Après la relecture du deuxième opus sortie l’année dernière, voici venir celle du troisième. Même endroit, même heure mais pas vraiment même ambiance. Là ou Resident Evil 2 baignait dans une atmosphère lourde, pesante, noire, le 3 lui donne bien plus dans l’action, la pétarade et la fuite en avant. En grande partie dû à la co-star du jeu, est-il besoin de la présenter, dont le nom est accolé au titre de cet épisode pour l’éternité. La tenace créature fait donc aussi son retour, encore et toujours à la poursuite des S.T.A.R.S., et plus particulièrement de Jill Valentine, le seul membre de la troupe d’élite resté à Raccoon City…

AMIS DE LONGUE DATE

Toujours hantée par son aventure dans le terrifiant Manoir Spencer, Jill se terre chez elle, à tenter de percer les secrets d’Umbrella, la société pharmaceutique qui à la main-mise sur la ville. Elle découvre sur le tard que des émeutes semblent avoir gagné les rues quand sonne le téléphone. Brad Vickers - son collègue et ami - semble paniqué et lui intime l’ordre de quitter son appartement illico presto. Un peu déboussolé qu’elle est, voilà t-y pas qu’un mastodonte défonce le mur et tente de la tuer sans plus de préavis ! Échappant de justesse à cette monstruosité, la voilà livrée à elle même dans la ville…envahit de mort-vivants ! Un vrai cauchemar ! Réalisant à peine la catastrophique situation elle fait la rencontre de Carlos Oliveira, membre de l’U.B.C.S. avec lequel elle fera équipe afin de se débarrasser de son poursuivant et surtout tenter de sauver la ville. Elle rencontrera également les compagnons d’armes de ce dernier, dont Nicholai, qui posera de toute évidence problème…

La séquence originelle du tramway se voit ici déplacée dans une rame de Métro. Mikhail est toujours de la partie, ici avec Tyrell et Carlos.

C’est donc aux commandes de la policière que nous parcourons de nouveau Raccoon City en proie aux flammes et aux croque-mitaines. On retrouve un esprit très ‘Actionner 90’s’, évoquant parfois Die Hard, Aliens mais surtout Sarah Connor fuyant à toute berzingue le Terminator, ne lâchant jamais sa proie. Nous sommes très proche question jouabilité de ce que proposait le remake précédant, avec quelques ajustements en termes d’ergonomie ici et là. Visuellement c’est peut-être encore plus beau, notamment au niveau du réalisme des visages ; c’est tout simplement bluffant. La réalisation elle est du même acabit, avec toutefois quelques jeux d’ombres et de lumières plus recherchées, accentuant par des spots malicieusement placés les menaces que représentent les infectés et bien entendu le Nemesis.


Il faudra se frayer un chemin au travers des hordes de zombies qui rôdent dans les ruines fumantes de la ville.

La grande différence avec Resident Evil 2, c’est qu’ici nous sommes beaucoup en extérieur, traversant ruelles en ruines et petites place sinistrées, avec visites rapides de nombreux intérieurs pour y dénicher de quoi progresser. Nous ne sommes plus confinés dans un lieu unique, aussi impressionnant soit-il, avec un laboratoire secret planqué en dessous (du moins jusqu’à l’hôpital). Quand on resitue ce remake  dans la nouvelle ‘chronologie’ il fait donc le lien naturel entre le 2 et le 4. Une évolution qui se fait de manière plus limpide entre les épisodes principaux, allant même jusqu'à instaurer une nouvelle ‘menace’ qui apparaissait jusque là dans l’aventure hispanique, les Pale Head étant appelé à évoluer en Regenerator qu’affrontera Leon dans le 4. On peut aussi voir dans les parasites qu’injecte le Nemesis les prémices de ce que donnera Las Plagas. Cette réécriture fut donc l’occasion pour Capcom de mieux insérer cet épisode dans le cheminement global de la saga.

Les salles de sauvegardes répondent toujours présentes, avec l'indémodable coffre à objet accompagné de la cultissime machine à écrire. Petit plus qui fait plaisir, la musique est toujours la même qu'à l'époque. Enchantement.

Des QTE font leur apparitions, souvent lors de combat contre le Nemesis. Ils ne sont pas toujours très clair (je n'ai d'ailleurs absolument pas compris comment se débarasser d'un zombie qui va vous croquer). L'esquive elle est toujours là (et tant mieux!) mais les phases de 'choix' (des Freeze QTE quand on y pense..) eux sont passé à la trappe.

