Le jeu vidéo, comme l'art, est parfois fait de coups de coeurs. J'ai découvert Aurion: l'Héritage des Kori-Odan ici, sur Gameblog. Plus précisément à la création du blog de Kiro'o Games : https://www.gameblog.fr/blogs/kiroogames/.

L'histoire d'un studio qui nait au Cameroun, développe un jeu au design résolument inspiré de l'Afrique et qui propose surtout de voir l'évolution de son jeu, de ses balbutiements à ses premiers pas avait tout pour me plaire. Justement, une grande étape se joue aujourd'hui dans cette belle histoire puisqu'après avoir été Greenlighté sur Steam, Aurion: l'Héritage des Kori-Odan s'est lancé dans le grand bain avec un Kickstarter. Il vous reste même quelques jours pour transformer cet évènement en grand succès. Et comme une démo est disponible ici, j'ai pu m'y essayer pendant près de deux heures. De quoi vous donner mes premières impressions, lesquelles sont clairement positives. Le coup de coeur je vous dis!

Commençons par parler de la configuration nécessaire. Si je n'ai pas le matériel pour réaliser une vraie étude de laboratoire, je tiens quand même à signaler que j'ai joué sur mon Mac mini, avec un Windows qui tournait en parrallele (puisque la démo n'est compatible que PC). La charge processeur réservée à Parrallel Desktop est équivalente à un Core 2 Duo et la mémoire allouée est de 1Go. Autant le dire, la bêta d'Aurion: l'Héritage des Kori-Odan n'a pas bronché, malgré ma configuration faible et bancale. Et ça c'est déjà une très bonne nouvelle. Niveau interface, comptez sur une manette Xbox 360, PS4 ou équivalente. Le clavier est à proscrire, de même que les manettes avec moins de boutons (Je me suis même fait bâcher par la team Kiro'o quand j'ai essayé d'y jouer avec ma petite NES30 !)

Sinon, la démo permet déjà de se faire une excellente idée de ce que sera le jeu complet en vous proposant de suivre le début de l'aventure. Et vous serez plongé dès le départ dans l'ambiance si particulière de ce monde qui mélange habilement la culture Africaine et une approche Japonaise du RPG à la Tales Of, avec une recette à base d'exploration, de combat, de skill à acquérir et d'évolution de votre personnage.

Dans Aurion: l'Héritage des Kori-Odan, on endosse donc le rôle d'Enzo, prince du royaume de Zama. Ce jeune adulte vit aujourd'hui une journée extrêmement importante puisqu'il doit se marier avec Erine et être couronné roi. Evidemment, rien ne se passe comme prévu. Le village est attaqué et Enzo, protecteur du royaume, doit tout faire pour le défendre. Après une première série de combats sous forme de didacticiel, il se retrouve face à son futur beau-frère Ngarba Ebou. Un combat singulier s'engage, le temps de découvrir la pleine utilisation de l'Aurion. Le reste, vous le découvrirez par vous-mêmes en essayant la démo! ;)

La patte graphique d'Aurion est très singulière. Les dessins réalisés à la main, offrent une vraie authenticité. Le cadrage du héros est assez éloigné (type de jeu oblige), mettant en avant les différents lieux et paysages lors des phases d'exploration. On note encore qu'à ce stade de développement, les personnages et animations de déplacements sont encore perfectibles, mais rien de choquant. Aurion: l'Héritage des Kori-Odan est au niveau... et il est sacrément beau.

Du côté des combats, c'est le dynamisme qui prime. Avec un style très aérien, les combos s'enchainent rapidement et ce dès le didacticiel. Petit à petit, les choses se corsent avec des ennemis de plus en plus puissants et fourbes (ils essayent toujours de vous prendre à revers), et surtout avec une palette de possibilités qui s'étoffe. L'acquisition de pouvoir se fait progressivement et est toujours accompagnée d'un cap de skill à atteindre. Assez proche d'un Dust : An Elysian Tail dans son approche et dans son rythme, on sent néanmoins fortement les influences du manga japonais (Dragon Ball en première ligne). Ce que j'ai fortement apprécié, c'est que le jeu laisse la part belle à la tactique, même lorsque l'écran est chargé d'adversaires. Combos classiques, aériens, enchainements à distance, gestion du stamina et des magies de plus en plus importante, Enzo offre une belle courbe de progression avant que vous sentiez vous même votre Aurion vibrer.

