Le rogue-like est devenu en l'espace de quelques années un genre dominant du monde indé. Ceci à tel point qu'il s'est vu décliné à toutes les sauces (RPG-Rogue avec Star Renagade, Puzzle-Rogue avec IronCast...). Mais un genre lui résiste encore un peu : celui des aventures narratives. C'est pourtant la proposition sur le papier de Road 96 des français de DigixArt (bientôt distribué en boite par Just for Games). Chaque road trip est différent parait-il, alors allons donc forger notre destin.

I'm a poor lonesome Ado

Lorsque Road 96 commence, après une petite introduction présentant les protagonistes principaux, on se retrouve directement dans la peau d'un adolescent lambda. On ne connait ni son nom ni d'où il vient, et ce n'est pas plus mal car c'est à nous de lui forger son destin. Le jeu étant procédural, je ne peux vous dire si vous commencerez votre voyage dans la voiture d'une personne de passage, sur le bas-côté de la route ou arrivant dans un motel miteux. Dans mon cas j'étais bien heureux d'avoir pris en stop un petit garçon du nom d'Alex ravi de me présenter sa dernière création de jeu vidéo. Mais dans tous les cas votre objectif sera le même : traverser la frontière du pays fictif de Petria pour échapper à la dictature du président en place nommé Tyrak avant le jour des élections. Road 96 est avant tout un jeu narratif, et les dialogues sont 90% de l'expérience de jeu. C'est pourquoi, à pied, en voiture, en bus ou en Taxi, vous ne resterez jamais seul très longtemps. C'est important car l'histoire de votre adolescent n'est finalement pas très importante, ce n'est qu'un maillon d'une histoire plus grande que lui. Vos choix influeront sur son destin certes, mais ce sont les discutions avec les autres qui forgeront non seulement votre futur, mais aussi les réactions de ceux qui vous entourent. L'histoire de Petria c'est avant tout l'histoire de 7 personnages centraux que vous croiserez : Zoe, John, Fanny, Alex, Stan & Mitch, Sonya et Jarod. Tous ont un rôle essentiel dans l'avenir du pays et dans la révolution qui gronde. Serez-vous des leurs ?

Passera ? Passera pas ?

Un road trip est constitué d'une série de scénettes dont la génération est aléatoire. Comme dit ce bon vieux Forest Gump, la vie est une boite de chocolats et on ne sait jamais sur quoi on va tomber. Il est pourtant possible d'agir en choisissant son mode de transport. Bien entendu, taxi et bus seront payants et dépendront de votre trésorerie, tandis que marcher grignotera rapidement votre barre d'endurance. Road 96 inclue de petits éléments de survie, et franchir la frontière en vie n'est pas une certitude (mais soyons honnêtes ce n'est pas très difficile avec des choix pragmatiques). Allez-vous voler de la nourriture pour survivre ? Dormir dans des cartons ou payer une chambre ? Boire, manger et dormir sont en effet le moyen de regagner un peu d'endurance. Après chaque scène, on avance d'un certain nombre de kilomètres en direction de la fameuse route 96 où plusieurs choix plus ou moins difficiles permettent de traverser la frontière et d'accéder à la liberté. Que vous arriviez à bon port ou non, un épisode narratif se clôture. Le journal télévisé du pays explique la situation actuelle et les prévisions de votes, puis la présentatrice parle des adolescents disparus. A vous à ce moment de choisir lequel des trois adolescents vous allez incarner. Seuls sont indiqués le sexe, l'âge, l'argent en poche, la distance le séparant de la frontière et sa situation actuelle. Vous l'aurez bien compris, les adolescents sont en réalité plus des outils narratifs dans une histoire qui les dépassent. A chaque road trip son ado, et petit à petit la date de l'élection se rapproche jusqu'au dénouement.

On the road again, again...

Road 96 est peut-être un jeu basé sur la génération procédurale, mais il reste avant tout une expérience narrative. Il y a donc bel et bien une fin. Une fois l'histoire conclue, il est possible de passer en mode new game +. Ceci permet de recommencer l'histoire en gardant l'avancée dans les histoires personnelles des personnages principaux (je ne sais pas si quelque chose de débloque au 100% total) et de garder quelques bonus octroyés par ces mêmes personnages comme par exemple la possibilité de crocheter une serrure ou de pirater de l'électronique. Ce n'est pas très logique qu'un ado autre que celui qui a appris la capacité puisse s'en servir, mais ça permet d'augmenter les choix possibles, mais aussi de rendre le jeu (encore) plus facile. Ce mode new game + est une bonne idée surtout dans un jeu procédural. Malheureusement il fait apparaitre le gros point faible du jeu. Ce qui marche avec brio le temps d'une partie ne fonctionne plus aussi bien par la suite. D'une part les scènes commencent à se répéter, mais on se rend compte que l'illusion du choix est souvent assez évidente. Un peu comme dans les jeux Telltale, ou de multiples choix arrivent au même résultat avec juste des dialogues différents. On aurait vraiment aimé que le jeu permettre plus de véritables choix. Il n'est pas exemple jamais possible de sauter un évènement en fuyant simplement quand les choses se gâtent, choix pourtant assez logique. Certains choix impactants sont bien entendus présents et permettent d'obtenir une fin différente, mais le jeu aurait pu aller plus loin dans le concept pour devenir un vrai "rogue-like".

 

Mon avis à moi

Road 96 rate un peu sa proposition initiale qui était d'avoir un cheminement réellement unique à chaque partie. Néanmoins, il propose une aventure parfois drôle, souvent touchante, mais rarement sans émotion. Si la replay value n'est pas celle escomptée, il n'empêche que terminer l'histoire vous laissera un souvenir indélébile, et c'est déjà pas mal.

 

A qui s'adresse Road 96 ?

- A ceux qui aiment les expériences narratives

- A ceux qui aiment choisir leur destin

 

A qui ne s'adresse pas Road 96 ?

- A ceux qui espèrent un véritable roguelike narratif

- A ceux qui veulent de l'action

 

 

 

 

Johann Barnaud alias Kelanflyter