisse toujours de façon bourrine par exemple) dans le récit. Cette formule pose une ambiance de fantasy féerique qui évite d’être inutilement complexe en plus de donner une vraie personnalité à l’univers de Trine. Le jeu est découpé en 15 niveaux + 1 niveau bonus, et l’histoire n’avance qu’entre deux, pendant les temps de chargement. Enfin « avance » c’est vite dit. Le récit se résume à passer d’un lieu à un autre sans aucun rebondissement, ce qui le rend quasi-inexistant, et surtout sans intérêt.
Une des vraies forces du jeu (et la raison principale pour laquelle tout le monde s’y est intéressé à l’époque) tient à ses graphismes. Trine est encore aujourd’hui le plus beau jeu 2D existant, à égalité avec sa suite. Et ça tombe bien car cette version Enhanced est une refonte graphique du jeu original qui utilise le moteur du 2, plus abouti techniquement. La réussite concerne aussi bien la direction artistique que la technique. Les environnements se renouvellent d’un niveau à l’autre, voire même au sein d’un même niveau, nous empêchant d’avoir l’impression d’avoir déjà vu tel ou tel arrière plan. De plus, le jeu est fluide en toute circonstance, peu importe le niveau de détails affiché à l’écran. Les éclairages mettent les décors en valeurs, ces derniers sont colorés sans agresser les yeux. C’est une réussite totale, et je défie quiconque de me dire le contraire. Chaque niveau est une nouvelle trouvaille visuelle, et à moins d’être réfractaire aux ambiances médiévales « contes de fée », vos yeux vont pleurer de bonheur. Et si vous trouvez ça beau sur de simples screenshots, dites-vous bien qu’en mouvement c’est infiniment supérieur.
Les musiques sont aussi de bonne facture. Si vous tendez l’oreille vous découvrirez des nappes apaisantes et calmes, qui au final sont beaucoup plus adaptées aux moments de calme, quand vous êtes hors combat, et que vous avancez en traversant les obstacles posés par ci par là par le level design ; d’ailleurs ça tombe bien vu que les combats ont leur propre thème. Pas contre le thème principal, lui, va bien se graver dans votre cerveau, vu qu’en plus d’être joué sur l’écran titre, il est aussi joué entre chaque niveau (et qu’il est très beau, ça aide). Et à ce moment, comme pour se rattraper du faible volume des musiques dans les niveaux, le jeu se met à vous le hurler dans les oreilles, au point parfois de parasiter la voix du narrateur. Mais là je pinaille un peu, en vrai les quelques problèmes de gestion du son sont vite oubliés car absolument pas gênant.
En clair graphismes sublimes + DA de fantasy féerique qui défonce + BO sans fausse note = ambiance enchanteresse qui n’a jamais été égalée depuis 6 ans.
Dans Trine vous dirigez trois héros, chacun avec ses propres caractéristiques indispensables pour vaincre les obstacles qui vont s’opposer à vous. Ponthius le guerrier est idéal pour marraver la face des squelettes guerriers, des squelettes mages et des squelettes archers, tandis que son bouclier lui permet de se protéger contre les coups et les boules de feu. Zoya la voleuse peut attaquer à distance avec son arc et possède un grappin qui s’accroche sur toute surface en bois, ce qui lui permet de réaliser pas mal d’acrobaties. Quant à Amadeus le mage il ne se bat pas, mais il peut déplacer des objets par psychokinésie et créer des caisses et des planches à partir de rien. Là je ne vous ai présenté que les capacités de bases. A mesure que vous progresserez vous en gagnerez d’autres dont je vous laisse le plaisir de la découverte. Chacune peut être améliorée grâce à des points d’expériences obtenus en récoltant des potions vertes cachées dans les niveaux. Vous pourrez par exemple lancer plusieurs flèches en un tir ou faire exister 2 puis 4 caisses en même temps.