Quant à la partie RPG, il me reste à en découvrir l'histoire et les particularités techniques, qu'une simple démo ne peut que laisser entre apercevoir. Vivement le premier trimestre 2016 !

Mais ce n'est pas tout ! Voici une interview de Olivier Madiba, le Big Boss derrière toute cette aventure !

Olive: Bonjour Olivier Madiba. Tu es le fondateur et directeur de Kiro’o Games Studio, à l’origine de Aurion - Legacy of the Kori-Odan. Peux tu nous présenter ton parcours professionnel?

Olivier Madiba: Bonjour Olive (sans Tom). Alors j'ai eu mon bac en 2002 à Douala au Cameroun et un Bac+3 en 2007 (la fac au cameroun c'est la résistance pas la vitesse lool). J'ai ouvert une boite qui fait des sites web en 2007 avec des copains de fac (MADIA) et en 2012 je me lance dans le projet fou de créer un studio de jeux vidéo au Cameroun qui exploiterait l'African Fantasy comme base de travail. Il faut dire que depuis 2003 je bosse en arrière plan sur mon projet Aurion : l'Héritage des Kori-Odan. Et plusieurs équipes bénévoles...

Olive: Le studio Kiro'o est donc né en 2012, et porté uniquement par toi au début, dans le but de créer Aurion : l'Héritage des Kori-Odan ?

Olivier Madiba: Disons que j'ai porté le projet avec les deux principaux fondateurs des origines: "Wouafo Hugues et Yakan Dominique". On travaillait sur le scénario et le cahier de gameplay ensemble et c'est surtout le projet de studio qui est né en 2012. Le vrai studio ayant ouvert lui même en 2013. Certains sur Oniro nous appellent "l'evoland du game making" lol

 

Olive: Oui d'ailleurs, depuis quelques jours, je parcours internet à la recherche d’informations et je tombe sur de nombreux articles qui le citent comme si ce studio portait le poids du développement du jeux vidéo en Afrique. Il faut dire que Kiro’o est le premier studio de développement de jeux vidéo de l’Afrique Francophone et un des rares représentants du milieu en Afrique centrale. Comment tu gères cette image ?

Olivier Madiba: Avec fierté et beaucoup de stress! Disons que c'est un honneur d'être le pionnier du coin. Le défi étant justement de pas faire genre être la version "africaine" d'un autre gamedesigner. Il faut trouver ses marques et poser son style. Il y a aussi la pression dû au fait que dans notre société est hyper défaitiste, on est devenu un symbole. On doit donc réussir pour tous ces jeunes qui nous écrivent en inbox, parce qu'ils ont recommencé à croire en eux à cause de nous. C'est à la fois un fardeau et quelque chose de très motivant (bon je fais beaucoup mon Big Boss de MGS5 au studio là dessus lol)

Olive: Tu parles de la société Camerounaise?

Olivier Madiba: La société africaine en général. On a certes le vent en poupe en ce moment (l'Afrique évolue, bla bla) mais pour beaucoup de jeunes il y a pas de changements concrets.

Olive: Pourtant, le développement du jeu vidéo en Afrique semble une évidence aussi. Une main d'oeuvre qui coute moins cher qu'en Europe, au Japon ou aux USA... et surtout une culture très riche, celle sur laquelle tu t'appuies d'ailleurs.

Olivier Madiba: C'est devenu évident avec notre existence et celle d'autres studios qui font du bon boulot (dans le jeu mobile notamment). Mais en réalité quand nous nous sommes lancés on ressemblaient à une bande d'hystériques pour nos compatrotes.Comme pris d'un sérieux délire collectif. Le premier soutien fort nous a été donné par notre Ministère de la Culture, qui a parrainé les conférences de présentation en 2013.

Olive: Le jeu vidéo est donc bien reconnu comme une culture, ou du moins un vecteur de culture, au Cameroun. Et l'Etat est-il toujours à vos côtés aujourd'hui? 

