Le focus sur les reboot de la semaine dernière n'était pas innocent, mais bien là pour introduire le test du jour : Castlevania Lords of Shadow. Cette saga connue de tous, a toujours jouit d'une aura particulière auprès de la presse et des coregamers. Néanmoins, Castlevania reste une franchise presque confidentielle quand on l'a met en
perspective avec ses ventes. Se basant sur des mécaniques assez roots,
cette série de jeux de plate-forme / aventure est restée pendant
longtemps emprisonnée dans ses propres codes. Des rouages instaurés par
le non moins célèbre game designer : Koji Igarashi (IGA) qui se voit
aujourd'hui mis à l'écart, après son dernier titre XBLA (Harmony of
Despair), il faut le dire, assez médiocre.

Pourquoi ce reboot ? Premièrement, je
pense que Konami en avait assez de voir une si belle franchise ne pas
faire plus fructifier ses dividendes annuelles. Remettre au goût
du jour, et au goût de tous, cette saga était une priorité pour
l'éditeur japonais. Pour cela Konami a écarté celui qui avait pourtant
su faire évoluer la saga en lui donnant une orientation plus RPG,
notamment grâce à l'épisode Playstation : Symphony of the Night. Mais IGA ne renouvela pas son coups de maitre. En effet, depuis
plusieurs années la série Castlevania stagne, d'excellents épisodes
voient le jour sur Nintendo DS, mais la recette reste inchangée (allez
donc jeter un œil à la  rétrospective de CouCou pour en savoir plus). Comme nombre d'éditeurs japonais
(Capcom ou Square par exemple), Konami a confié le ravalement de façade
de sa franchise à un développeur occidental, espagnol pour être plus
précis : Mercury Steam. Et pour bien assurer en terme d'image de marque, c'est le studio de Hideo Kojima qui assure la production.

Cette envie de changement se poursuit au sein même du jeu avec l'ambition de faire de Castlevania un beat'em all. Konami modifie le genre de sa saga et s'attaque surtout à son passage à la 3D, chose que la série n'est jamais parvenue à
accomplir (bien que personnellement, j'adore les épisodes PS2). Si vous
n'avez vu ne serait-ce qu'un trailer, vous savez que Lords of Shadow s'inspire grandement des canons du genre beat'em all. Des décors
sublimes, des caméras fixes, un système de jeu rythmé et des
musiques grandiloquentes sont autant de particularités qui
rappelleront le hit de Sony : God of War. Mercury Steam a, en
effet, pioché dans ce qui se fait de mieux dans  le jeu vidéo.
Mais honnêtement, qui pourrait leur reprocher ? Le résultat est bluffant ! Les plagiats éhontés sont communs et rares sont les titres qui
proposent un résultat convainquant. Là où les autres pêchent par excès
de paresse, Mercury Steam brille. Car le tout n'est pas forcement
d'inventer ou de révolutionner. Rassembler les meilleurs ingrédients
afin d'en faire une recette ultime est une grande qualité. Dave Cox, le
producer de Lords of Shadow, réalise ainsi l'exploit de surpasser tous ses modèles (sauf pour Shadow of the Colossus, mais là, on parlera plus d'hommage).

Ce Castlevania vous donnera
l'occasion de fouler des décors aux panoramas sublimes, attestant de
l'étendue démesurée des bâtiments croisés. Il vous proposera aussi de
latter du monstre grâce à un système de combat simple, mais très subtil, jouant de combos pléthoriques et de magies à user avec malice. Le tout
au travers le réticule de caméras fixes intelligentes - pas toutes
parfaites, mais dont la majorité témoignent d'un vrai souci de mise en
scène. Le tout est accompagné d'une bande son admirable, d'une
difficulté parfaitement dosée et ceci durant plus d'une vingtaine
d'heures pour les plus complétistes d'entre vous. Au-delà de cette
cascade d'éloge, ce qui m'a le plus conquis dans ce Castlevania est sa richesse, sa générosité. Chaque instant est le témoin du
véritable travail de fourmis opéré pour ce titre. Les artsworks, par
exemple, sont sublimissimes et présents en nombre pour illustrer la
moindre singularité du jeu. Le contenu est gargantuesque et on est repu
avant même d'avoir commencé à jouer.

Mais passons à la question qui fâche et qui va fatalement se poser : est-ce un Castlevania ? Personnellement, c'est quelque chose qui m'agace au plus haut point.
C'est le genre d'interrogation que les intégristes vont obligatoirement
mettre sur le tapis, argumentant par la suite à coups de « trahison », « infidélité » et autres accusations prouvant l'injure que constitue ce
nouveau volet. Mais trahison et infidélité à quoi exactement ? On est
d'accord, toutes les séries ont une base, mais l'évolution de chaque
volet est là pour faire bouger les choses. Dans le cas contraire comment justifier l'avancée opérée par le chef d'œuvre Symphony of the Night ? Une frange de joueurs détestent bien évidemment cet épisode et ne jurent que par Super Castlevania 4. Quelle est donc la solution ? On reste sur nos belles fondations et on
joue au même jeu toute la vie ? Et j'ai envie de demander : quelles sont ces fondations auxquelles nous devrions nous limiter ? Se
cantonnent-elles au premier volet ? Au second ? Il y a quelque mois,
nous avions réalisé une enquête auprès des journalistes spécialisés sur
la question : Qu'est ce qu'un Final Fantasy ?, en réponse aux critiques sur FFXIII, qui n'était, pour beaucoup, pas un "vrai" FF. Je vous laisse seul juge, mais même pour une saga aussi éminente que Final Fantasy, personne n'a la réponse et rares sont les points relevés qui se sont
retrouvés dans plusieurs avis. Se demander si c'est un « vrai Castlevania », n'a que peu de sens. Chaque jeu est une proposition. On adhère ou
pas, mais vis-à-vis de sa qualité et non pas à cause de son rapport aux
fondements de la série. Évidemment, ce n'est que mon avis et je
respecte totalement ceux qui ne voient pas les choses de cette manière.

Le background de la saga s'éloigne donc
grandement de ses illustres prédécesseurs. Je ne peux pas trop en
révéler, mais pour moi, l'univers de Castlevania prend, avec Lords of Shadow, de l'ampleur, de la consistance et gagne en mysticisme. Le prisme ne se limite plus à la lutte d'une famille, les Belmont, face à Dracula (même si...). Il serait simple de spoiler, alors je me limiterais à dire que le scénario va jusqu'à expliquer l'origine de toute chose.

Vous l'aurez compris Lords of Shadow est pour moi une merveille qui assure dans tous les domaines : système
de jeu, ambiance, durée de vie, scénario, bande son, etc. Il y a bien
quelques défauts, mais ces derniers sont trop insignifiants pour venir
entacher ce tableau idyllique (allez, citons : quelques passages
rageants, pas super bien réglés et le faible nombre d'armes
secondaires). Fan de la première heure, j'ai pourtant adoré ce reboot.
Il représente l'espoir de retrouver une série que j'adore sous un
nouveau jour, plus radieux. Ce volet est le Resident Evil 4
des Castlevania : sans grande originalité, mais d'une qualité et d'une rigueur exceptionnelle. Peut-être le coup de cœur de l'année !

Par Med

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