Bonne Année! Comment? On est déjà en Avril? Je suis si à la bourre que ça? Bon...On va essayer de rattraper le temps perdu via ce retour sur toutes les nouvelles séries que j'ai pu découvrir en ce début d'année, malgré un planning disons...chargé (merci Sommergeeks!). Pas de top cette fois-ci, mais des catégories qui, je pense, parleront d'elles-mêmes...
Catégorie "je crois que j'ai perdu une heure de ma vie pour rien"
Reprendre des personnages de classiques de la littérature pour se les réapproprier, ça peut donner de bonnes surprises, Pandora hearts en étant l'exemple le plus récent. Mais comme pour tout phénomène de mode, on trouve toujours des éditeurs opportunistes qui vont vous sortir des titres de seconde voire de troisième zone, en priant pour qu'ils trouvent leur public sur un malentendu. C'est le cas pour Lost seven, une courte série (4 tomes), dont les 2 premiers volumes sont sortis chez Doki Doki, tout comme Are you Alice? chez Kaze, qui se terminera en 12 tomes . Les 2 icônes maltraitées ici sont Blanche Neige et Alice, embarquées pour la première dans un récit Héroic Fantasy bancal à grosses ficelles qui pioche un peu partout pour cacher son abyssal ininterêt, et pour la seconde,
dans un énième death gae qui n'apporte rien au genre et reste très brouillon dans sa narration. Puis Alice en garçon, ça casse un peu le mythe... Après avoir pleuré sur la tombe de L. Carroll et des frères Grimm, penchons nous sur le cas du nouveau survival en 3 tomes de chez Soleil Abyss, qui n'a rien à voir avec le film culte de J. Cameron, que ce soit dans son contenu ou dans sa qualité, jugez plutôt: un jeune garçon se réveille seul dans un souterrain labyrinthique avec une télécommande à la main dont il va vite comprendre qu'elle lui donne des pouvoirs, bien utiles pour éliminer le vilain monstre qui bloque la sortie. Originalité? zéro. Personnages? Caricaturaux. Suspense? Aucun. Next... Re/member chez Ki-oon complète le trio survivaliste et bien qu'il soit un cran au-dessus des 2 autres, ma patience vis à vis de ce genre de production arrive à son terme: trop, c'est trop, cette mode doit cesser, sous peine de gaver le lecteur définitivement! Dommage, car le titre n'a rien de fondamentalement mauvais, avec son coté Un jour sans fin version macabre mixée avec Ring. Mais rien de mémorable non plus...
Catégorie "ça plaira pas à tout le monde, mais sur un malentendu..."
Le problème avec l'originalité, c'est que ça ne plaît pas à la majorité, ça se saurait, et Shueisha ne vendrait pas ses shonens par millions... La preuve en est avec L'ère des cristaux, un seinen ô combien étrange avec ce postulat de départ: dans un lointain avenir, l'être humain n'existe plus en tant que tel mais s'est réincarné en cristaux humanoïdes dont le caractère est le reflet de sa composition ( Ex: Diamant est dur mais sensible), dont l'avenir est mis en danger par les Séléniens, un peuple lunaire adorateur des pierres précieuses. Vous avez dit étrange? C'est certain, mais une fois le postulat de départ intégré, découvrir tout à tour les différents personnages, au design épué et quasi-asexué, donne une lecture en apesanteur dont on ressort avec une agréable sensation d'apaisement. Sensation qu'aimerait éprouver Mitsuki, le héros malheureux de l'OVNI Anus beauté, une série en 2 tomes au sujet scabreux: les hémorroïdes! Un sujet improbable, que l'auteur réussit à parfaitement intégrer dans un triangle amoureux classique: le garçon au secret inavouable, amoureux de la plus belle fille du lycée, aidé dans sa quête libératrice par une apprentie proctologue paradoxalement coincée du c....Drôle sans tomber dans la vulgarité, avec une vraie fonction éducative sur un sujet pas évident, voilà un titre qui mérite son buzz! Ce qui n'est pas tout à fait le cas du voleur d'estampes: ce global manga, prévu en 2 tomes, prend le parti graphique de raconter son histoire sous forme d'estampes japonaises, un challenge plutôt réussi, bien que ça fige un peu l'action. Plus gênant, c'est son contenu, avec une histoire de Robin des bois asiatique, menant la vie dure au vil gouverneur. Ce dernier souhaite marier sa fille de force pour satisfaire ses propres ambitions, mais cette dernière ne l'entend pas ainsi et voit dans le voleur un échappatoire au charme indéniable... Une prise de risque minimale qui ne satisfera que les plus romantiques d'entre vous. La romance écolière, c'est ce que laisse augurer la couverture du dyptique de chez Casterman, Le monde selon Uchu, mais ce serait bien réducteur, puisqu'il est question ici de prise de conscience brutale du personnage principal qu'il est...dans un manga! Une mise en abymes dont découlent une multitude de questionnements de notre héros malgré lui et sur ses compagnons au destin qu'ils n'ont pas choisi. Menant une réflexion sur notre position de lecteur-despote, l'auteur varie les plaisirs, passant de l'humour au drame avec égal bonheur. Dommage que le style de l'auteur ne soit pas aussi fin que son propos, mais ça ne rend pas la lecture désagréable, loin de là.
