Un lien vers la version illustrée sur mon blog: https://www.gameblog.fr/blogs/seblecaribou/p_62251_aujourd-hui-mon-test-de-silent-hill-downpour

Vatra Games...mais qui es-tu Vatra Games ? Avant que Konami ne confie l'une de ses licences les plus chéries à ce studio, il était pour ainsi dire inconnu. Sur leur page wikipedia/en, Silent Hill : Downpour n'est devancé que d'un jeu dans leur CV : Rush'N Attack Ex-Patriot, un titre XBLA et PSN qui pour information s'est pris un 8/20, en 2009 à sa sortie, par le site de jeu vidéo le plus visité en France. Il faut le dire, pour les fans hardcore, Konami ne faisait que mystifier un peu plus, chacun des nouveaux intervenants sur la série étant plus inconnu encore que le précédent.

Étant un très grand amateur et admirateur de la saga initiée par la Silent Team, sans pour autant faire partie des puristes, je ne voyais pas ce changement de cap comme une descente aux enfers, mais plutôt comme une occasion, si mince était-elle de faire encore un survival/horror sans fusillade et vague d'ennemis...tel que finalement l'était Homecoming, à mon sens pas un jeu au génie incroyable, mais un survival/horror très honnête avec un bon scénario. Je me suis donc suffisamment intéressé au jeu pour l'attendre, l'acheté à J-2 et aujourd'hui j'en suis venu à bout...

 

 

Comme pour l'ensemble de la série (l'épisode 3 étant l'exception à la règle), le jeu nous propose d'incarner un homme, Murphy Pendleton. Je vais tenter d'être assez bref sur le scénario pour ne pas en dévoiler la substantifique moelle. Murphy est un prisonnier. Il n'a pourtant pas l'air du mauvais bougre, mais les premières minutes du jeu donneront une idée de sa présence entre les quatre murs d'une cellule. Lors de son transfert vers une prison plus sécurisée, il se retrouve après un spectaculaire accident de bus, libre comme l'air...ou presque. Le malheur a voulu que Murphy ne s'échappe pas n'importe où, mais à seulement un kilomètre de la véritable ville de tous les pêchés, Silent Hill.

D'une certaine manière, dans l'esprit et le traitement accordé à l'environnement et aux ennemis (de piètre qualité mais je vais y revenir) Silent Hill Downpour n'est pas sans rappelé l'épisode le plus plébiscité, à savoir le second. Je ne parle pas du scénario, ni de la direction artistique, mais du fait que les développeurs ont fait de Silent Hill un reflet du héros et non la projection des délires vengeurs de la petite Alessa ou du culte de Samael. De ce point de vue là, on peut déjà applaudir Vatra Games pour parvenir dès les premières minutes du jeu à insérer des éléments qui comptent dans le scénario et qui ne sont pas là par pur hasard ou clins-d'œil aux fans. Dans l'idée de ne pas dévoiler la trame qui est un atout pour le jeu, sans aucun doute, je ne vous donnerez pas d'exemple, mais une chose est sûr, ça a rarement été aussi passionnant de scruter un décors, de la moindre affiche ou flyer, au moindre tableau.

 

 

Les décors d'ailleurs ne manque pas de rappeler pour la première partie du jeu un certain Alan Wake, se parant néanmoins d'un je-ne-sais-quoi plus horrifique qui manquait, à mon goût, au jeu de Remedy Entertainment. La suite propose la ville de Silent Hill complète en visite. Évidemment, celle-ci est peuplée de créatures qui, comme je le disais, ont plus ou moins un rapport avec le héros. On peut émettre ici la première critique. Le bestiaire, en plus d'être restreint (trois ou quatre type d'ennemis) est pour le moins raté. Le problème ne vient pas tant de l'idée que de la réalisation. Déjà les ennemis sont trop humain. Il y a deux ou trois types d'ennemis qui sont tout simplement des humains très grimés avec des objets coupant fondus dans ce qui devraient leurs mains. Le problème c'est qu'en conséquence, on juge leur façon de se comporter comme on jugerait un être humain. Dans Resident Evil par exemple, ce sont des morts vivants, ils sont lents et si on s'éloigne trop, on les sème, mais on ne s'en offusque pas puisque leur cerveau est pour ainsi dire, mort. Dans Silent Hill 2, ce ne sont pas des humains, mais de assemblement de corps à la forme passablement humaine qui au passage, leur donne ce côté malsain...encore une fois, le fait de parvenir à les semer vite et le fait que la plupart du temps, ils n'ont pas de visages fait qu'il paraît normal, ou en tout cas pas inconcevable que leur raisonnement ne suive pas notre logique.

