Alien sans Sigourney Weaver

Dans le monde du jeu vidéo l'horreur
est casanière et sa résidence se situe sur le sol nippon, en effet
les survival-horror qui ont marqué l'histoire de notre médium étaient
tous natifs du pays du soleil levant. De Resident Evil à Silent Hill
en passant par les très angoissants Project Zero les séries phares
du genre portaient en elle les marques de la culture japonaise qui les
avait créées.  Ca, c'était avant Dead Space.

Dead Space, c'est l'horreur à
l'occidentale, c'est Alien ; paradoxalement c'est surtout une bouffée
d'air frais dans le monde du survival-horror. Mais Dead Space c'est
avant tout un très bon élève : Il prend à Resident Evil la vue à
l'épaule tout en la fluidifiant à la manière d'un Gears of War,
en effet contrairement à nombre des titres japonais cités ci-dessus
dans Dead Space vous ne conduisez pas un poids lourd, votre personnage
se déplace de manière fluide, il peut viser tout en marchant... Outre
cela Dead Space emprunte à Final Fantasy X son sphérier d'évolution
pour l'amélioration des armes Quand à son scénario il s'inspire
beaucoup du cinéma de genre et de films comme Alien ou Sunshine.

Justement au niveau du scénario le
bat blesse beaucoup moins que ce à quoi on s'entendait, certes le
scénario n'est pas aussi fouillé que dans un Bioshock mais il vous
tiendra en haleine tout au long des 12 chapitres qui composent le jeu.
Comparer le scénario de Dead Space à celui de Bioshock me semble assez
justifié car j'ai retrouvé dans Dead Space le même genre d'ambiance,
la même oppression que lorsque je me baladais dans les méandres de
Rapture... De plus, la façon dont Dead Space raconte son histoire est
assez similaire à celle de Bioshock : peu de cinématiques mais des
journaux (textes) disséminés à travers les niveaux, ces journaux
ainsi que quelques enregistrements vocaux témoignent d'une vie passée,
d'une vie éteinte.

Dead
Space... un sacré jeu de prolos !

Et oui dans Dead Space pas de marine
sur-bodybuildé, pas d'aventurier au sourire ravageur, non dans Dead
Space vous incarnez Isaac Clarke, mécano de son état et largué dans
une station spatiale en perdition afin de la réparer suite à son inexplicable
destruction. Bref vous êtes le péquin lambda, non vous êtes pire
que le péquin lambda ; vous êtes un péquin lambda  affublé d'un
mutisme affligeant, vous souffrez aussi du syndrome Gordon Freeman,
à savoir que vous avez à peu près autant de charisme qu'une moule
marinière plongée dans sa sauce. Pour moi le manque de personnalité
d'Isaac Clarke constitue le plus gros défaut du jeu, en effet il
est dur de s'identifier  à cet homme en quête de personnalité.
Mais ce défaut reste mineur et il ne vous empêchera pas de profiter
de Dead Space.

Une fois que votre alter-ego muet aura
posé ses petits pieds sur les planchers rouillés de la station vous
allez vite vous rendre compte que vous n'êtes pas seul et vos hôtes
n'ont rien de la ménagère sympa sortie d'un « dîner presque parfait ».
Non, vos hôtes sont suintants, sales, vicieux et visiblement ils veulent
vous trouer la peau. Vos hôtes, ce sont des Necromorph ; leur particularité ?
Pour les abattre il faut les démembrer. Et ce détail qui a l'air
si banal est en réalité très déstabilisant pour les gamers chevronnés
que nous sommes. Nos chers réflexes, dont nous sommes si fiers, ceux
que nous avons tenté d'améliorer pendant des heures sur Call Of
Duty ou autres Gears Of War ne nous sont plus d'aucune utilité. Ces
vieux réflexes nous poussent à viser la tête de l'ennemi et dans
Dead Space l'ennemi a visiblement la tête dure car il peut recevoir
plusieurs chargeurs dans le minois sans même sourciller. En revanche
ses articulations sont bien plus fragiles et ses bras se détachent
avec une facilité déconcertante, vous avez donc compris ce qu'il
vous reste à faire : Démembrer.

C'est d'ailleurs dans cette action
que réside tout l'aspect bucolique de Dead Space. En réalité non,
Dead Space ne fait pas dans le bucolique. En revanche on ne peut nier
que Dead Space a quelque chose d'esthétisant. Chaque couloir, chaque
salle est magnifique, la recherche artistique est exceptionnelle, les
jeux de lumière vous oppressent à chaque instant  et les scènes
de sortie spatiales sont juste... cosmiques ! C'est dans ces moments
que Dead Space nous montre qu'il est plus qu'un bon élève, lorsque
vous êtes hors de cette station symbole de désolation vous vous sentez
libre, ces moments sont des respirations au milieu de l'oppression
générale. Les petites bulles d'air qui s'échappent lentement
de la station dans un silence spatial à peine rompu par le souffle
rauque de votre respiration nous montrent que la vie, jadis présente
dans la station s'échappe peu à peu. Ces bulles sont symboles du
déclin de la station. Une station à l'agonie, une station lacérée
(au propre comme au figuré car lors de vos sorties spatiales vous serez
en mesure d'observez de longues plaques de tôle se détacher s'élever
mollement vers les étoiles lointaines. Ces moments sont beaux ! Que
dire de plus, à part que la BO est l'une des toutes meilleures BO
de jeu vidéo de tous les temps et qu'elle est au moins aussi impressionnante
que la direction artistique de Dead Space.

Le jeune prodige a surpassé 
le maître

L'intérêt principal d'un test
si tardif réside dans le fait que je vais pouvoir comparer Dead Space
au très attendu Resident Evil 5. Tout d'abord il est bon de parler
de l'aspect graphique de ces deux titres: Resident Evil est très
beau techniquement parlant, tout comme Dead Space, en revanche le character
design de Resident Evil 5 est bien moins inspiré que celui de Dead
Space qui à mes yeux est tellement plus inspiré, tellement moins cliché,
tellement supérieur ! Ensuite sur le plan du gameplay... Resident Evil
possède une maniabilité datée d'au moins 10 ans, les personnages
malgré leurs musculatures impressionnantes se déplacent comme des
obèses sous morphine, en revanche Dead Space est un modèle de fluidité
et de légèreté pour le genre. Isaac Clarke bouge avec aisance, tire
tout en se déplaçant (impossible dans RE5). Là encore Dead Space
est bien supérieur à Resident Evil .

Mais au-delà de tous ces critères
froids Dead Space est infiniment plus enlevé, plus habité, plus inspiré
que cette coquille vide Resident Evil.