Catégorie "Reviens en deuxième semaine"
Il est des séries dont le potentiel ne saute pas immédiatement aux yeux, mais qui se révèlent bons sur la durée. Hawkwood, le seinen historique de Doki Doki en fait partie, car la lecture du premier tome m'avait laissé sur ma faim, bien que le dessin soit agréable et le choix de raconter le destin d'un mercenaire "chevaleresque" en pleine Guerre de 100 ans piquait ma curiosité. La faute à un déroulement bien trop classique pour surprendre. Mais le second tome a fini de me convaincre du potentiel de la série dont l'intrigue rebondit de manière plutôt bien vue. Terminée en 8 tomes au Japon, cette série pourrait se révéler être un solide divertissement médiéval au final. Tout comme le manhua Oldman, dont la couverture m'a charmé immédiatement, aidée par ce au synopsis énigmatique : une reine, dont la beauté et la jeunesse permanentes interrogent, garde emprisonné un homme aux capacités étonnantes. Mage? Escroc? Prestidigitateur? Personne ne sait... Mais quand ce dernier s'échappe et cherche à se venger de sa geôlière, aidé d'une femme-tronc revancharde et d'un anatomiste lubrique, une chasse à l'homme s'organise... Ca part un peu dans tous les sens, entre comédie burlesque, baston débridée et mystères multiples, mais la curiosité sur la suite des événements l'emporte, aidé par une patte graphique à la hauteur. Dommage que l'édition pêche, avec une impression floue du plus mauvais effet...Tout comme la lecture du premier tome de Beyond evil, court seinen de Kaze, qui ne m'avait pas convaincu, avec son héros-boyscout découvrant les bas-fonds de Tokyo où des humains passent des contrats avec des démons par appât du gain, en échange de leur vie. Une énième revisite du mythe de Dante qui accumulait les personnages agaçants et les situations convenues, avec des abus graphiques (trop de trames!) gênants. Heureusement que le second tome sorti en même temps corrige certains défauts et développe un scénario plus complexe qu'il n'y paraît, mais un doute subsiste pour la suite. Autre série qui m'a laissé perplexe après avoir refermé son premier volume, c'est Anguilles démoniaques, polar en 3 tomes chez Komikku. Enfin, polar...c'est ce que laisse penser le 4ème de couverture, avec cette histoire de trafics étranges menés par un colosse au coeur tendre qui ne sait pas dans quoi il s'est embarqué. Mais ce serait franchement réducteur vis àvis du récit, car on y voit davantage la transformation mentale et physique d'un homme au contact d'un charismatique prêteur sur gages aux intentions troubles. Intriguant, tout cela...Un peu comme la couverture de Soul keeper, dernière production de Tsutomu Takahashi (Sidooh, Alive, Bakuon rettô), photoshop indigne et repoussant qui ne rend pas hommage au travail de cet auteur de grande qualité. Il nous séduit encore ici avec cette histoire de fantôme obligé de retourner sur Terre pour bonifier son âme, mais qui voit sa tâche compliquée par la personne qu'elle doit protéger, rien de moins que le Premier Ministre japonais, en proie à des problèmes de santé et mis en difficulté politiquement! Une banale histoire d'ange gardien, me direz vous? Peut être, mais trop de mystères s'accumulent pour ne pas titiller la curiosité du lecteur sur la suite des événements, et comme l'auteur maitrise graphiquement, vivement la suite!