Dans les niveaux vous alternerez phases de combats et phases d’énigmes. Les combats se règlent souvent avec Ponthius ou Zoya, et ne font preuve d’aucune subtilité. On tabasse les ennemis les uns après les autres et on brandit son bouclier pour se protéger. Mais vu que la mort n’a rien de négatif il arrive souvent qu’on se moque royalement de prendre des coups. Le jeu possède un grand nombre de checkpoints auxquels vous pouvez faire remonter votre barre de vie jusqu’à 50% du total (avec résurrection des morts s’il y en a) chaque fois que vous passez devant, ce qui fait que si Ponthius meurt on peut le remplacer par Zoya et ses flèches et si elle meurt elle aussi, retourner au checkpoint avec Amadeus le magicien suffit à remettre l’équipe sur pied. Et si votre équipe meurt elle réapparaît au checkpoint sans que les ennemis ne soient réinitialisés. Résultat il n’y a aucune tension lors des affrontements, vu qu’il est impossible de les perdre et qu’ils n’ont aucune profondeur. Ce sont juste des phases qui deviennent vite barbantes, leur seul intérêt étant qu’on y récupère pas mal de fioles d’expérience. Et encore ça c’est rien, car en de rares (youpi !) occasions on aura à affronter des morts-vivants plus puissants que la moyenne dans des pièces fermées, qui faute de mieux feront office de combats de boss. Et là encore c’est sans intérêt.
Heureusement la majorité du temps passé consiste surtout à surmonter les obstacles que le level design place sur notre chemin. On peut les séparer en deux types : il y a les énigmes de type « salle » qui consistent à trouver le moyen d’atteindre la sortie d’une zone définie pour avancer et qui nous obligent à nous creuser les méninges et à utiliser l’environnement proche, et il y a les phases de plate forme où l’adresse sera davantage mise à contribution, même si un peu de réflexion vous permettra souvent de bien vous simplifier la tâche. En règle générale le level design est assez souple : il existe souvent plusieurs façons de passer tel ou tel obstacle (même si ce n’est pas systématique), et tout dépendra de la façon dont vous utiliserez les pouvoirs d’Amadeus et le grappin de Zoya. De même la difficulté est bien calibrée et vous ne serez jamais bloqués bien longtemps, à condition bien sûr que vous preniez la peine de réfléchir, le jeu n’étant pas gratuit pour autant. Le gamepad de la wiiU est surtout utilisé pour du off screen (même en 480p la DA claque toujours autant), mais il est possible de s’en servir en tant qu’Amadeus pour tracer à la main le contour des caisses ou pour être plus précis pour déplacer des objets (un équivalent de la souris de la version PC) à la place du stick droit. De même l’écran tactile pourra servir à déclencher certaines capacités.
Par contre je recommande de faire le jeu en plusieurs sessions, car si les situations se renouvellent bien, la façon de les surmonter nécessite l’emploi des mêmes mécanismes. A force d’empiler des caisses et d’utiliser le grappin (90% du jeu peut être passé en se limitant à ces deux objets), la lassitude guette. Il y a bien des coffres à chercher en fouillant les niveaux, en plus des fioles d’expérience, mais là encore c’est caisses-planches-grappins pour les atteindre. Mais de toutes façons le jeu dure en moyenne 8-9 heures (durée estimée selon la technique dite du doigt mouillé, vu que votre skill jouera beaucoup), et vu que la seule carotte pour refaire les niveaux est d’aller chercher les fioles d’xp qui vous ont échappées, autant faire durer le plaisir. De toute façon l’envie de voir les décors suivants devrait vous faire replonger tôt ou tard.
Mais Trine c’est aussi un mode multi. Il est en effet possible d’inviter jusqu’à deux joueurs pour prendre chacun le contrôle d’un personnage, faire de la bonne coopération et accuser les autres de ses propres erreurs. Vous pouvez soit sortir deux manettes pro pour faire du multi local en drop-in/drop-out (comme dans la version d’origine), soit vous connecter pour jouer en ligne (ce qui est une nouveauté propre à cette version Enhanced) et rejoindre vos amis ou de parfaits inconnus. Ce mode fonctionne très bien, surtout en local. C’est là qu’on se rend compte que si en solo le level design est souple et ne possède pas une solution unique aux énigmes, c’est parce qu’il est pensé pour qu’en multi les trois personnages puissent avancer en s’entraidant. Ici pas de bulle dans laquelle s’enfermer pour passer un obstacle, pas de possibilité de s’accrocher à un perso pour le laisser passer sans avoir à travailler soi-même. Ici on veille à permettre à chacun de passer, et si un personnage est bloqué c’est tout le groupe qui est bloqué. Si la caméra abandonne un personnage en arrière, ce dernier ne se téléporte pas par magie à vos côtés. Alors que le solo repose sur la complémentarité des héros, le mode multi repose plutôt sur leur entraide. De plus le fait d’avoir plusieurs héros à l’écran permet d’utiliser des techniques irréalisables en solo : par exemple Amadeus est incapable de soulever une caisse sur laquelle se situe un autre héros ; par contre il peut la faire léviter à bonne hauteur pour que ses camarades s’en servent de plate forme temporaire (à condition de sauter vite, vu qu’elle tombera sous leur poids). L’avantage c’est que ça fait la nique aux joueurs qui ont tendance à foncer droit devant sans se soucier de ceux qui ont plus de mal à avancer. Par contre en cas de galère réelle il est possible de tricher : ceux qui n’arrivent pas à passer se suicident et celui qui est passé fonce au prochain checkpoint, où tout le monde ressuscitera. Ca ne marche pas tout le temps mais ça peut aider. L’expérience offerte par le mode multi est donc distincte de celle offerte par le mode solo.
