Si vous nous lisez régulièrement, vous vous souvenez peut-être de notre test du premier opus de la série Gold Master Series de Digital Eclipse intitulé The Making Of Karateka. Nous avions terminé en indiquant que nous avions hâte d'avoir le volume 2 entre les mains. C'est désormais chose faite avec cette fois une collection faisant la part belle à un légendaire créateur anglais : Jeff Minter, créateur de jeux vidéos depuis 1981 encore en service aujourd'hui et fondateur de Llamasoft. Allons nous replonger à nouveau dans un peu d'histoire vidéoludique avec ce Llamasoft : The Jeff Minter Story.

Un homme à vous faire devenir chèvre

Si vous n'avez jamais touché à un jeu de Jeff Minter, attention ! Une fois que vous aurez commencé votre initiation, il est probable que votre santé mentale en soit affectée pour toujours. C'est un euphémisme de dire que Jeff Minter est un homme à part avec son univers bien à lui. En général ses jeux ne laissaient à l'époque personne indifférent. On adore ou on déteste. Et cet aspect clivant ne s'est pas atténué avec l'âge. A ses débuts, sa spécialité consistait - comme beaucoup de créateurs à cette époque - de reprendre des jeux d'arcade existants et d'y ajouter sa sauce personnelle. Bercé par les grands jeux d'Atari en particulier ce n'est donc pas une surprise qu'il égrène sa carrière avec des clones de jeux comme Centipede, Defender ou Missile Command. La différence avec les autres, c'est qu'il ne peut pas s'empêcher, dès son premier jeu d'y apporter une touche de folie, pour le meilleur et pour le pire. J'espère que vous aimez les lamas, chameaux et autres animaux à poils car il en met à toutes les sauces, surtout là où on ne s'y attend pas. Ce n'est pas pour rien que son titre le plus connu est probablement Attack Of The Mutant Camels et que les joueurs Xbox360 se souviennent probablement d'un épileptique Space Giraffe (non inclus dans cette anthologie). Jeff a aussi une grande habitude de rendre ses jeux excessivement difficiles, soyez prévenus.

Venez découvrir mon lama !

Llamasoft : The Jeff Minter Story retrace toute la vie de Jeff Minter de ses débuts jusqu'à ses jeux Atari Jaguar. Dommage que la suite de son oeuvre ne soit que rapidement évoquée, mais on s'éloigne alors du rétrogaming donc ce n'est pas étonnant. Ça fait tout de même un bon paquet d'année et un total de 42 jeux jouables. Bien entendu il y a souvent plusieurs versions d'un même jeu, mais les différences sont parfois assez importantes. On se désolé bien entendu que la sélection ne soit pas exhaustive et que certains jeux parfois évoqués dans les interviews ou autres documents ne sont pas toujours jouables. C'est le cas par exemple de Trax et de Defender 2000 (pour ce dernier c'est clairement un problème de droit). On aurait également aimé avoir à minimum tous les jeux Atari ST qui sont des versions plus récentes et modernes mais il s'agit probablement d'une contrainte technique. D'ailleurs c'est étrange que ces jeux soient proposés dans des versions émulées sur Jaguar (une émulation d'émulation donc) plutôt que directement. Rassurez-vous ça ne change pas grand-chose pour vous au final. Quoi qu'il en soit la sélection reste large (on est loin de la collection Karateka qui ne comptait que 4 ou 5 jeux). On vous prévient toutefois, une part non négligeable de ces jeux est surtout ici dans un esprit de préservation et d'histoire plutôt que pour des qualités ludiques encore valables de nos jours. La jouabilité des titres en particulier a pris un petit coup dans l'aile. Mais il reste toutefois des titres amusants, et pas forcément ceux auquel on s'attend le plus.

Un gros bonus

En plus des jeux traditionnels, cette compilation propose également de vous essayer à un autre élément de la carrière de l'auteur : les Light Synthesizers. Si vous n'avez pas connu à l'époque ça ne vous dit probablement rien et pourtant il s'agit tout simplement de générateurs d'images. L'un de ceux là - Neon - a tout simplement été intégrés à la Xbox360 pour mettre en lumière les écoutes d'album CD. La compilation propose d'essayer Psychedelia et ColourSpace, modifiés pour un usage plus simple à la manette et livrés avec une petite série de musiques électroniques. A noter que ces générateurs sont si importants pour Jeff - adepte de la synesthésie - qu'ils sont à la base même du moteur de ses jeux modernes. Comme pour le premier volume basé sur Karateka, Llamasoft : The Jeff Minter Story propose également un bonus intéressant pour les fans, à savoir une version moderne du plus gros hit de la société : Gridrunner. Cette version appelée Gridrunner: Remastered propose des graphismes entièrement refaits et plein de couleurs fluos en surcouche d'un jeu inchangé (c'est la version Commodor 64 qui est dessous). D'un point de vue strictement personnel ce n'est pas un jeu que j'adore particulièrement à cause d'une difficulté extrême, mais les fans apprécieront. A noter que la fin du documentaire embraye sur une petite promotion d'un autre documentaire (vidéo cette fois) appelé Heart of Neon dont vous pourrez trouver le site officiel ici : : : H E A R T o f N E O N : :

Mon avis à moi

Sans surprise, Digital Eclipse poursuit sa saine lancée d'archivage et de vulgarisation de l'histoire du jeu vidéo. Si le thème de ce volume est peut-être moins fédérateur que celui sur Jordan Mechner, il n'en demeure pas moins intéressant en mettant en lumière une icône du jeu vidéo britannique forcément un peu moins connu chez nous. Llamasoft : The Jeff Minter Story saura captiver les fans d'archéologie vidéoludique avec ses jeux non consensuels à mille lieux de la masse de l'époque.

A qui s'adresse Llamasoft : A Jeff Minter Story ?

- A ceux qui veulent découvrir le savant fou adorateur de lamas

- A ceux qui souhaitent découvrir les coulisses de cette époque

- A ceux qui n'ont pas peur de jeux difficiles et peu accessibles

A qui ne s'adresse pas Llamasoft : A Jeff Minter Story ?

- Aux camelidaephobes

- A ceux qui aiment finir leurs jeux

- Aux épileptiques

Johann Barnaud alias Kelanflyter