Olivier Madiba: Disons culture, pas au sens de faire des jeux à la Assassin's Creed pour le moment. L'Etat nous soutient à distance mais il faut aussi dire qu'on ne demande pas beaucoup d'aide non plus. On préfère se débrouiller sur une sphère plus privée, pour éviter les "mauvaises personnes" qui voudront tout politiser avec une logique assez... moyen-ageuse des choses.

Olive: Mais du coup, comment géres tu les salaires de tes équipes? Comment survis tu depuis 2013? Parce que Aurion est bien votre premier jeu Et il ne rapporte pas encore d'argent... (sans compter qu'il faut le financer !). Et le kickstarter t'ajoute encore un peu de pression.

Olivier Madiba: Nous avons levés des fonds en vendant 30% de la boite à des investisseurs. C'est comme ça que nous sommes arrivés jusque là. On a pu créer notre propre moteur et on est assez avancés dans la réalisation du jeu. Le kickstarter nous permettrait surtout de gérer les traductions et des ajouts de contenus plus simplement. Mais ça met quand même la préssion

Olive: D'ailleurs, as tu reçu le soutien des médias Français pour ce Kickstarter?

Olivier Madiba: Le soutien des médias francophones a été super on a eu des homes sur Gameblog, deux actus sur JVC, sans parler de rpg france, gamer side story, indiemag.fr et At0mnium. Au niveau européen ça a été bien couvert. On doit gérer un mur plus opaque du côté presse USA néanmoins. mais je pense surtout que la difficulté est le côté éphémère de l'information aujourd'hui. il faut qu'on parle de vous pendant toute la campagne et ça sans gros budget ou gros noms c'est pas évident. 

Olive: Donc, le succès de Aurion : l'Héritage des Kori-Odan est crucial pour la survie de votre studio.

Olivier Madiba: Pour la survie du studio on est confiants. Pour Aurion on a des crtiques à 95% favorables de la part de ceux qui y jouent. Et on a de grosses proposition d'investissement et un large plan d'expansion au mobile, surtout pour le marché africain en particulier. Je précise que nous voulons devenir éditeur continental (voix de big boss). Mon avatar a un oeil bandé parce que je dis toujours aux gars que nous allons batir notre Outter Heaven de geeks et gamers africains.

Olive: Quand tu parles de mobile, tu parles d'Aurion aussi? En tant que portage ou en tant que licence adaptée?

Olivier Madiba: Hmm, pour le moment on a des projets exploitant l'univers du jeu et des jeux casu sur des éléments purements locaux comme la façon de prendre de taxi à plusieurs avec les embouteillages, les mauvaises routes à éviter, tout un concept.

Olive: Va falloir que tu m'expliques cette histoire de taxi!

Olivier Madiba: Simple ici on prend pas un taxi par personne. C'est genre le taxi s'arrête, prend les destinations des passants et hop tout le monde embarque et il tente de déposer dans le meilleur ordre

Olive: Au sujet d'Aurion, il est donc prévu exclusivement sur PC?

Olivier Madiba: Oui Aurion est prévu "nativement" sur PC. Mais si le kickstarter monte bien on aura des portages Xbox One, PS4 et Mac.

Olive: J'ai pu y jouer un peu hier soir, grace à la démo... Aurion est un RPG Action, teinté de combats 2D, avec une histoire et un visuel African-Fantasy. Cette histoire, elle est tirée d'une mythologie Africaine existante?

Olivier Madiba: Hmm non! En fait Aurion puise dans beaucoup de sources mais nous voulons surtout exploiter l'histoire africaine pour construire un pitch avec une forte empreinte de géopolitque. On s'inspire des traditions locales pour les habitudes des peuples, mais les challenges existentiels auront une teinte d'actualités pour ceux qui verront entre les lignes. L'Afrique est au centre du monde, nous nous sommes longtemps plaints d'avoir été colonisés par plusieurs puissances mais au final ça nous donne une assez grande ouverture d'esprit et une vue "centrale" des enjeux de l'humanité. C'est surtout ça que on tentera de mettre dans le jeu. Idem pour le fait que le scénario ne tourne pas autour d'une prophétie, d'un élu, de temples élémentaires. On tente d'innover dans la gestion RPG classique de l'histoire et la quête de force. Mais le principe des Ancêtres et ce qu'est l'Aurion est issu d'une base profonde de la plupart des cultures continentales.

