J'ai eu énormément de mal à mettre en forme mon propos, vous m'en excuserez. Tout ce palabre n'est là que pour dire, "je ne bande plus que sur les graphismes...il me faut une DA et un gameplay cohérent avec l'univers et j'oublie la technique"
« Beauty lies in the eye of the beholder » c'est ainsi que ce cher Oscar Wilde aurait résumé ce que je m'apprête à développer. Comme d'habitude, je ne prends pas ma plume numérique de manière innocente, non. Je suis soufflé, mes amis. Soufflé de constater que je perds la vue. Ma perception de la qualité graphique est désormais obsolète. C'est donc avec une vraie amertume que je fais le deuil de mes yeux.
Bon je dramatise et je vais également retirer cette dernière phrase (il s'agirait de ne pas se porter la poisse). Le fait est pourtant que depuis quelques années maintenant, il y a un point sur lequel je tombe presque de systématiquement en désaccord avec mes comparses gamers (oui vous qui lisez cela sans vraiment lire). Ce point de discorde est tout simplement la partie graphique du jeu. Pour être parfaitement précis, ce que j'entends par partie graphique contient uniquement le monde du jeu, les personnages, les décors et effets spéciaux, en bref tout ce qui est à l'écran et qui ne tient pas de l'interface. Encore une fois, veuillez m'excuser de ne parler que de mon point de vue de joueur console, même si j'évoquerais quelques jeux PC. De même je m'intéresse ici aux jeux en 3D (la 2D étant maîtrisée suffisamment depuis belle lurette et beau luron).
Ouais c'est beau! Mais il y a pas de DA! Comment ça on s'en fout?
Je discernerais deux types de beauté en ce qui concerne les jeux vidéo. La partie artistique qui, à l'instar des goûts pour les femmes (ou les hommes), est purement personnelle, même si toutefois on pourra parfois dire que quelque chose est globalement de mauvais goût ; j'aime les blondes avant tout, chocolat, kolia, jamesismad (et j'en passe) préfèrent les rousses (ces satanistes). Il ne faut pas pour autant leur jeter la pierre. Cependant en jeu vidéo, il y a une composante presque aussi importante que la direction artistique, mais qui pour beaucoup passe avant, c'est la partie technique.
Je concède donc que même si je ne suis pas plus flatté au niveau de la rétine que cela par El Shaddai, certains y trouveront leur compte. De la même manière si je conçois Mass Effect comme un jeu superbement designé, certains n'apprécieront pas forcément. En revanche, la partie technique est beaucoup plus ouverte à débat et de ce point de vue, j'ai l'impression de globalement ne plus vraiment suivre les tendances pour la simple raison que ça y est, je suis satisfait du niveau graphique tel qu'il est sur cette génération. Voilà pourquoi...
L'apparition de la PlayStation et de la N64 a donné l'occasion de passer (vraiment) à une 3D moche et sommaire (oui, oui on oubliera les tentatives immondes faites précédemment). Granuleuse chez Sony, trop lisse chez Nintendo , même si à l'époque on était soufflé par un Ridge Racer, un Crash Bandicoot ou un Ocarina of Time, il faut bien admettre que le poids des ans a vraiment fait son office. Les jointures immondes entre les articulations, l'aliasing à pleurer, le brouillard constant pour cacher les distances d'affichage à chier...seuls quelques jeux s'étaient départi de ces limitations pour en faire quelque chose de lié à l'univers (comme Silent Hill ou le Spider-Man de Neversoft). Au global, presque aucun jeu n'aura survécu aux outrages du temps. On peut éventuellement sauver FFIX, Oddworld: Abe's Odyssey, Mario 64 qui encore aujourd'hui ne demande pas des efforts insurmontables pour être rejoué.
Hum! C'est très moche!
La génération suivante a montré une large amélioration sans aucun doute. La puissance a permis notamment d'élargir les univers, de rajouter des détails à foison et globalement de gommer certains bugs techniques très chiants comme les textures mouvantes de la PlayStation et les caméra parfois miteuses de la N64 (et de la PlayStation aussi d'ailleurs). Surtout, et c'est là le point le plus important de ce billet, cela a été l'occasion de délivrer l'artistique de sa prison technique. Je sais que beaucoup d'entre nous ont été avant tout sidéré par le passage entre 2D et 3D et croyez-moi, je suis également de ceux là. La première fois que j'ai posé les yeux sur Tomb Raider, alors que j'avais joué pendant des années sur ma MegaDriveII, j'ai comme tout le monde arrêté de respirer, en écarquillant mes yeux pleins de « WTF ?! ». Cependant, la claque initiale passée, j'ai rapidement trouvé certaines choses très gênantes et ce malgré mon jeune âge au moment de la génération 32/64 bits ; le premier exemple qui me vient à l'esprit sera notamment les shaky-head qui servaient à indiquer au joueur qui était en train de parler lors des cinématiques (dans MGS, RE etc...).
Au delà du doublage nanardesque, le plus drôle c'est les "shaky-head" pour qu'on sache qui parle.