Mais il est temps de parler DU gros problème de gameplay : les sauts sont imprécis. Dans un jeu avec autant de phases de plate forme ça fait un peu tache. Attention on ne parle pas ici de quelques situations délicates, mais bien d’un problème constant, permanent. Si vous visez une plate forme de taille réduite sachez qu’une légère pression sur le stick peut vous décaler plus que prévu, et vous faire chuter. De même les hitbox des plates formes ne sont pas toujours très claires et il arrive parfois qu’après avoir pris son élan pour un saut long, on tombe au lieu de sauter car on a mal calculé son coup en croyant avoir plus de marge qu’en vérité (et je ne parle pas d’avoir appuyé trop tard sur le bouton, mais d’avoir cru pouvoir avancer sur une foulée de plus). Si vous visez une plate forme située plus haut, faites attention car souvent on se cogne la tête en dessous et on tombe, alors qu’on croyait avoir bien visé (très fréquent quand les plate forme s’abaissent sous votre poids et que vous n’avez pas le temps d’y aller doucement). De même quand il faut atteindre un promontoire situé en haut d’une pente raide, si vous utilisez vos caisses pour gagner de la hauteur et que vous sautez ensuite, il arrive que vous touchiez le bord du promontoire avant de retomber. Dans ce cas insistez sans rien changer, il arrive souvent qu’après 2 ou 3 essais vous arriviez à passer malgré tout (avec parfois l’impression d’une mini téléportation quelques pixels plus haut). Et ça c’est la preuve que le jeu a une part d’imprécision qui fait que dans des conditions identiques, si un saut est un peu délicat ses chances de réussite ou d’échec ne sont pas de 100%. Après le jeu reste tout à fait jouable, et à force de jouer on finit par apprivoiser ce gameplay flottant, mais il me semble nécessaire que vous soyez au courant pour éviter une déception inattendue.
Trine n’est pas un chef-d’œuvre. Ses imprécisions de gameplay représentent un vrai défaut, les combats sont à mourir d’ennui, et surtout le fait de faire répéter les mêmes actions en boucle pour avancer dans les niveaux peut rendre la progression répétitive et laborieuse, si on ne fractionne pas le jeu en plusieurs sessions. Heureusement il a de vraies qualités pour compenser. Déjà la prouesse graphique et artistique n’est pas négligeable, l’ambiance est travaillée, et malgré les défauts cités précédemment le level design et le gameplay restent bons dans l’absolu. Tant que vous savez à quoi vous attendre vous ne devriez pas être déçu. Personnellement j’ai passé un très bon moment dessus, et je vous recommande de vous y intéresser. Je précise pour la fin que si vous aimez Trine, vous aimerez à coup sûr Trine 2 (et inversement).
Vous aimerez ce jeu si :
- Vous êtes sensibles à de beaux décors, ne serait-ce qu’un peu
- Seul : vous aimez des jeux qui offrent de résoudre des situations de plusieurs façons différentes, selon vos idées
- A plusieurs : vous êtes à la recherche d’un jeu multi (local ou online) où « coopération » n’est pas un vain mot
- Vous avez aimé sa suite (ce n’est pas tous les jours qu’on peut sortir une phrase pareille en restant logique donc j’en profite, et puis c’est vrai)
Vous devriez réfléchir si :
- Vous êtes intolérants aux imprécisions de gameplay
- Vous considérez que la mort est un échec et doit être sanctionnée, au moins un minimum
- Vous vous ennuyez très vite quand un jeu ne repose que sur un principe du début à la fin, sans jamais se renouveler
Trine Enchanted Edition coûte 12,99 euros sur l’e-shop de la WiiU
Luciole