Les jeux de guerre ont beau avoir le vent en poupe ces dernières années, il n'en demeure pas moins que leur approche du conflit ou encore des questions morales liées aux actes du joueur restent proches du néant le plus total. Comme aucun jeu de guerre ne le fait, Spect Ops The Line propose au joueur, en toute subtilité, de rélféchir à ses actes en tant que personnage du jeu certes, mais surtout en tant que joueur devant son écran.

Si la presse pleure souvent, du moins relève souvent le manque de maturité de ce média qu'est le jeu vidéo, c'est sans compter sur les notes qu'elle assigne à certains jeux, les COD en tête. En sachant pertinemment que le grand pubique, à savoir le gros des consommateurs, s'appuye sur les tests et la pub pour acheter des jeux, je pense qu'il faudrait soutenir les jeux qui le méritent avant de manifester un manque de maturité du média. Personnellement je ne me fie ni aux tests ni aux pubs pour acheter un jeu, alors j'ai eu la chance de vivre cette expérience vraiment, vraiment unique.

Spec Ops The Line vous propose de suivre une escouade de trois personnes, dont vous, Walker, dirigeant celle-ci. Vous êtes envoyés à Dubaï, alors complètement dévastée par des millions de tonnes de sable, à la recherche de survivants de la tempête à l'origine du désastre. Je m'arrêterai là pour le contexte tant je ne veux absolument rien spoiler.

 

Ce qui m'a frappé dans ce jeu, d'une part, c'est la magnifique qualité visuelle (ceux qui se plaignent ne pensent pas à réger leur TV, car le jeu est parfois vraiment sublime). Plusieurs fois je me suis arrêté rien que pour contempler les gratte-ciel entourés de millions de tonnes de sable sous un soleil de plomb. Le artistes s'en sont donnés à coeur joie, et le résultat est vraiment sublime. D'autant plus qu'au fil de l'histoire, le jeu exploite une large palette de couleurs, contrairement à ce que l'on pourrait croire.

Au delà de l'ambiance visuee, l'ambiance sonore est tout aussi soignée, voire plus encore. C'est simple, c'est quasi parfait. Le mixage est au poil (coucou Enslaved avec le niveau sonore des cinématiques trois moins élevé que celui in game), les bruitages criants de réalisme, et les doublages excellents en VO comme en VF. Mention spéciale aux tempêtes de sable.

Ajoutez à cela un gameplay propre et net, de belles animations, et des situations de gameplay intéressantes, et vous obtiendez de très bons ingrédients au service de la grande force du jeu : la narration.

Ce gameplay, et ces ambiances visuelle (réglez votre TV, je n'insterai pas assez) et sonore de grande classe façonnent une atomsphère comme on en voit très, très rarement dans un jeu vidéo. Elles sont au service de la narration, et c'est bien la narration le point fort du jeu. L'escouade de la fin du jeu n'a rien à voir avec celle qui commence le jeu. Les personnages vont évoluer, clairement. La psychologie des trois personnages la composant est au centre du jeu, et il en va de même pour la relation entre ces protagonistes. Que ce soit dans leur comportement ou dans leurs paroles, il y a un vrai souci du détail, beaucoup de crédibilité.

Les trois bonhommes se rendront vite compte que la réalite n'est pas ce qu'ils croyaient, mais c'est surtout le joueur qui vivra une expérience grisante. Car si les choix au cours de la trame narrative mettront Walker, le personnage incarné, devant sa propre conscience...c'est le joueur qui est directement interpellé. Rarement un jeu l'aura aussi bien fait. Rarement. A la différence de nombres de jeux proposant un système de choix binaire à la "Faites Ceci pour faire le bien"/"Faites Ceci pour faire le mal" (inFamous, GTA...), Spec Ops The Line brouille cette ligne et parvient à jouer avec la psychologie même du joueur. Le jeu pose certainement quelques questions quant au côté humain des conflits militaires, mais il pose surtout les questions aux joueurs. Celles lui demandant qui il est vraiment en tant que joueur pendant qu'il joue au jeu, dans le feu de l'action, à chaud. Et le fait réfléchir. Subtilement. A quoi ça rime de tuer?  Pourquoi le fait-il à la chaîne? Pourquoi n'arrête-t-il pas? Est-il une bonne personne? Peut-on justifier des atrocités? La fin justifie-t-elle les moyens? Et moi, qui tiens la manette....est ce que ça me fait plaisir de tuer des gens dans un jeu?

Toutes ces questions à la limite de la psychologie du joueur et du personnage incarné impliques d'autant plus le joueur à mesure de l'histoire, puisque le joueur sera poussé à prendre des décisions non pas en tant que Walker, mais en tant que joueur. Et le jeu se montre intelligent en cela qu'il ne présente pas bêtement les choix possibles au joueur. Au contraire. Le jeu ne dit rien. Aucune indication visuelle ou autre. C'est au joueur d'agir comme il le décide. C'est cette ligne là dont parle le jeu. La ligne entre ce que voudrait faire le joueur, en tant que joueur, en tant que personnage incarné, et ce qu'il fait vraiment en tant que joueur. Et le jeu n'indique pas au joueur si le choix effectué a été le bon. Car...y a-t-il un bon ou un mauvais choix? Et puis déjà...y avait il vraiment un choix à faire? Et pire encore...avait-il vraiment le choix?

 

Loin des jeux au scénario banal et sans intérêt à coups de marketing désolant, Spec Ops The Line écrase quasi tous les jeux de la génération sur le plan narratif impliquant le joueur. Subtil et grisant, il met le joueur en face de sa propre conscience au delà du personnage qu'il incarne. L'interpelle directement. Dépeint certaines horreurs de la guerre, et pousse le joueur à la réflexion. Le jeu réussit avec brio à mélanger mise en scène appuyée, direction artistique atypique et maîtrisée, ambiance sonore de haute volée, doublage réussits à la fois en VO et en VF, gameplay propre, mais surtout, un scénario impliquant vraiment le joueur, une psychologie des personnages extrêmement travaillée, qu'elle soit off ou in game. C'est clairement un chef d'oeuvre dans ce qu'il fait de mieux, et pour cela, il mérite toute l'attention des joueurs, surtout ceux qui cherchent à analyser les jeux vidéo plus qu'à y jouer juste pour y jouer. Un vrai chef d'oeuvre narratif, et un grand jeu tout court. Merci Yager. Vraiment.