Dans Downpour, quand on s'éloigne en trottinant, on sème très rapidement les ennemis, même si on a tenté de les vaincre à coup de barre à mine une seconde auparavant. Le problème, c'est qu'avec leurs visages de damnés (qui n'est pas sans rappeler certains junkies de Condemned 2) qui nous regardent bêtement, on a juste l'impression d'être face à des benêts. D'ailleurs, la plupart du temps, on ne se sent tellement pas menacé qu'on ne tue personne (ou « rien » pour être un peu plus exacte). Seule la dernière partie du jeu offre des ennemis pas plus impressionnant au niveau du design, mais suffisamment nombreux (c'est-à-dire trois en même temps) et robustes pour que l'on lâche une goûte de sueur froide quand on arrive face à eux, dans un environnement confiné qui plus est.

Et si le design était le seul soucis de cette opposition peu farouche...malheureusement et ça a déjà été souligné dans presque tous les tests que j'ai lu, les combats ne sont pas vraiment passionnants. Ils ne l'ont certes jamais vraiment été, mais pour le coup, ils en deviennent presque parfois un peu gênant par leur immobilisme forcé. Le jeu propose au joueur de ramasser ses armes n'importe où dans la rue (ou dans les bâtiments que l'on visite). L'idée étant qu'à mains nues, on est vraiment inefficace, et qu'armé on galère quand même passablement. Le problème vient du fait que les ennemis peuvent garder les coups. On se retrouve donc rapidement à faire garde, garde, garde, attaque, attaque, l'ennemi garde et attaque à son tour puis on garde, garde, garde etc...Cela est non seulement redondant, mais en plus tellement pas nécessaire en ville qu'on préfère courir. L'autre souci c'est que les ennemis (en ville toujours) popent plus ou moins aléatoirement et par conséquent les tuer ne rime à rien puisqu'on en retrouvera toujours.

 

Ce qui est étrange, c'est que malgré ce pan, mine de rien important, du jeu qui tombe à l'eau (si vous me permettez cette fine et au combien inspirée boutade) j'ai pris beaucoup de plaisir à faire le jeu et je sais d'ores et déjà que je vais le refaire pour en découvrir les secrets et quêtes annexes avec au moins autant de plaisir. C'est d'ailleurs une nouveauté (à ma connaissance) dans un survival/horror ; Silent Hill Downpour propose au joueur un peu explorateur de sillonner la ville, avec un but autre que l'objectif principal. Si au départ le principe m'a paru saugrenu, de manière étrange, il s'est avéré que les quelques quêtes annexes que j'ai finis (j'ai du en faire trois ou quatre) contenaient des histoires très malsaines et glauques, ou vraiment mélancolique et surtout racontée par le décors et ce que l'on y trouve, chose suffisamment rare pour être mentionnée. On ne manque donc pas d'apprécier de trouver dans un appartement des indices d'une vie passée et terminée tragiquement dont les traces sur les murs sont les seuls témoins. Le seul reproche que je ferais à cet ajout de quêtes annexes est leur côté récompense un peu systématique et inutile, comme si le fait d'avoir découvert une scène intime et bien cachée n'était pas déjà une récompense en soi. Le jeu ne peut s'empêcher de nous donner quelques balles de fusil, comme une petite tape dans le dos.

Ces quêtes supplémentaires n'ont d'ailleurs pas à rougir face à l'histoire axée sur Murphy, leur mise en scène bénéficiant parfois des mêmes soins que la trame principal. C'est d'ailleurs encore une qualité du titre, sa capacité à partir très loin dans la déformation des décors, proposant des passages altérés assez dingues qui jouent tout à la fois sur les angles de caméras, les dégradations des murs qui évidemment sont dans la lignée de ce que la série à déjà proposé et des mind-fuck visuels qui rappellent beaucoup les escaliers de Escher. Un petit bémol cependant à ces passages ; les casses-têtes ne sont pas très compliqués même en difficile et ne joue que très rarement sur ces fameuses perspectives très troublantes, ce qui est un peu dommage.

Pour rester sur la difficulté du jeu, j'ai joué en mode normal pour les combats et donc difficile pour les énigmes, et la quantité de soin associé au fait qu'on a rarement besoin de se battre rendent le jeu assez facile et enlève une partie de la pression de jouer. En revanche, malgré la facilité des énigmes, si vous n'activez pas la surbrillance des objets, ceux-ci ne s'éclairent que très légèrement quand on est à porté de main et cela donne parfois des passages où on se gratte sérieusement le cuir chevelu en se demandant ce qu'on a bien pu manquer...et personnellement j'ai trouvé ça très gratifiant, puisque l'on a pas une flèche en néon pour indiquer « la clé est là connard » comme dans la plupart des productions actuelles qui ont tellement peur que l'on se perde.