RÉÉCRIRE, C’EST TRAHIR

Mais qui dit réécriture dit réinvention au vu des standards modernes de narration. Ce qui va apporter des bienfaits sur certains points mais quelques méfaits par ailleurs.
Commençons par les ajouts, ou devrai-je dire les développements apportés à cette modernisation, car en soi rien à réellement été ‘ajouté’ en terme de scénario. Le plus flagrant c’est la place qu’a pris Nicholai, son rôle à été étoffé, surement dû à la réputation qu’a acquise le personnage auprès des joueurs d’il y a 20 ans. Ses camarades aussi se voient attribués de plus grande  présence à l’écran, la plus marquante étant sans conteste celle de Tyrell, qui passe d’une apparition quasi furtive – mais explosive ! – à troisième rôle récurent tout du long. Choix qui surprend mais pourquoi pas. Et du coup la séquence mythique (Pan !) à laquelle il participait à été grandement modifiée, mais reste présente.

Tyrell à pris de l'étoffe et accompagne même notre héroïne pendant un moment. On est loin de sa minute de gloire dans l'original.

Et c’est un peu pareil pour tout un tas de passage de la version classique, que l’on redécouvre sous un nouveau jour. Comme la séquence dans la centrale électrique, ici fusionné avec celle qui nous voyait affronter des insectes mutants dans un chantier (si ma mémoire ne mélange pas tout…) où le passage dans les égouts avancé en milieu d’aventure (qui pour le coup ne sert à rien dans le remake. Pourquoi avoir conservée cette zone inintéressante en lieu et place d’une autre qui aurait été plus captivante ?). Dans le même ordre d’idée Carlos ne dépose plus Jill dans la chapelle du Beffroi mais directement à l’hôpital. D’ailleurs le Beffroi (ou la Tour de L’horloge St Michael) est toujours présent mais on n’y entre plus, on ne fait que passer rapidement devant.
Là où je suis plus circonspect c’est que pour la première fois il me semble dans un Resident Evil, il y a clairement une ‘ellipse’ de localisation. En effet on ne parcourt à aucun moment le chemin nous menant à l’hosto. Juste une cinématique qui introduit le bâtiment…et voilà. Exit donc au passage toute la section du Parc Raccoon et de son boss A.K.A. le Ver Géant. Chacun jugera pertinente ou non cette coupe un peu étrange.

Bye Bye la chapelle ardente de la Tour de L'Horloge St Michael, Bonjour le lit médicalisé du Spencer Memorial Hospital...A la fois plus logique mais on y perds un lieu emblématique.

On conserve toutefois les moments ou l’on incarne Carlos, et oui au pluriel désormais car si c’est bien toujours avec lui que l’on découvre l’établissement hospitalier, il y a désormais un autre lieu que l’on parcourt en sa compagnie (surprise!). Je dois dire que cette nouvelle version du gars à la mitraillette me plaît bien plus que sa première incarnation. Une vraie gueule, un vrai caractère, un vrai développement. Cela fait plaisir à voir. Et de véritables interactions avec ses partenaires d’escouade. Avec Tyrell, avec Mikhail, avec Nicholai. En clair une meilleure caractérisation des seconds rôles qui amènent une plus grande profondeur à l’ensemble.

Cette réinvention de Carlos lui confère une plus forte personnalité que le simple 'beau gosse Latino' un peu plat qu'il était auparavant.

TOUJOURS DANS LES PATTES

Évoquons maintenant le sujet central qui fait tout le sel de cet épisode : le Nemesis. Comme à l’époque pour les joueurs qui comme moi on connu la version classique, le Tyran +++ est un véritable lâche-rien qui vous collera aux basques durant toutes vos macabres péripéties. Mais comme à l’époque également ses apparitions sont scriptées. Pour être limpide, ses interventions ne sont pas du tout basées sur le même principe que Mister X, qui lui vous pourchasse véritablement à travers le commissariat. Mister Nem’ lui apparaît à des endroits pré-calculés, lançant bien souvent une cinématique qui enchaîne sur une séance de gameplay spécifique. Généralement une fuite les jambes à son cou d’un point A à un point B pour éviter de se faire aplatir comme une crêpe (au passage, le 3 possède le même défaut que le 2 au niveau de la vitesse de course des protagonistes, qui trottinent plus qu’ils ne courent…agaçant !). Mention spéciale à la scène avec le viseur laser à la station-service…qui aurait peut-être mérité d’être plus ‘jouable’ ou pourquoi pas ‘mis en scène’ avec des QTE bien Punchy. Je trouve cette scène certes intense mais un peu à coté de la plaque, elle aurait pu être bien meilleure si le joueur avait été plus impliqué dans cette confrontation.

