Suda 51, Mikami et Yamaoka... Sur le papier, cette association inespérée ne pouvait que mettre l'eau à la bouche des fans de leurs contributions à des mythes comme Resident Evil, Silent Hill, Killer 7 et plus récemment le déjanté No More Heroes.
Alors qu'en est-il vraiment de ce Shadows of the damned qui a su capter l'attention des joueurs déçus par les derniers jeux du genre sortis depuis le fameux Resident Evil 4 (qui date de 2005) sur la génération précédente de consoles de salon ?
Allez hop on y va... En route pour les enfers !
Château lugubre en arrière-plan, chauves souris, corps empalés, démons aux yeux injectés de sang, le tout sur une musique aux sonorités latinos : le décor est planté dès l'introduction. Pas de doute nous sommes en présence d'un jeu pour adultes.
A la vue de telles images, mes vieux souvenirs de Simon Belmont (héros des Castlevania faut-il le rappeler) ressurgissent forcément. Par contre, point de fouet à utiliser dans ce SOTD et même aucune arme blanche.
La trame de l'histoire est assez simple. Vous incarnez Garcia Hotspur, un bellâtre chasseur de démons qui commence le jeu torse nu, couvert de tatouages et toutes tablettes de chocolat dehors, sans oublier l'indispensable pantalon en cuir.
Vous venez de massacrer une légion de démons (ah métro, boulot, dodo !) déclenchant la colère de Fleming, le seigneur de ces mêmes démons qui a kidnappé Paula l'amour de votre vie. Découvrant votre refus de demander pardon pour le massacre de ses sbires, il décide de la tuer puis de la ressusciter à l'envi.
Les deux font la paire.
Vous allez donc partir à la poursuite de Paula et tenter de l'arracher des griffes de ce vil Fleming pour la ramener dans le monde des vivants.
Sans trop dévoiler la suite de l'intrigue, vous vous doutez aisément qu'elle en sera le fil conducteur.
Vous serez épaulé dans votre quête par Johnson, une sorte de crâne « multifonctions » qui sera tantôt une moto, tantôt une torche, mais constituera surtout votre arsenal ambulant lors de ses nombreuses transformations.
Le jeu nous gratifie d'un humour tout à fait dans le ton et l'on se surprend à sourire de la relation entre Garcia et Johnson et des vannes qu'ils se balancent.
Sans l'ombre d'un doute.
Dès les premières minutes de jeu nous comprenons que nous avons affaire à une technique plutôt maîtrisée.
Les textures sont propres (enfin façon de parler vu le thème du jeu), les effets de lumière sont bien gérés et l'ambiance oppressante et nauséabonde des régions traversées est parfaitement rendue.
A noter pour la petite histoire que votre progression se fait sur une carte en 2D inspirée par le célèbre Ghouls'n Ghosts.
La technique dans les rares niveaux de type shoot them up du jeu est bien maîtrisée et permet de souffler entre deux séances de massacre en règle de démons.
Donnez à manger aux bébés qui pleurent et verrouillent les portes !
Concernant les portes à ouvrir, les sempiternelles clés sont remplacées par des fraises ou des cerveaux à donner en pâture à des bébés qui pleurent et verrouillent les portes.
Vous devrez également résoudre des puzzles tout au long du jeu pour arriver à ouvrir et fermer certains passages en jouant avec la lumière (plusieurs boutons à activer n'apparaissant que dans l'obscurité).
Tirez sur des têtes de moutons pour éclairer des zones et affaiblir vos ennemis !
Pour ce qui est du gameplay nous sommes en présence d'un Resident Evil like des plus classiques même s'il est possible de tirer en se déplaçant (si si je vous assure).
Et figurez vous que cela change tout par rapport à un Resident Evil 5 qui nous faisait accumuler les frustrations et les regrets plus nous progressions dans l'aventure.
Ici, bien au contraire, nous sommes confrontés à un héros très dynamique, au fonctionnement classique (un appui prolongé sur un bouton le fait sprinter mais seulement pour une durée limitée, le temps qu'il reprenne son souffle).
Un appui sur une gâchette pour viser et ensuite le choix entre tir principal et secondaire selon le bouton utilisé s'offre à vous.
L'arsenal à votre disposition est bien sûr évolutif et constitue le cœur du jeu.
3 armes principales (un flingue « classique », une sorte de « fusil à pompe » et bien sûr une mitrailleuse) avec des évolutions au fur et à mesure de votre progression dans le jeu pour finir avec de véritables armes de guerre à rendre jaloux un John Rambo.
Mais surtout ces armes sont toutes dotées d'un tir secondaire en la personne du fameux « Tir de lumière ». En visant certaines lampes mais surtout des têtes de moutons présentes sur certains murs, vous ramènerez la lumière dans certaines zones d'ombres remplies de créatures démoniaques et prendrez du coup un avantage certain sur eux. Il est bon de préciser également qu'un appui long sur le bouton de tir secondaire offre des fonctionnalités additionnelles à ces armes (bombes collantes pouvant être utilisées comme explosif pour passer certaines portes ou en finir avec des démons plus coriaces par exemple).