 

Tout ceci donne donc un jeu plus que plaisant à parcourir, grâce notamment à cet effort fait sur les détails visuels de l'environnement et leur rapport au scénario qui est très bien fichu et se voit délivré de fort belle manière, puisque le joueur est libre de spéculer avec de vrais éléments sur la suite. Malgré tout on peut noter des fausses notes qui ne m'ont pas gâché l'expérience, mais qui restent assez agaçantes. Pour commencer, même si le jeu est très jolie avec certains effets vraiment bien vus, comme les vêtements qui se mouillent où qui se tachent de sang et de déchirure pour nous indiquer l'état de santé du héros (ce qui au passage donne un jeu sans HUD) les chargements de textures de l'Unreal Engine 3 sont toujours à la ramasse (c'est dingue quoi!) même si on atteint pas les secondes entières de textures lisses de Mass Effect ou Alice Madness Returns. Autre souci pour le coup vraiment exaspérant, les saccades qui n'ont pas vraiment de sens ; ça ne correspond même pas à des chutes de framerate à cause d'un décors trop grand à afficher puisque la plupart du temps c'est en intérieur que ça se déclenche, et pour peu qu'on tourne la caméra un peu vite, on est parfois victime de micro-freeze. Pas handicapants, car ils ne se déclenchent jamais pendant un combat, ils restent assez ponctuels au long de l'aventure. Toujours pas un motif de rejet complet, mais ça fait grincer des dents quand même.

 

Pour finir et là c'est un problème qui sera à la fois très subjectif dans son appréhension et dans sa réception ; je n'ai pas eu très peur en jouant à Silent Hill Downpour. Je suis pourtant des joueurs qui adorent les survival/horror (j'ai du essayer la plupart des séries qui sont arrivés en France) et qui frissonnent avant même que le jeu ne démarre, par simple appréhension. Sans dire que Downpour est un parcours de santé bucolique qui respire la joie de vivre, à part quelques sursauts (certains scripts sont vraiment intelligents) je n'ai pas ressenti ce malaise ou cette espèce de pression latente qui me font mettre les oreilles aux aguets même dans Homecoming. La différence est tout simplement que Akira Yamaoka n'est plus au sound design. Loin de moi l'idée de désavouer le travail admirable de Daniel Litch cependant, mais il lui manque un rien de malsain.

Il y a globalement une ambiance assez fantastique, dans tous les sens du terme, qui parfois évolue en oppression ou en panique totale, mais ce n'est pas constant comme dans les premiers volets de la série. Chacun jugera bien sûr ce dernier point selon sa propre sensibilité. En ce qui me concerne, Silent Hill Downpour est un peu un super-Alan Wake, comblant le je-ne-sais-quoi qui lui manquait, en apportant des scènes bien couillues, mais manquant d'un peu de pression sonore notamment avec ces bruits métalliques à la Yamaoka, pour provoquer la fameuse distorsion temporelle ; un quart d'heure dans Silent Hill semble durer une heure.

 

 

 

Silent Hill Downpour n'est ni le renouveau de la série telle qu'on la connaissait quand les malades mentaux de la Silent Team étaient aux commandes, ni un affront ou une fausse note comme le Homecoming de Double Helix pouvait l'être (même si moi j'aime beaucoup ce jeu). C'est un jeu qui a sa personnalité et son histoire propre, avec beaucoup de moments creusés en terme de mise en scène (le théâtre) et qui malgré ses défauts techniques et ses combats tellement inutiles que l'un des succès est de finir le jeu sans tuer rien ni personne (véridique) offre une ambiance superbe, posée et extrêmement prenante (l'un des niveaux restera dans ma mémoire pour très longtemps) et surtout cohérente. Si l'on veut ne s'attacher qu'à l'histoire de Murphy, c'est tout à fait possible et, en une dizaine d'heures, on connaîtra le fin mot d'une histoire bien écrite et contée plus par l'univers que les cut-scenes (enfin!). Si l'on veut explorer tout ce que la ville a à offrir comme histoire macabre, j'imagine que l'on peut rajouter une poignée d'heures qui ne seront pas une perte de temps. Pas aussi traumatisant que je l'imaginais, mais tellement intelligemment fait qu'il fait honneur à la saga de Konami...Vatra Games vient d'être adoubé.