Mais où trouve t-il toutes ses armes de dingue?

Donc pour le coup, les affrontements ‘direct’ en face-à-face avec le charmant monsieur au faciès ravagé sont bien moins nombreux que dans l’opus original. Il vous barre parfois la route – surtout en début de partie – et vous pouvez soit s’acharner sur lui comme certains s’amusaient à le faire en 1999 pour récupérer du matos ou juger qu’il est préférable de poursuivre son chemin en l’esquivant un maximum. Chacun sa stratégie.


Il faut se préparer si vous vous décidez à confronter la Bête avec la Belle. Il ne fait pas dans la dentelle et n'est certainement pas là pour vous offrir une rose...Toujours aussi persévérant que dans mes souvenirs mais beaucoup moins agacant, car plus facilement 'évitable' (mais je me suis pris de sacrées roustes quand même!)

Paradoxalement c’est justement par le fait qu’il soit TROP mis en scène qu’il perd en puissance de frappe émotionnelle. Par conséquent même si il demeure impressionnant et une menace à ne pas négliger, son impact est grandement amoindri par rapport au RE3:NEMESIS d’époque. En dehors d’une puissante et réussie apparition surprise dans le premier tiers du jeu, toutes les autres se font via le biais d’une cinématique. Ce qui a pour effet de réduire quasiment à néant l’angoisse de le voir surgir à n’importe quel moment…au détour d’un couloir, derrière une porte, en haut d’un escalier, à travers un mur. Il aurait fallu garder le principe de l’apparition ‘sans signe avant-coureur’ de Mister X afin que chacune de ses dernières saisissent d’effroi le joueur. Avec pourquoi pas son célèbre ‘STAAAAAaaarrs’ prononcé au tout dernier moment pour bien marteler l’effet de surprise.

On accède au Beffroi différement, en passant sur un pont piétonnier. Ce passage ratrappe un peu celui du 'pont de liane' ou s'offrait un choix au joueur en 99. Le parc manque vraiment...

~€~

Cette mise à jour 2020 de Resident Evil 3 est, à l’instar de celle du 2 l’année dernière, très réussie. Cependant les fans de la première heure pourront être décontenancés par certains choix de coupes au profit de séquences qui n’apportent pas grand-chose (les égouts restent, le parc disparaît. L’inverse aurait été sans doute plus judicieux) ou ce nouveau Nemesis bien moins marquant que son ainé de 20 ans. L’écriture se veut aussi plus condensée et sans doute plus fluide mais apporte dans cette concision une meilleure étude de personnage, les gars de l’U.B.C.S. en tête. Visuellement époustouflant, surtout au niveau de la modélisation des visages et jouabilité sans défaut majeur qui fait que l’on rentre dans l’aventure sans obstacle. C’est donc avec un plaisir sincère que l’on redécouvre Raccoon City sous ses plus beaux (ou plus horribles ?) atours, grâce à cette relecture qui a su remodeler le grand classique pour en faire un trait d’union parfait entre les épisodes 2 et 4. Chapeau bas !

En ce qui concerne la durée de vie que beaucoup estime trop faible, elle est pour moi idéale. Quasi 8H pour un Resident, c'est plus que convenable. Et oui je ne joue qu'en Facile, je sauvegarde trop (mais vraiment TROP!) et je fus tué 3 fois par mort subite (Une fois par un Hunter et deux fois par le Nemesis forme finale). Une bonne partie pour un guignol de la manette comme moi ^^'

Bonus :

Encore un exemple sur cette notion d'intégration dans une logique de 'saga globale' avec cette scène du fusil laser présente dans le film d'animation Vendetta. Si vous avez terminé ce REmake vous comprendrez le lien, qui n'est certainement pas dû au hasard. Cette 'réécriture à rebours' des premiers épisodes permet de mieux assoir la cohérence du tout.