Pour les combats contre les boss, assez variés il faut bien le reconnaître, il s'agit toujours ou presque de viser des endroits de leur anatomie signalés en rouge (même si parfois il faut obligatoirement être dans l'obscurité pour voir ces points faibles ce qui complexifie un peu le challenge). A noter que certains démons sont à vaincre par l'intermédiaire de QTE ce qui change la façon d'appréhender l'affrontement, forcément.
Au niveau de l'inventaire, vous aurez accès à plusieurs sortes de boissons pour vous requinquer ; saké, tequila, et surtout absinthe, toutes disponibles à l'unité ou en packs a tarifs préférentiels. Justement pour ce qui est du système de monnaie local, il est basé sur des gemmes de couleur :
- blanches pour les achats,
- rouges pour les améliorations de tous ordres,
- bleues pour les améliorations de votre fidèle Johnson (obtention de nouvelles armes ou de nouveaux pouvoirs notamment)
Parce que bien évidemment le jeu n'est pas exempt de défauts, en voici les principaux résumés ;
La trop grande répétitivité et la relative facilité des combats contre les boss qui jalonnent le jeu. En effet ces combats durent parfois très longtemps uniquement parce que vous savez que vous aurez des munitions à volonté et la possibilité de racheter des boissons même pendant les combats ;
Le marchand de potions et autres items, mélange de Jar Jar Binks et d'un homme orchestre que l'on retrouve tout au long de l'aventure (système repris de resident evil 4 encore une fois) au milieu d'un parterre de plantes lumineuses tout droit sorties de l'Avatar de Cameron ce qui ne cadre pas vraiment avec le reste de l'ambiance du jeu et qui du coup casse un peu le délire.
Toutefois ces quelques défauts ne doivent pas vous faire oublier toutes les bonnes idées présentent dans ce road movie des enfers !
Pour ce qui est de la durée de vie, comptez une bonne huitaine d'heures en mode normal pour boucler cette visite des enfers.
Si vous désirez récolter toutes les gemmes du jeu ou vous frotter au mode difficile vous y serez retenu un peu plus longtemps évidemment. Et n'oubliez pas le guide...
Le récap qui décape.
On aime :
- l'ambiance, hallucinée et envoutante
- une vraie identité sonore et visuelle
- durée de vie correcte dans les standards actuels
- on peut tirer en se déplaçant !
- le côté mature
- la doublette constituée par le héros et son arme qui parle
On aime pas :
- le marchand qui surgit de nulle part au cours de l'aventure pour nous vendre ses breloques
- combats contre certains monstres parfois longs et ennuyeux
- trop de distributeurs de boissons pour se refaire une santé à des endroits clés (combats de boss notamment)
Visuellement
L'Unreal Engine 3 est parfaitement exploité ici. Les effets de lumière, indispensables pour rentrer pleinement dans l'ambiance du titre sont juste comme il faut, ni trop, ni trop peu.
Le bestiaire est plus que fourni et tout droit sorti de l'imaginaire dérangé de ses créateurs (il faut vraiment voir Fleming et sa triple rangée d'yeux).
Les effets pyrotechniques sont également plutôt efficaces et le rendu visuel des dégâts que vous infligez est vraiment dans le ton. Mention spéciale aux headshots bien évidemment.
Auditivement
Le titre est en version originale sous-titrée ce qui colle bien à l'atmosphère. La quantité de dialogues reste raisonnable rassurez vous ce n'est pas du Shakespeare.
Heavy metal, latino, musique tourmentée façon Twin peaks ou Silent Hill, il y en a pour tous les goûts et elles sont toutes parfaitement adaptées aux situations rencontrées. Merci Mr Yamaoka ! Les bruitages quant à eux rendent toujours crédible votre chasse aux démons.
En supplément
Rien, nada. Pas de place pour le fun à plusieurs que ce soit en coopération ou en multijoueur (local ou en ligne). Un des points faibles du jeu à n'en pas douter.
Conclusion
Dans un premier temps séduit par cette association inespérée entre 3 ténors du secteur, j'avoue avoir eu un peu peur en me nourrissant des images, vidéos et autres previews savamment distillées au cours de ces derniers mois. Mais finalement je sors de ce survival avec le sentiment d'avoir joué au Resident Evil 5 que j'aurais aimé trouver.
Ambiance unique, bestiaire à l'avenant, armes jouissives, contrôles aisés, les seuls défauts du titre résident dans la répétitivité des combats contre les boss et la relative générosité des développeurs quant aux boissons requinquantes et le multijoueur qui brille par son absence.
Oscillant entre le meilleur de Resident Evil 4 et d'House of the Dead lors de certains passages frénétiques, tous les amateurs de chasse aux démons et autres fils de Lucifer se doivent d'emprunter cette autoroute de l'enfer !