Sur le registre du « tu ne m’as jamais aimé ! » lancé par un piquant Lorne Lanning, en sa qualité d’ancien cadre exécutif l’affable Shuhei Yoshida lui répond : « Tu ne m’as jamais compris ! ». La seconde journée du sommet DICE 2015, s’est ouvert sur cette inhabituelle mise en scène durant laquelle ces deux acteurs historiques ont échangé leur point de vue sur une période tendue. En effet, après une lune de miel aussi courte que la présentation en fanfare des spécificités techniques de la PlayStation 2 en mars 1999, les relations se brouillèrent entre le charismatique directeur de création d’Oddworld Inhabitants et l’exécutif de Sony Computer incarné par l’omnipotent Ken Kutaragi sur l’autel d’une promesse non tenue.
En préambule, les deux hommes ont rappelé leur parcours respectif. L’un bénéficiait à plein de la lumière médiatique avec les hits PlayStation l’Odyssée d’Abe, l’Exode d’Abe (...) tandis que l’autre produisait l’incontournable Crash Bandicoot ou encore Gran Turismo sans toutefois bénéficier d’une célébrité rayonnante. La discussion s’est ensuite polarisée sur la personnalité controversée de l’ancien président de Sony Computer. Au plus fort de la gouvernance despotique de K. Kutaragi, le conseil d’administration de Sony souhaitait l’honorer ad vitam aeternam du prix d’excellence avec la délibération de plusieurs intervenants extérieurs. « Un membre d’importance a voté contre » glisse malicieusement S. Yoshida sitôt repris par le bouillonnant Lorne Lanning : « J’étais en total contradiction avec lui ! ».
Visiblement très proche de son mentor, le désormais responsable de la tentaculaire Sony Worldwide Studios lui a rendu hommage en décrivant Kutaragi comme un fin stratège ce qui a fait bondir de son fauteuil Lanning : « Vous dîtes de lui qu’il a bouleversé une grande partie de cette industrie. Je vous réponds qu’il a écarté de cette activité économique une bonne part de la communauté des développeurs ! ». L’introduction de Microsoft dans ce juteux marché avec la Xbox avait ouvert une porte de sortie aux créatifs floués par la politique discriminante du géant japonais dont l’optique était de favoriser les éditeurs d’importance. « Vous aviez offert un boulevard à Microsoft », rétorque sur le ton de la décontraction le directeur d’Oddworld. L’ambition du numéro un mondial de l’informatique était d’édifier « une machine taillée pour les développeurs » , par opposition à l’architecture folklorique de la PS2.
Très à l’aise avec la langue de bois, Yoshida voit dans la composition matérielle « sans équivalent » de la console vedette de Sony une chance déterminante pour Ken Kutaragi « d’innover ». Et à l’adresse de ceux qui se s’étaient découragés en chemin cet adage leur était réservé : « Au-devant d’une vaste montagne, vous devez grimper ».
Mais tout ceci est de l’histoire ancienne. En dépit des invectives répétées de Lorne Lanning durant l’ère PS3 , ce dernier a reçu en cadeau un kit de développement PlayStation 4 avant son lancement commercial. Ses louanges sur la politique de proximité avec la communauté des développeurs initiés par son homologue Mark Cerny ont été entendues en faveur de ce créatif respecté pour l’inventivité débordante de ses productions.
(adaptation Retromag, source Arstechnica)