Je vais vous faire un aveu : je n'ai jamais été un aficionado de
l'illustre saga de Bungie. Déjà, celle-ci ayant pris place sur Xbox, et
alors que je ne disposais que de sa principale concurrente, je me voyais dans l'inextricable situation de devoir attendre une éventuelle sortie
PC (le 2, en particulier, tarda pendant trois longues années, sortant
quelques mois avant le troisième épisode sur Xbox 360). Et puis les FPS
sur console, c'est quelque chose que je n'ai pas immédiatement intégré.
Il fallait qu'on me le prouve, que ça pouvait avoir un intérêt, chose
que les loufoques Time Splitters participèrent à mettre en place.

Alors que je n'avais finalement touché
les premiers épisodes que du bout des doigts, je ne parvins guère à être totalement emballé par Halo 3. L'épopée, certainement magistrale, de
Master Chief me parut embrumée dans un torrent scénaristique peu prompt à la compréhension de l'histoire. C'est Halo 3 : ODST qui fit écho chez
moi aux premiers sourires d'allégresse : l'aventure plus mesurée d'une
jeune recrue dans une Nouvelle Mombasa trop silencieuse se jouait des
différents points de vue, au risque de perdre le spectateur. De ces deux derniers épisodes Reach puise le meilleur pour en faire une expérience
solide, sinon idéale.

S'il n'avait s'agit que des graphismes
ou de ces sonorités si spécifiques à la saga, on serait déjà enclin à se montrer optimiste. Le nouveau moteur fait des merveilles malgré
quelques ralentissements, et les progrès les plus notables sont au
niveau des modèles des personnages, qui sont plus fins et mieux animés.
Les environnements, tout en étant plus colorés que ceux de son homologue ODST, réinscrivent la créativité du troisième épisode en notes de
variété : de nombreux passages se veulent ouverts, dans la mesure ou le
jeu a été plus que de mesure adapté à la coopération, sans tomber
toutefois dans les travers d'un Lost Planet 2. A tout moment l'impression d'être en guerre reste vive dans Reach, les
ciels étant souvent parsemés de vaisseaux en approche. La musique, que
j'ai quant à elle toujours trouvée trop ténue au gré des épisodes,
s'avère plutôt fidèle à ce constat ; malgré tout, un léger mieux se fait ressentir, dans des variations parfois étonnantes (du rock au
classique).

Les différentes situations permettent
d'apprécier le gameplay désormais éprouvé de la série. Pendant les
combats, très peu d'ajouts ont fait leur apparition, mais certains sont
suffisamment significatifs. Parmi eux, les power-ups, des sortes de mod
d'armure qui sont assignés à la touche de course (qui est le power-up
par défaut) et qui se rechargent après chaque utilisation. Vous ne
pouvez en transporter et donc n'en utiliser qu'un à la fois, et si l'on
devine toute la dimension stratégique que ce choix peut avoir en
multijoueur, cette nouveauté diversifie de manière tout aussi
intéressante la campagne, vous laissant la possibilité d'utiliser le
jetpack associé à une arme lourde, ou d'agir discrètement pour
assassiner un covenant elite.

Plus en amont dans le jeu, les
outrageantes possibilités en terme de customisation de votre spartan
donnent le vertige, duquel il vous est d'ailleurs possible de choisir le sexe. De nombreuses pièces d'armure sont ainsi disponibles et se
débloqueront à force de cumuler des points, lesquels s'obtiennent aussi
bien en campagne qu'en multijoueur. D'autres véhicules que les désormais très classiques Scorpion et autre Warthog font également leur
apparition, et l'on pensera à la possibilité quelque peu étonnante de
conduire un vaisseau à l'occasion d'une joute spatiale de toute beauté.

Mais Reach apporte également une qualité narrative qui faisait défaut aux précédents. Non pas qu'ils aient été
bâclés, ou mal racontés, mais plutôt que le genre et la succession des
évènements perdaient parfois le joueur ; c'est un risque sans doute
inhérent aux FPS que de voir le scénario et le background
totalement sabotés par une expérience de jeu plus terre à terre (sans
doute est-ce parfois l'intention). Ici, vous faites partie intégrante de la Noble Team, une escouade de Spartans qui, par essence, constituent
l'élite des troupes humaines, et c'est sans doute leur persistance dans
le scénario qui aide le plus à sa compréhension, Carter, Kat, Jun, Jorge et Emile devenant vite la seule chose à laquelle s'attacher dans ce
désordre grondant. Parce qu'il s'agit bien de cela, de l'ordre qui
s'écroule et du rôle que vous allez jouer. Et si de ce dernier l'on
devine facilement les implications, au point qu'on regrette d'un
scénario volontairement prévisible qu'il soit si linéaire et un brin
cliché, on appréciera certains ajouts qui rendent bien service au genre ; parmi lesquels un body awareness efficace qu'on mettra en
contraste avec l'alternance des points de vue et qui donnent à la mise
en scène des allures parfois dramatiques, au point qu'on y décélérait
presque l'errance et la mélancolie de ODST.

Reach pourrait bien être
l'épisode qui m'a définitivement réconcilié avec la saga. Sans pour
autant révolutionner le genre, Bungie confirme la voie du FPS console
maniable et solide tout en se détachant du toujours très vivace Master
Chief. Si en tout état de cause cet épisode ne se rattache à la saga que via de rares mais précieux éléments, cela participe à le rendre
accessible au plus grand nombre tout en faisant découvrir un background
dense, riche d'une décennie. Les nombreuses possibilités offertes par le jeu terminent de valoriser un titre marquant et qui sait jouer sur tous les tableaux grâce un mode solo qu'on sent être autre chose qu'un
prétexte, et ce même si le multijoueur demeure indéniablement le
principal centre d'intérêt de cette exclusivité Xbox 360.

Par Memento

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