Olive: Et donc, tu peux m'expliquer ce qu'est l'Aurion?

Olivier Madiba: l'Aurion est assez complexe à expliquer (même moi qui ait créé le concept j'avoue que je saisis de nouvelles implications chaque jour). Mais disons qu'en fait il s'agit d'une énergie omniprésente liant les êtres à un savoir ancestral. Mais ça va beaucoup plus loin que ça. Les gens peuvent le voir comme la Force de star wars, la Mako de FF7. C'est sans doute basé sur le même principe, mais on a creusé le concept sous une approche assez.... inédite. Le défi étant de l'expliquer de façon simple lol. Dans le jeu, les personnes peuvent "rassembler leur Aurion" en emmetant une onde spirituelle et en la réabsorbant avec des informations. Ca permet, dans les faits, d'avoir de nouvelles techniques en combat. Ce qui est intéréssant ici c'est que les "éléments" ne sont pas la source mais plus les "états d'âmes". Dans la démo vous avez Colère et Honneur et vous affrontez des Aurioniques qui ont "Révolution" et "Perversion". Voilà vous voyez un peu où ça peut mener....

Olive: La démo est assez linéaire dans son déroulement, avec une mise en avant évidente du système de combat. Est-ce différent pour la suite du jeu ou est-ce un parti pris pour la narration?

Olivier Madiba: Comme c’est notre premier jeu on va être assez linéaire (hélas) pour raconter l’histoire des Kori-Odan de notre point de vue. Mais l’univers du jeu et la nature des Aurions (que vous découvrirez) ouvre la voie à beaucoup plus de liberté dans des suites. Pour les mises en scène étant fan de Kojima c’est vrai qu’il y en a quand même mais ça se calme en évoluant dans le jeu. Beaucoup de dialogues au début pour poser le background qu’on a vraiment « fouillé » . Ceux qui aiment les univers complexes seront aux anges, les adeptes de la « baston only » pourront skipper.

Olive: Peux tu nous expliquer comment se passera l’évolution du personnage et de ses capacités au fil de l’aventure?

Olivier Madiba: Le jeu sera assez classique dans le sens des JRPG à point d’exp. Par contre Enzo possède 21 aurions possibles à découvrir en fusionnant 4 de bases (qui s’obtiennent dans  l’histoire). Une fois fusionné ils sont mémorisés mais ils doivent être « entraînés » pour débloquer les héritages ultime. Un joueur peut en équiper 4 et du coup chacun aura plus ou moins une liberté de style. En fonction du kickstarter nous pensions à ajouter des quêtes annexes qui vous débloquent un Héritage ultime.

Olive: Il reste quelques mois pour peaufiner la version PC du jeu. Quels sont tes objectifs dans ce temps imparti?

Olivier Madiba: Finir les dialogues déjà, comme vous le verrez comme nous n’avons pas de « voice actor » on joue beaucoup sur la mise en scène 2D et des fiches explicatives. On va aussi voir comment intégrer les retours perçus dans cette démo publique (ceux qui sont intégrables)

Olive: Est-ce que tu peux nous parler des Kiro’o Tales qui devraient suivre? Y a -t-il du crossmédia du l’air?

Olivier Madiba: Aurion est pensé pour être une trilogie à la base et les personnages et l’univers sont assez riches pour être fait en Anime et même en Film. On rêve de voir Urithi (la lance d’Enzo) se dévoiler avec des effets à la transformers par exemple.

Olive: Donc on est amenés à revoir Enzo ! En tout cas, je te remercie beaucoup du temps que tu m'as accordé et je te souhaite le meilleur pour Aurion (avec je l'espère vraiment, une sortie sur toutes les plateformes !)

Vous trouverez toutes les informations ci dessous. La démo, le kickstarter (que je vous supplie de supporter pour qu'on ait des versions consoles !!!!) et les liens vers le jeu et son studio!

 

Olive Roi du Bocal