Catégorie "Dessine moi un blockbuster"
Difficile de passer à coté de certains titres mis en avant massivement par leur éditeur, à la limite du matraquage parfois. Parlons donc un peu du phénomène One-Punch Man, nouveau mastodonte shonen aux chiffres de vente boostés par un bouche-à-oreille flatteur. Après la lecture des 2 premiers tomes, j'avoue m'interroger un peu: c'est beau, bien rythmé, le concept du super-héros blasé trop fort pour ses ennemis est plutôt bien vu avec des passages franchement drôles, mais pour le moment, je n'arrive pas à être totalement emballé, faute d'un fil conducteur accrocheur qui tarde à venir. Mais j'ai bon espoir, car tout est là pour obtenir une perle. Un peu de patience, donc... Pour ce qui est de My Hero Academia, on navigue en terrain connu, avec un jeune garçon né sans pouvoirs dans un monde peuplé de super-héros (décidément!), dont le fol espoir est d'en devenir un malgré tout! Sa rencontre avec le plus fort d'entre eux va bouleverser son destin et va lui permettre d'intégrer la prestigieuse académie super-héroïque. Classique mais efficace, avec des personnages plutôt attachants, MHA est une introduction parfaite au shonen, à défaut d'être davantage pour le moment. Tout comme Q, série post-apocalyptique de Ki-oon en 3 tomes, qui ne tient pas toutes les promesses que son scénario et son statut de seinen laissaient présager. Je m'explique: l'abus de kawaiitude de l'héroïne (design mimi tout plein, qui craque pour un donut mais aux capacités destructrices redoutables) adoucit bien trop l'ambiance d'un récit au départ si sombre (une sphère extra terrestre terrorise les humains en larguant des monstres énormes dès que les terriens lèvent les yeux au ciel) pour rester un minimum crédible. Ajouté à cela un personnage principal masculin pétri de contradictions et des situations qui semblent n'être là que pour faire plaisir au lecteur, vous obtenez un petit divertissement qui ne devrait pas rester dans les annales, dommage.
Catégorie "les séries c'est bien, les one-shot c'est mieux"
On reproche souvent aux tomes uniques de manquer un peu de consistance, faute de place pour developper les personnages et l'intrigue. Rien de tout ça dans Snegurochka, formidable récit d'espionnage dans la Russie stalinienne des années 30, où l'on suit la recherche douloureuse d'une mystérieuse vérité pour Belka, une handicapée à la volonté inébranlable et Shchenok son serviteur à la santé précaire. Un "couple" obnubilé par une datcha appartenant au régime dont les secrets vont les mener aux 4 coins d'une Russie malmenée par les travers d'un état autoristariste. Un bel ouvrage magnifié par le dessin de Samura, l'auteur de L'habitant de l'infini, qui sort des sentiers battus. Tout comme le mangaka Syoichi Tanazono dans son manga auto-biographique Sans aller à l'école, je suis devenu mangaka chez Akata, dont le but n'est pas de pousser les enfants à faire l'école buissonnière, mais de démontrer que le système scolaire n'est pas forcément adapté à tous, et que l'on peut choisir une autre route sans que l'échec soit au bout. C'est le cas ici de notre petit écolier qui fait un blocage dès qu'il entre dans la classe, ce qui oblige ses parents à envisager d'autres alternatives pour l'éducation de leur fils malgré une pression sociale qui les pousse à revenir dans le "droit chemin". Un récit fort, à la lecture fluide, juste alourdi par certaines séquences superflues qui auraient dû laisser la place à des explications un peu plus fournies sur certains pans de l'histoire, ce qui laisse un petit goût d'inachevé dans la bouche. Ce qui est loin d'être le cas avec Ritournelle, très belle oeuvre en couleur chez Komikku se déroulant dans un couvent, où l'on suit les destins contrariés de différentes soeur: l'une, brillante et promise à un grand avenir parmi l'institution mais dont le coeur recèle des failles bien difficiles à combler, et l'autre, pupille abandonnée en admiration devant la première aux multiples questions sur sa propre utilité en ce bas monde. Le trait d'Ikebe, magnifié par une mise en couleur au diapason, respire le calme et la douceur, et suivre le quotidien pas si austère qu'on pourrait l'imaginer de ces jeunes filles en quête de sens se révèle passionnante à plus d'un titre. Une très jolie découverte, en tout cas.
