C'est dans la même salle que la table ronde sur « le jeu vidéo, un nouvel art ? » que s'est déroulée cette conférence. L'organisation était toujours aussi professionnelle et discrète et l'ambiance vraiment conviviale grâce à la présence de nombreux membres de MO5.com. Yves était en terre amie mais il y avait quand même quelques personnes venues de leur propre chef... je pense.
Le but de cette conférence était de ne déterminer rien de moins que les meilleurs jeux de l'histoire. Mais, contrairement à ce qui se fait actuellement dans la plupart des cas, pas d'un point de vue du joueur d'aujourd'hui, avec son ressenti et surtout en ayant conscience des évolutions des jeux mais du point de vue historique : quels étaient les jeux ayant fait l'unanimité des magazines et des sites internet de l'époque, en France. S'agissant d'un cadre de retrogaming, Yves s'est très peu arrêté sur les machines encore en vente.
Le principal problème a été celui de la comparabilité. Comment comparer les notes des magazines n'ayant pas la même échelle (Ndsseb22 : Jeuxvideo.com et Gamekult, par ex). Même parmi les joueurs, prenez un « jeune » et un « vieux » gamer. Il est probable que le premier cite plutôt Call of Duty alors que le second pourrait préférer un Pac Man. Il a envisagé de prendre les ventes mais a rapidement écarté cette idée car le marché est en augmentation constante et les « meilleurs » auraient été surtout des jeux des 10 dernières années.
En auscultant les magazines français, il a donc, comme dit plus haut, des avis des jeux au moment de la sortie et dans leur contexte de cette époque et une diversité d'opinions. Il nota par exemple le cas de Black & White de Peter Molyneux sorti en 2000 qui obtint 18/20 sur jeuxvideo.com alors que Joystick décida de ne pas lui donner de note car ils n'étaient pas sûrs de pouvoir le définir comme un jeu vidéo dans le sens usuel du terme. Il faut donc beaucoup de sources pour lisser un peu la subjectivité et la diversité des testeurs.
Méthodologie
Dans sa base de données, chaque a un minimum de 3 sources. Pour chaque année et chaque magazine, il a fait un classement interne des notes afin d'établir un podium des 3 meilleurs jeux pour chaque mag ou site. Le meilleur jeu de l'année est celui qui aura alors été cité le plus de fois par les différentes sources
1980-1983 : le début
Nous sommes ici dans une époque dominée par l'arcade. Mais la première console de salon sort en France. Il ne s'agit pas de l'Atari 2600 mais de la Vidéopac de Philips en 1980. Deux ans plus tard, le marché est plus concurrentiel puisqu'en plus de l'offre maintenant étendue de la VCS 2600, il y a aussi l'Intellivision de Mattel et la machine de Prestige. Le premier magazine français sur le jeu vidéo est TILT dont le premier numéro sort en septembre 1982 et qui s'inspire du magazine américain Electronic Games. Tilt traite à la fois de micros et consoles. À part au Royaume Uni où des magazines existe (et 1 en Italie), il faudra attendre 1985 ou 1986 pour d'autres magazines apparaissent en Europe.
À cette époque, c'est la guerre entre l'Atari 2600 et l'Intellivision. En 1982, le meilleur jeu de l'année est finalement Advanced Dungeons & Dragons sur Intellivision. Le jeu avait la taille faramineuse de 4kio ! Ce sera d'ailleurs le seul jeu à licence cité dans cette étude. En effet, en général, les jeux à licence (film, BD ou autres) n'auront pas des notes suffisantes pour tirer leur épingle du jeu. Les adaptations ont en fait mauvaise presse.
Il y a par contre beaucoup de jeux d'arcade. En 1983, Ms Pc Man sera le meilleur jeu de l'année. C'est une bonne nouvelle pour la série car l'original avait été décrié pour son portage faible. On peut également citer Donkey Kong et Turbo (avec son scrolling rapide et ses énormes bâtiments sur les côtés... pour l'époque). En 1982/83, l'Atari 2600 est au-dessus des autres machines, au niveau des notes.
Puis, en 1984 arrive la grande crise des consoles. Le chiffre d'affaires du secteur est divisé par 10 en 1 an. Cette crise engendrée par une accumulation de sorties de mauvais jeux (grosso modo) profite aux micro-ordinateurs à but ludique comme le Commodore 64, l'Apple II, le Sinclair ou le Spectrum. C'est aussi l'arrivée de nouveaux magazines dans le corpus de travail.
En 1984, le jeu qui ressort des classements est Lords of Midnight, un jeu d'aventure textuel et un peu graphique qui sera le meilleur jeu sur Spectrum. En 1985, on a une période de jeux de sport d'Epyx avec Summer Games 2 et surtout Winter Games qui a fait le bonheur des joueurs et des testeurs grâce à l'introduction de la gestion de l'effort permettant de casser un peu la simplicité du gameplay « prends une pièce de monnaie et massacre les boutons de la borne d'arcade » des précédents. Cependant, le genre du jeu d'aventure plaît particulièrement à la presse. On le voit en 1986 avec Ultima IV sur C64 et The Pawn sur Atari ST. Le premier fait partie d'une grande saga qui durera jusqu'au milieu des années 90 et le 2ème est un bon jeu d'aventure graphique avec parser de texte. Même les jeux Lucas (Monkey Island ou Day of the Tentacle) ne feront pas autant l'unanimité.
1987-1989 : Domination des micros malgré l'arrivée des consoles 8bits
On sera étonné, malgré l'apparition de la NES en France en 1987 (Octobre 1987 d'après L'Histoire de Nintendo vol 3 de Florent Gorges), que Super Mario Bros 1, Zelda 1 ou Metroid n'apparaissent pas dans les classements. En fait, dans la presse, les micro-ordinateurs dominent avec les Amiga et les Atari ST équipés de leurs processeurs 16/32bits.
C'est aussi à cette période qu'arrive Génération4. Il commence comme un magazine généraliste mais ne parle plus des consoles 8 bits au bout de 18 mois. En 1987, le jeu qui fait le plus l'unanimité est finalement Barbarian sur Amstrad CPC. C'est le meilleur jeu de combat sur micro et il y a une polémique sur sa violence qui a fasciné les testeurs. Cependant, sur ST, c'est Flight Simulator 2 qui marque les esprits. Il aurait été qualifié de jeu parfait à l'époque et reste dans les 5 meilleures critiques du corpus de l'étude. C'est probablement le meilleur jeu Atari ST dans les critiques.
En 1989, un Amiga ressort. Il s'agit de Shadow of the Beast. Ce qui a frappé à l'époque, c'est surtout sa beauté graphique et sa qualité technique (128 couleurs, jusqu'à 13 plans de scrolling parallaxe et le tout à 50 images par seconde) malgré une difficulté très élevée même pour l'époque. L'aura du jeu est telle que même la conversion sur Sega Master System, toute aussi difficile mais moins belle, aura d'excellentes notes.
Dans la deuxième partie, nous nous intéresserons à la deuxième décennie de la presse spécialisée en France, 1990-2001 :