Ico et Shadow of the Colossus ne sont pas des chefs d'oeuvre. Voilà, c'est dit. bonsoir à vous !... Un chef d'oeuvre, c'est une oeuvre maîtrisée de bout en bout. Ueda lui sait très bien raconter des histoires. Ça ok, il le fait mieux que personne dans le jeu vidéo. Par contre niveau gameplay, c'est déjà moins convaincant, et pareil pour l'aspect graphique.

Les deux jeux sont beaux et faiblards à la fois. Pourquoi des textures aussi pâles, comme délavés, comme si c'était mon téléviseur qui avait des difficultés à afficher les couleurs ? Pourquoi ce soleil hyper lumineux qui fait que parfois on ne voit strictement rien de ce qu'il y a à l'écran et c'est juste gonflant ? Ou ces zones super sombres où je dois alors monter la luminosité de mon écran comme dans les vieux Splinter Cell... Marque de fabrique ? Faudrait penser à la changer. À côté de ça, Ueda pond des personnages bien modélisés, avec une animation gracieuse qui fout le honte même à la gen actuelle, des personnages auxquels on accroche facilement, puis des colosses magnifiques, puis des créatures de l'ombre façonnées de manière ingénieuse... Mais les décors... vides. Les plaines de Shadow of the Colossus, désolé mais c'est juste du vide, et le joueur après peut à loisir penser que c'est poétique, mais les décors, concrètement, ne véhiculent rien. Y'a des lézards, des tortues, des colombes, des faucons, tout ça passe limite inaperçu. En rajoutant une faune un peu plus voyante, le jeu n'aurait rien perdu, au contraire même. Mais là c'est vide. Ico, encore pire ! C'est quoi ce château qui est juste un prétexte à une énigme géante ? Avec un moulin à eau au milieu, on ne sait pas pourquoi...

Niveau gameplay, Ico est une blague. La seule fois où j'ai bloqué, c'est parce que je ne savais pas que l'action était possible. Sinon, non. Il dure environ 6 à 7 heures. Il m'a fallu un mois pour en venir à bout, faute à une première moitié de jeu super chiante à cause de combats approximatifs et frustrants, faute à des énigmes qu'on résoud sans réfléchir, juste en parcourant les niveaux la solution vient d'elle-même, faute à cette facilité qui fait que lorsqu'on meurt (en ratant un saut approximatif par exemple), ben je lâche l'affaire. Évidemment, lorsque la facilité d'un coup me résiste (et bêtement en plus), je boude. Comme pour le Prince of Persia cel-shadé, il ne donne pas envie de s'investir. Il n'y a pas de défi. Alors quand il me punit bêtement par un saut à l'alignement biaisé, ou quand j'en ai marre de sauter quinze fois de suite avant que mon bonhomme s'accroche enfin à une foutue barre juste au-dessus de moi, je suis suffisamment agacé pour laisser le jeu prendre la poussière durant une semaine.

Shadow of the Colossus, c'est déjà nettement meilleur. Certes il y a deux ou trois colosses assez gavants du fait qu'on a besoin du cheval, et alors ça devient brouillon et approximatif, mais on a des sensations de jeu réelles, je m'amuse quoi, le jeu me résiste de façon saine. Mais comme Ico, SotC est en fait trop dépouillé niveau gameplay. C'est vrai qu'on fait toujours la même chose. À la limite dans SotC, au moins chaque cas de figure est différent, là où dans Ico ce sont des énigmes bas de gamme avec des mécaniques archi-connues du début à la fin, avec en plus des combats pourris dont je me serais parfaitement passé. Dans SotC, il manque de la plateforme. Des fois il y en a, mais pas assez, et encore une fois ça n'aurait rien enlevé au jeu, ça aurait rendu l'aventure plus consistante. Là on se rend d'un point A à un point B, tout le temps. Des fois on se perd, on tourne en rond, on trouve un autel et on cherche à attraper le lézard. Mais c'est tout.

Mais oui c'est sûr, Ueda sait raconter des histoires. Pas originales en plus, et c'est tant mieux ! Trois ou quatres cinématiques dépouillées, et tout le reste raconté ingame. Dans Ico, un petit garçon aide une sylphide diaphane à s'échapper d'un château. Dans SotC, un aventurier pose sa... compagne ? morte ou ensommeillée sur un autel et part tuer des colosses pour lui rendre la vie (ou la conscience ?). C'est tout. Pas de backgroung à la con, de psychologie de comptoir, de mobiles et intentions expliquées en long et en large. L'essentiel est raconté par quoi ? La qualité inouïe des animations. Dans Ico, le petit garçon est vigoureux, téméraire, et la fille maladroite, craintive. Et tout ça on le devine juste à l'animation des personnages. Dans SotC, le vagabond si léger qu'il en est presque aérien combat des colosses puissants qui pourraient l'écraser facilement. Alors oui il gagne notre vagabond, mais jamais on n'a l'impression qu'il est le plus fort. C'est un David contre seize Goliath, pas un Kratos qui mange du dieu grec au petit-déjeuner. Et encore une fois, tout ça est raconté juste par l'animation. Des scènes très clichées deviennent alors poignantes, deux histoires mille fois racontées deviennent un vrai plaisir à suivre.

À noter que pour SotC (pour Ico je ne sais pas), la refonte HD est salvatrice. Profondeur de champ facilement doublée, clipping toujours présent mais plus loin dans le paysage, frame-rate enfin décent, et possibilité dans les options de faire des réglages permettant un meilleur contrôle de la caméra. Un vrai coup de jeune.

Les jeux d'Ueda me charment et m'agacent en même temps. Oui, c'est beau, et quelle grâce, quelle finesse pour raconter avec une telle justesse ces deux histoires de couple, pour les raconter avec des petits riens qui veulent dire beaucoup. Mais à côté, des frustrations de gameplay, des choix graphiques que je ne parviens pas toujours à comprendre et qui m'agressent l'oeil, des décors trop dépouillés pour véhiculer quoique ce soit à part un sentiment de vide, et pas de vide poétique, de vide réel, de manque en gros. Si au niveau du gameplay SotC a pour lui seize colosses avec chacun une identité propre, avec une aura, voire peut-être même une âme, Ico lui m'a paru franchement faiblard en dehors de son histoire.