Bioshock: un jeu exceptionnel, encensé
par la critique, adulé par les professionnels du média qui en ont
souligné la maîtrise technique, chéri par les amoureux du jeu vidéo
qui eux ont été impressionnés par son design et son univers. Tous
ont acclamé un scénario, qui, bien qu'avare en paroles, offre tellement
plus que ce à quoi le jeu vidéo nous a habitué.
Mais moi ce que je retiens de Bioshock,
c'est sa musique. Dans Bioshock tout est musique. Chaque souffle du
héros, chaque message d'Andrew Ryan s'inscrit dans la musique générale
du jeu, créant ainsi une partition globale où chaque trémolo, chaque
crescendo vous prend aux tripes et vous bouleverse. Bioshock, c'est
la fugue de Bach manette en mains ! Un chrosome bondit, une goutte choit
et se noie dans l'immensité humide d'une flaque d'eau croupie, un Protecteur
vidé de sa vie s'effondre dans un bruit sourd ; chaque événement,
de la gouttelette perlant du plafond jusqu'à la mort d'une Petite sœur
est régi par cette partition.
Les développeurs sont à la fois
musiciens et compositeurs, tandis que le joueur n'est que l'instrument,
parcourant peu à peu la partition, découvrant chaque note d'un œil
nouveau. D'un angle jusqu'ici inconnu. Toute note jouée est amplifiée
par la caisse de résonance de l'instrument; ainsi chaque événement
a un écho particulier en fonction de l'instrument utilisé. Chaque
joueur voit dans Bioshock le reflet de sa propre folie. Le jeu est comme
un prisme nous renvoyant à nos peurs les plus profondes, les plus refoulées.
Nous devons accepter notre animalité pour avancer et chaque injection
d'Adam, nous rappelle que la limite entre ce qui est considéré comme
humain et ce qui ne l'est pas est mince et instable.
La fragilité de cette membrane protectrice
de notre humanité est là pour nous rappeler notre chance, elle remet
en lumière l'histoire d'Icare, mort en tentant d'approcher le soleil.
Bioshock nous montre le déclin d'une civilisation. Cette société
a sombré à cause de l'humanité de son créateur. Les idées utopiques
sont le propre de l'homme. Croire en un monde rose balayé par des zéphyrs
printaniers, un monde d'herbe grasse et de fleurs colorées est une
erreur et Bioshock nous aide à ouvrir les yeux sur la bêtise de notre
éspèce
Nietzsche l'a dit, l'humanité doit
évoluer pour survivre, elle n'est pas une finalité ni un aboutissement
mais bien un maillon de la chaîne de l'évolution. Le philosophe allemand
et moustachu, nous raconte cette évolution à travers le prophète
Zarathoustra, qui, pour accéder à l'état de surhomme, doit éclairer
ceux qui l'entourent et leur montrer la voie de la raison, mais cette
voie n'est pas plate et tranquille, elle est longue et sinueuse, parsemée
d'embuches et d'obstacles à priori insurmontables. Ainsi parlait Zarathoustra
nous conte l'histoire d'un homme parcourant le chemin vers l'état de
surhomme. A sa manière, Bioshock nous montre aussi le chemin pour s'élever
et accéder à la Vérité. Cependant, contrairement à Nietzsche, Ken
Levine nous promet l'exaltation et la transcendance de l'état humain
par la compréhension des faiblesses inhérentes au statut qui est le
notre. Pour surpasser notre humanité,il faut comprendre sa déchéance.
Jack et Zarathoustra se sont élevés
et nous montrent la voie vers l'ascension spirituelle, ils nous font
prendre conscience de l'importance de l'érection de l'humanité.
Pour moi, Bioshock sonne comme la
douce musique de la philosophie. Il m'a montré la voie à suivre pour
accéder à la lumière.Il a changé ma vision des choses et je peux,
sans mentir, dire que pour moi il y a eu un avant et un après Bioshock.