Catégorie "A tout seinen, tout honneur"
Le grand écart: telle est l'idée qui me vient à l'esprit quand je vois les différents seinens peuplant cette catégorie, démontrant (s'il le fallait) la richesse de l'univers manga. Commençons par Black bullet et son action survitaminée, à base de virus mutant transformant les humains en prédateurs dont seuls des agents travaillant en duos peuvent se débarrasser à l'aide d'armes spéciales et de capacités surhumaines. Rythmé, agréable à l'oeil mais assez classique dans le fond, ce titre comblera les amateurs d'action teintée de fan-service kawaii. Au contraire de Bienvenue chez protect, plongée interessante mais bavarde dans la réalité économique des maisons d'édition et des mangakas d'aujourd'hui, qui demandent à un conseiller un brin fantasque de trouver des solutions pour éviter le déclin. Un sujet casse-gueule auquel l'auteur apporte suffisamment de fraicheur pour ne pas étouffer le lecteur entre les diagrammes et les courbes de progression, et qui devrait passionner les économistes en herbe. Pas sûr que ce soit la tasse de thé de Ren, le jeune orphelin de l'adaptation manga du chef d'oeuvre Le Garçon et la Bête, une fort jolie fable initiatique narrant la rencontre improbable entre cet enfant et Kumatetsu, une bête colossale un peu bourrue mais au coeur tendre qui va prendre le jeune garçon sous son aile dans un monde peuplé d'animaux. Pour ceux qui n'ont pas eu l'occasion de voir le film, voici une belle introductionau travail de Mamoru Hosoda, où chacun de nos protagonistes s'enrichira et grandira au contact de l'autre. Dans la veine "récit initiatique", Père et fils propose sa version, celle d'un homme apprenant à être père en prenant soin de son fils après le décès de sa mère. Un apprentissage complexe pour cet herboriste habitué à parcourir les chemins pour soigner les gens. C'est d'ailleurs en voyageant, et au gré de rencontres enrichissantes, que cette relation père-fils se développera tout en douceur mais non sans difficulté. Bonne pioche pour KI-oon avec ce road trip prometteur, et qui double la mise avec Kasane la voleuse de visage, sombre thriller fantastique au coeur duquel tente de grandir une jeune fille pas gâtée par la nature et orpheline d'une superbe femme. Mais son apparence la contraint à la solitude malgré le soutien d'amies bien plus belles qu'elle. S'installe une forme de jalousie, qu'un mystérieux (miraculeux?) rouge à lèvres va finir de faire basculer notre anti-héroïne... Réflexion pertinente sur la beauté et la force des apparences, Kasane est une lecture agréable, plutôt bien illustrée et vite addictive! C'est une autre forme d'addiction qu'on découvre dans Deathco: celle du meurtre! Car Deathko n'a qu'un seul but dans sa vie: dézinguer tout ce qu'une mystérieuse organisation, la "Guilde", lui ordonne d'exécuter. Sorte de Léon version gothique, cette nouvelle oeuvre porte la marque d' Atsushi Kaneko (Soil, Wet moon, Bambi), avec ses personnages décalés et névrosés, et son ambiance suffocante digne des meilleurs pulps américains dont lui seul a le secret. Il faut juste accepter de se laisser porter dans ce grand 8 aux frissons garantis! Pour s'en remettre, on finira par cette vision sablonneuse de l'après-apocalypse, les enfants de la Baleine, du nom d'un immense callou/arche où vivent des humains doués d'un pouvoir basé sur leurs émotions, le saimia. Plus une malédiction qu'autre chose, puisque les possesseurs voient leur durée de vie largement rabotée, un destin funeste auquel Chakuro le jeune scribe s'est habitué. Mais son train-train quotidien va se trouver bouleversé par la découverte sur une île d'une jeune fille farouche qui a l'air d'en savoir long sur les mystères de ce monde... Avec son mélange tranche-de-vie/aventure/ecologie, LEDLB rappelle des classiques comme Nausicaa ou Nadia et le secret de l'eau bleue, tout en traçant sa propre voie qui, soutenue par un trait fin et délicat, invite au voyage et à la réflexion, un programme alléchant si la suite est du même tonneau!
Voilà, ce bilan trimestriel se termine avec une nouvelle fois de jolies pépites à découvrir! A très bientôt pour de nouvelles lectures nippones...