La génération PlayStation2 a donc apporté (pour le monde de la console toujours) un gap technique impressionnant qui a transformé des bouillies de polygones goro-shadés en vrais personnages. On pourra discuter de l'histoire de l'imaginaire etc. Mon ressenti reste le suivant ; prenez un jeu PlayStation, à l'époque de la PS2, c'était dégueulasse. Prenez un jeu PS2 à l'ère HD, la plupart du temps on a pas besoin d'abstraction particulière pour y retrouver la beauté qu'on y avait vu sur le moment. A ce titre, je tiens à féliciter Naughty Dog notamment qui avec sa trilogie Jak&Daxter est parvenu a faire des jeux sur lesquels le temps n'a pas d'emprise. Seul l'affichage de la PS2 sur écran LCD de taille moyenne à grande est gênant ; pour le reste 11ans plus tard, le premier Jak reste un jeu magnifique, vaste, coloré et d'une fluidité sans faille.
Malgré tout, cette génération avait un léger manque de boost pour atteindre un certain réalisme visuel. Même si quelques jeux sont encore aujourd'hui hallucinant techniquement pour la puissance proposée (Resident Evil 4 ou Wind Waker sur Gamecube, Silent Hill 3 sur PS2 ou Splinter Cell Chaos Theory sur Xbox) les textures, certaines animations ou affichages lointains souffrent d'être sur des machines à bout de souffle...ça reste beau, mais on avait encore besoin d'un peu de puissance pour que cela devienne moins pixélisé et plus ouvert en restant beau.
Un développeur qui n'a pas peur de salir sa technique peut faire des miracles. Un jeu avec de la personnalité et qui n'est pas basé sur la prouesse technique pure reste beau.
Et puis vient cette génération. C'est là que commence réellement mon propos. Ce début de génération de console a pour moi trouvé le Saint-Graal ; la technique suffisante pour n'importe quelle direction artistique et n'importe quel game design. Je n'ai plus besoin de jeu plus beau que Splinter Cell : Double Agent. Bien entendu, ce serait mentir que de dire que je ne suis pas heureux de jouer à un jeu comme Batman : Arkham City une fois par an, qui se permet d'être une tuerie graphique, d'avoir un gameplay maîtrisé à 100% et du contenu à ne plus savoir qu'en faire. Seulement cette génération m'a apporté énormément de titres qui me resteront bien plus que les ténors de la technique comme Uncharted, Gears of War, Killzone, FFXIII, Crysis...d'autant que la plupart du temps, quand je trouve un jeu techniquement vraiment avancé, le reste ne m'amuse pas plus que cela (ce n'est pas une règle mais ça se vérifie assez régulièrement, puisque les graphismes doivent être montrés, ils ont coûté cher vous comprenez. C'est là qu'est le problème de la course technique d'une manière général.
Parfois il y a des jeux qui ont tout...
Faire un beau jeu, c'est un investissement. Le marketer pour que cet investissement soit rentable, c'est aussi un investissement. Quand l'argent fourni passe déjà beaucoup par là, ça en fait forcément moins pour faire un bon jeu. Kojima en a fait les frais sur son MGS4 qui pour le moment de sa sortie devait en plus montrer la PlayStation3 sous son meilleur jour alors qu'elle peinait à convaincre sur le multi-plateforme. Résultat, MGS4 est très jolie, mais le level-design et les innovations manquent cruellement d'inventivité qui d'ailleurs se retrouvera sur Peace Walker, un épisode qui n'avait pas besoin d'autant pour briller.
Oui aujourd'hui je me contenterais largement de ça pour peu que le reste soit vaste et avec un contenu sans fond.
Le propos ici n'est pas de dire que les graphismes, ça n'est pas important. Ça c'est l'excuse du pauvre pour justifier que la Wii visuellement c'est trop daté (je parle surtout en terme d'affichage). Ce que je voulais exprimer ici, et c'est un peu dans la continuité de mon coming-out sur le spectaculaire, c'est que l'esbroufe graphique n'est plus vraiment un facteur d'appréciation pour moi tant que le jeu ressemble à la première vague de cette génération ; tout simplement parce que je pense qu'il n'en faut pas plus pour que des univers, vastes ou linéaires, soient rendus de manière à faire honneur à la direction artistique. Si ça ne tenait qu'à moi, on resterait à ce niveau pour se concentrer sur la finition (je me place toujours du point de vue du joueur console) : éliminer les temps de chargements, l'aliasing, le tearing et surtout pousser le contenu et par conséquent la cohérence des univers beaucoup plus loin. Les deux peuvent aller de paire quand le studio est soutenu financièrement, mais si pour de plus petites boîtes, on devait sacrifier quelque chose, je préférerais que ce soit les graphismes de Crysis, que le contenu de Skyrim. Si la génération suivante ne m'éblouit pas visuellement avec sa technique, mais plutôt dans la recherche de sa direction artistique, des environnements, des IA et du contenu, je ne m'en porterais pas plus mal.