Attendue par beaucoup depuis son teaser de l’E3 2016, la nouvelle console de Microsoft s’est enfin dévoilée. La Xbox One X est la plus puissante console jamais mise au point. Mais dans quelle mesure s’ancre-t-elle dans la stratégie de Microsoft ?

 L’E3 est terminé et en cette fin de mois de juin, il est temps de dresser un bilan de cette première moitié de l’année 2017. Côté Microsoft, c’est en grande pompe que Phil Spencer et ses collègues ont présenté la petite dernière de la famille : la Xbox One X. Vantée comme la plus puissante console jamais créée, la One X (pour les intimes) – avec son GPU à 6 téraflops, ses 326 Go/s de bande passante et ses 12 Go de mémoire graphique GDDR5 – promet de faire tourner les jeux en 4K native.

Plus petite que la One et la One S, équipée d’un système de refroidissement liquide et d’une alimentation interne, la One X est un véritable petit trésor de technologie pour le monde de la console. Mais sans prétendre marcher sur les plates-bandes du PC, à qui s’adresse-t-elle ? Aux joueurs exigeants, expliquait Phil Spencer, quelques semaines avant l’annonce, en précisant qu’il s’agissait d’une console « Premium ». Disponible à partir du 7 novembre, au prix de 499€ (celui de la Xbox One à sa sortie), va-t-elle séduire ? Probablement, oui, mais seulement les joueurs d’une niche bien précise.

Par ailleurs, le directeur de la branche Xbox concédait dans les colonnes du Business Insider que la Xbox One X n’allait pas générer beaucoup de profit : « ce n’est pas le hardware qui génère de l’argent, c’est la vente de jeux ».

X comme exclusivités ?

Les jeux, justement, ont bel et bien été la deuxième star de la conférence Xbox de l’E3 2017. Pas moins de 42 jeux ont été montrés, dont 22 exclusivités. De quoi impressionner ? Pas tant que ça. Sur les 22 prétendues exclusivités, seules 7 le sont véritablement (Forza Motosport 7, State of Decay 2, Sea of Thieves, Super Lucky’s Tale, Cuphead, Crackdown 3 et Ori and the Will of the Wisps) – les autres n’étant que des exclusivités temporaires. Or, les exclusivités temporaires ne contribuent pas à forger l’identité d’une console et encore moins, sur le long terme, à en dynamiser les ventes.

Alors quid de ses fameux jeux censés générer du profit ? Pour l’heure, le catalogue d’exclusivité de la Xbox One n’a pas fondamentalement à rougir – avec de belles surprises comme ReCore, Ori and the Blind Forest, ou Cuphead – mais il est inconstant et peine à se construire une identité forte comme celle que Sony s’est bâtie à coup de Last of Us, Uncharted, Horizon Zero Dawn et autres Days Gone et God of War.

Il est fort à parier que Microsoft espère que les joueurs prôneront la One X pour jouer aux jeux tiers, étant donné la promesse de visuels plus fins et d’une fluidité accrue par rapport à la concurrence. Mais il est fort probable que de futures vraies exclusivités non annoncées soient en préparation. En effet, les kits de développement de la Xbox One X sont arrivés tardivement chez les développeurs, qui pourraient déjà être au travail sur de futurs system-seller exclusifs.

 

La politique du First-Party

La politique First-Party s’améliore chez Microsoft depuis l’ascension de Phil Spencer à la tête du département Xbox. Pourtant, sur les sept studios internes détenus par la firme de Redmond, quatre sont dédiés à une franchise uniquement (343 Industries à Halo, The Coalition à Gears of War, Turn 10 à Forza Motosport et Mojang à Minecraft), deux à de petits jeux PC et mobiles (Microsoft Casual Games Team et Lift London) et le dernier, Rare, était dédié à Kinect jusqu’à récemment.

En face, chez Sony Interactive Entertainment, ce ne sont pas moins de 8 studios internes qui travaillent à la production de jeux exclusifs : Naughty Dog sur Uncharted et The Last of Us, Guerilla Games sur Horizon Zero Dawn, Santa Monica Studios sur God of War, sans compter Bend (Days Gone), Sucker Punch (InFamous) et Japan Studios (Gravity Rush, The Last Guardian, Knack).

La politique first party de Microsoft est donc encore timide, misant davantage sur des franchises phares déjà éprouvées, comme Halo et Forza. Parallèlement, le studio second-party comme Remedy Entertainment (Alan Wake, Quantum Brake) a annoncé que son prochain jeu serait multiplateforme et non exclusif. Une chose est sûre, Microsoft doit encore faire se preuves pour implanter sa Xbox One X sur le marché et convaincre ses joueurs et de potentiels indécis de franchir le pas. En attendant, espérons que la console trouve son public et convainque les développeurs de s’y intéresser.

Diviser… pour mieux vendre ?

Contrairement à un certain Don Mattrick dont les stratégies étaient douteuses, Phil Spencer s’est montré clair et ouvert d’esprit : hors de question d’obliger les joueurs Xbox à acheter une One X. Ainsi, tous les jeux qui sortiront sur une console seront compatibles avec l’autre. Cette approche démontre la dimension « premium » inhérente à la dernière console de Microsoft. Ainsi, cette dernière ne divise pas à proprement parler la communauté Xbox, mais propose différents paliers d’expérience. La One S pour les petits portes-feuille et/ou les joueurs peu exigeants et la One X pour les portes-feuille plus fournis et/ou les joueurs plus exigeants.

Pourtant il y a bien division, au-delà de la sphère Xbox. Une division que certains développeurs veulent esquiver. Ce qui s’illustre par le cas Assassin’s Creed Origins. Annoncé en grande pompe comme tournant en 4K sur Xbox One X, il aura suffi que Digital Foundry mette la main sur une démo pour se rendre compte qu’il ne s’agirait pas de 4K native mais plutôt d’une « upscale dynamique ». Ubisoft s’est alors défendu en expliquant ne pas vouloir créer d’inégalités entres les joueurs de One X et les joueurs de One classique ou de PS4. Nonsense. La différence n’est-elle pourtant pas le fondement même de la notion de concurrence et d’exclusivité ? Cette « explication » ébranle donc d’ores et déjà le concept de console mid-génération qui veut permettre à ceux qui le souhaitent de vivre une expérience améliorée.

Ce cas n’est pas sans rappeler le véritable frein au progrès qu’ont été la Xbox 360 et la PS3 à la fin de leur vie, suite à la transition vers les consoles actuelles. Les développeurs avaient en effet retenu leurs moyens pour permettre à leurs jeux de tourner sur les anciennes plateformes et ce afin de profiter le plus possible de leur parc étendu. Il reste donc à espérer que les autres studios ne prendront pas cet exemple et proposeront de véritables expériences plus fluides et plus fines grâce à la puissance de la One X.

W. R-P.